VALLEY OF LOVE

VALLEY OF LOVE, magnifique – Critique

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Guillaume Nicloux prend le parti avec VALLEY OF LOVE, de confronter sur pellicule deux immenses acteurs du cinéma français, toutes générations confondues : Depardieu et Huppert.

Si ce fantasme de cinéphile* est pleinement comblé, ce n’est pourtant pas le seul attrait du film.
Pour moi par exemple, c’est avant tout très personnel: j’ai fait mon propre voyage de noces dans les grands espaces américains, et suis passé par cette Vallée de la Mort qui sert de décor au film. Les exacts mêmes endroits. Et si notre introspection de jeunes mariés était très différente, du fait de notre age et de notre vécu, elle n’en était pas moins réelle. Pour moi, l’identification avec Isabelle et Gérard était inhérente. Dès même, la vision du trailer.

Mais au delà de mon évidente disposition à apprécier le film, il y a ces questions de sensibilité, et de direction d’acteurs.
L’écriture de Guillaume Nicloux parvient à cela, à cadrer au sens propre comme au figuré, ces deux monstres bouffeurs de pellicule. Il enferme Huppert et Depardieu dans une bulle mélancolique s’alimentant du vécu des deux acteurs tout en étant empreinte de sa personnalité, et de ses obsessions de metteur-en-scène.

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Car depuis son excellent Une Affaire Privée, Nicloux s’est spécialisé dans la relecture, via le film de genre, de l’image publique d’artistes-monstres – Thierry L’Hermitte en détective privé alcoolique, Josiane Balasko en flic dépressive, Michel Houellebeck en kidnappé… et maintenant Huppert et Depardieu en parents-acteurs nostalgiques; VALLEY OF LOVE est ainsi ce beau parcours introspectif (avec une pointe de fantastique) qui demande aux deux acteurs de composer une version familière et accessible d’eux-même, pour nous délivrer un message simple mais très touchant sur le deuil, le poids des regrets, la puissance de l’amour, et plein d’autres belles choses qui ne passent pas forcément par les mots. Et si le réalisateur ne touche pas toujours juste dans sa filmographie, ici, c’est réussi.

Deux immenses acteurs dans un huis-clos à ciel ouvert idéal à l’introspection. Magnifique.

L’émotion commence ainsi dès le tout premier plan-séquence, tout simple et encore silencieux. L’on y suit Isabelle Huppert à travers le motel de Furnace Creek – une oasis artificielle au milieu de la Vallée de la Mort. Déjà envoûtant et évocateur, notamment grâce à la magnifique musique composée, si je me souviens bien, par Hans Zimmer pour La Ligne Rouge. Puis, quelques scènes de quotidien, qui donnent déjà des clés très précises pour décoder ce personnage rempli de regrets et de névroses. Lorsque arrive Gérard, un couple qui n’existe plus prend littéralement vie. Guillaume Nicloux filme les deux acteurs avec sobriété, mais ne s’efface pas pour autant derrière eux. Il capte au contraire, des émotions rentrées ou extériorisées, des phobies très personnelles qui s’expriment naturellement, des souvenirs communs à nous spectateur, et au duo HuppertDepardieu. C’est simple, mais c’est beau.

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Au jeu de la performance, Isabelle Huppert est excellente, mais relativement dans son registre habituel. C’est donc Depardieu qui tire son épingle du jeu. Un Depardieu non-pas outré ou grandiloquent, à l’image de ses grands rôles du siècle dernier… Mais pas non-plus cette autre extrémité qu’il incarne dans Mammuth… Non : c’est autre chose. Composition ou pas, l’acteur transmet une émotion certaine, par sa simple présence. Celle-ci boursouflée et fatiguée mais définitivement vivante, raconte déjà qui il est, pourquoi, et comment il en est arrivé là. Puis, en surimpression, son jeu intense alimenté par de très beaux et fins dialogues finissent d’étoffer un des plus beaux personnages que j’aie jamais vus au cinéma.

Personne d’autre n’aurait pu jouer ce rôle, car dans un élan méta, fusionnent l’acteur (son fils Guillaume est lui aussi mort récemment) et son personnage (qui masque par le pragmatisme, l’émotion causée par le décès de son fils). Huppert sert alors de catalyseur d’émotions pour CE Depardieu vulnérable. Positives, ou négatives – ce sont leurs beaux échanges, évidemment, qui font la majeure beauté du film. Et la puissance de leur interprétation fait qu’on ne se dit jamais: « tiens, ces acteurs sont en roue libre », ou « Oh? c’est très écrit tout ça »... Mais plutôt « ils sont beaux, leur histoire est belle. Je les ai toujours aimé et je comprends mieux pourquoi ».

*Je n’ai pas vu le Pialat et Les Valseuses ne compte pas vraiment.

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Mise-en-scène
Scénario
Huppert, Depardieu
Photographie, image
Musique
Émotion
Note des lecteurs5 Notes
4

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