Effets Secondaires

EFFETS SECONDAIRES – Critique

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Fin 2011, Steven Soderbergh sortait Contagion. En 2012, il sortait Magic Mike et Piégée. Il revient en 2013 avec ce qu’il prétend être son dernier film de fiction avant sa retraite.

Quatre films en 18 mois, c’est beaucoup pour un cinéaste. Ce qui en résulte un ou deux mauvais film parmi tous ceux-là, comme des films réalisés vite fait. Là n’est pas le principal ; dans Contagion, Soderbergh s’interrogeait sur le corps. De même avec Magic Mike et ses strip-teaseurs. Ici, Soderbergh passe à autre chose et nous livre un film sur l’esprit.

Ce film pourrait être vu comme un thriller sur la psyché. Mais on obtient plutôt une guerre des nerfs atypique, que l’on a déjà vu des milliers de fois au cinéma. Tout est fait pour rabaisser l’autre, pour menacer son rival, pour énerver son partenaire, etc. Tous les prétextes sont bons pour énerver un personnage ou plusieurs. Soderbergh aime peut-être ses personnages, mais peut-être trop. Il va souvent leur faire du mal (mentalement), il va leur retourner la tête, il va les mettre dans de mauvaises positions. Mais jamais il ne va les humilier. Dommage quand il s’agit de détruire l’adversaire par l’esprit. David Cronenberg l’avait réussi dans son A Dangerous Method (2011).

Tout ceci n’est qu’un jeu de dupe : on croirait également que tout n’est qu’un jeu dans ce film. Durant environ 1h30, Soderbergh nous raconte une histoire. Ensuite, il décide de la retourner complètement. Déjà, l’histoire racontée est ce thriller sur la psyché. Pas assez abouti, il donnera quand même quelques bons moments intelligents. Pour faire passer la mixture concoctée entre tous ces personnages, il manque relativement de progression. On sait ce que les personnages veulent, et rien de bougera. Tout ne sera que guerre des nerfs afin d’arriver à son but.

Un thriller psyché un peu passionnant, mais qui manque d’audace. Tout à fait comme sa mise en scène, qui vire rapidement dans le classicisme.

Ensuite, Soderbergh décide de nous faire du Brian De Palma. Il nous apprend que tout était faux et nous fait revenir dans la vérité. Sauf que le jeu a duré bien trop longtemps et le cinéaste ne sait plus comment prendre son dénouement. Il sait quoi dire, certes, mais il reste trop explicatif dans sa démarche. Autant le reste du film était assez froid, mais ici on a le droit à un vrai feu d’artifice de rebondissements sans grand intérêt puisque sans quelconque profondeur. Une fin écrit à l’arrache, avec plus de vice et de folie aurait été très apprécié dans ces manières classiques de traitement de personnages.

Mais qu’importe pour Soderbergh, son grand plaisir dans ce film était de filmer Rooney Mara (rappelez-vous, la stupéfiante Lisbeth du Millénium de David Fincher, 2012). Ceci nous fait passer un moment pas désagréable du tout. Mais ce dernier quart d’heure grotesque et le déroulement de l’histoire ont laissé un goût acide à la forme. Le plus surprenant dans ce film, est de voir la vitesse à laquelle Soderbergh va percer son sujet. On comprend très vite dans quoi on s’embarque, ce qui provoque un relâchement total : tout est effet de miroir. << Regarde, il ne va pas bien. Oh regarde, maintenant c’est elle qui ne va pas bien >> Et tout cela pour des bêtises dont on se fout totalement (rappelons qu’un médicament sert d’élément perturbateur…).

Enfin, Soderbergh essaie de sauver les meubles avec sa mise en scène. Autant Magic Mike mettait ses personnages en valeur tout en se débarrassant des superflus et dépoussiérait son sujet, autant Effets Secondaires n’a pas cette audace de la déshumanisation, de prendre l’esprit à bras le corps. L’ensemble est trop démonstratif et Soderbergh s’embarque dans une mise en scène non aboutie. Il tente des choses, mais ne va jamais plus loin pour vraiment en dire quelque chose.

Ce qu’on ne pourra pas reprocher au film, ce sont ses acteurs. Channing Tatum, devenu acteur fétiche du cinéaste, se montre sous un nouveau. La connexion avec la ravissante Rooney Mara fonctionne très bien, au point de voir l’opposé de ce qu’il était dans Je te promets – The Vow. La guerre des nerfs, fascinante mais pas impressionnante, se propagera surtout entre Jude Law et Catherine Zeta-Jones. Ils se rendent l’appareil avec plaisir, avec charisme, sans manières. Pour les comprendre, il faut les voir et non les écouter. Quant à Rooney Mara, elle est jeune et débute une très belle carrière, mais a surtout un talent qu’on n’a déjà plus à prouver. Elle est le plus gros avantage du film.

Finalement, Effets Secondaires est un film qu’on a l’impression d’avoir déjà vu des milliers de fois au cinéma. Comment partir en retraite cinématographique rapidement ? Soderbergh répond avec un film simple et non abouti. Une fin de trilogie express dont on se serait bien passé. Après deux films sur le corps, le cinéaste analyse l’esprit dans un thriller psyché (un peu) passionnant mais qui manque d’audace. Tout à fait comme sa mise en scène, qui vire rapidement dans le classicisme, ne voulant pas se fouler à chercher plus loin que le bout de son nez.

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