[interview] Jan Kounen, Michaël Nakache, Alexandre Trink (Your Major Studio)

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Les fondateurs de Your Major Studio, Michaël Nakache et Alexandre Trink, et leur parrain, Jan Kounen, ont reçu le Blog du Cinéma, lundi 12 juin 2010. Your Major Studio est une nouvelle plateforme qui permet aux internautes de participer à la production d’un film.

Your Major Studio a d’autres concurrents similaires : We are producteurs (avec Luc Besson) et TousCoProd notamment. Quelles différences apportez-vous ?

Alexandre Trink : Notre positionnement. On n’est pas sur du cash-back. On ne vient pas chez nous dans le but d’investir de l’argent. Je pense qu’il y a des moyens bien plus efficaces pour investir, dans l’immobilier par exemple. Nous, on offre la possibilité de passer de l’autre coté de l’écran et de participer à une aventure, de devenir producteur et finalement de réaliser son rêve. On touche plus a l’émotionnel, c’est pour ça qu’on essaie de développer au maximum notre image de marque.

Ce qui m’a plu dans ce projet, c’est de voir de nouveaux projets se créer donc là [en montrant le logo, ndlr] c’est comme une étincelle qui prend vie et qui s’enflamme pour devenir une étoile qui décolle. C’est une analogie qu’on a voulu faire avec des projets qu’on nous apporte.

Jan Kounen : Il y a aussi une chose différente par rapport aux autres : il y a aussi des étapes. On peut participer au développement même d’un projet. En tant que metteur en scène c’est intéressant, c’est-à-dire qu’on suit un projet dès son origine. Comme il disait, ce n’est pas miser au casino, c’est se dire « Tel metteur en scène ou tel projet, parce qu’il est alternatif ou expérimental, ou parce que soudain c’est quelque chose qu’on a envie de voir, on se dit « on va aider ». » Peut-être juste avec dix euros mais on va suivre quelque chose depuis cette étape là. C’est ce qui va permettre à de petits projets alternatifs de réalisateurs, s’il y a un engouement, de le mettre dans le système et de le valider.

L’internaute va avoir un lien direct au monde du cinéma, ça peut aller à des choses simples comme des avant-premières, des visites du plateau, etc.

Il y a aussi une étape où dans le système on a envie de tester le film, mais c’est toujours très difficile. Ici, ça permet d’avoir des regards, je ne dis pas que ce sont les internautes qui vont déterminer l’affiche, mais si on invite virtuellement 10 000 personnes autour de la table à discuter sur le projet, ils vont donner des indications, c’est comme un test. Ils vont voir qu’il y a des choix, des discussions, ils vont voir comment se fabrique les choses, c’est donc en ce sens là que l’aventure n’est pas simplement de mettre de l’argent. Ça permet de suivre, de participer… Il y a beaucoup de distance entre les créateurs, les systèmes de financement et le public. Internet réduit les distances. Pourquoi n’interviendrait-il pas dans la fabrication d’un film ?

AT : Ce qui est important c’est qu’on est des jeunes, qu’on est accessible. Le succès de la plateforme dépend des internautes, du public, et je pense que c’est sympa qu’on vive l’aventure tous ensemble. C’est ce qu’on essaie de faire passer comme message. L’intérêt c’est que ce soit participatif, ce n’est pas juste une mode. Nous avons la chance d’avoir un lien direct avec le public. Nous donnons la possibilité aux réalisateurs de se constituer une audience avant la sortie. Nous ne sommes pas du tout une source alternative de financement.

Michaël Nakache : L’opacité des autres sites est très gênante. Moi qui viens du ciné, je ne me reconnaissais pas du tout dans ces sites là. A travers la manière de présenter leurs projets, on a l’impression qu’il y a un coté supermarché. On n’essaye pas de bluffer l’internaute. Nous on joue la carte de la transparence : on dit « oui vous ne gagnerez pas toujours de l’argent, oui il y a des films qui se ramassent, en revanche vous pouvez faire en sorte d’optimiser les chances d’un film, puisque plus il y a d’internautes qui misent sur un projet, plus il a une visibilité. » Et l’internaute aura communiqué, parlé en amont sur des  sites communautaires comme Facebook, Twitter., etc . Il emmènera des amis, se sentira concerné, impliqué donc là, oui, le système peut marcher.

Acceptez-vous tous les projets que l’on vous propose ?

MN : Nous les sélectionnons. Ce n’est pas comme en musique où un album coûte 100 000 euros. Un film c’est tellement variable, il y a tellement de paramètres, c’est tellement complexe,. Nous sommes obligés de passer par une sélection, une négociation, après il y a un contrat signé. Il ne peut pas y avoir une mise en ligne systématique. C’est trop lourd d’un point de vue administratif.

Avez-vous donc déjà refusé des projets ?

MN : Oui bien sûr, pas mal. Mais ce ne sont pas des refus où l’on dit « ne revenez plus jamais ». C’est juste qu’on se dit que ca ne rentre pas trop dans l’esprit de Your Major Studio, ou qu’on ne va pas mettre 6 projets complètement identiques.

AT : D’ailleurs, les Major Company, au départ, ont commencé avec quelques artistes avant de se diversifier et d’accepter n’importe qui. Et finalement, je pense qu’ils mettent en avant certains projets.

Pourquoi avoir choisi Jan Kounen comme parrain de votre projet ?

MK : Jan a un coté commercial, il fait des films qui gagnent de l’argent, qui marchent, mais toujours avec une identité propre, avec une idée directrice qu’il suit. En plus c’est lui qui a remis au goût du jour le genre en France. Voila, il a ce côté atypique mais dans le système. Tout en étant produit par de gros producteurs, on lui laisse pas mal de liberté, plus qu’avec pas mal de réalisateurs.

AT : On a de la chance d’avoir un super parrain qui représente bien notre esprit.



Pensez-vous que le téléchargement illégal peut diminuer grâce à ce type de plateforme?

AT : Effectivement, on pense que ça contribue clairement à limiter le téléchargement. En effet, les internautes risquent de se sentir lésés puisqu’ils ont mis leur argent dans le projet.

MN : Puis ils peuvent dire à leurs potes « Hé ! Mais tu es en train de télécharger mon film, tu te fous de ma gueule. » On se sent concerné, il y a un côté éducatif de faire comprendre à l’internaute que la culture n’est pas gratuite, qu’il y a des centaines de gens qui travaillent sur un film. En même temps, je ne veux pas défendre les pirates, mais le cinéma a toujours gardé ses distances avec le public à cause du côté un peu starification qui fait qu’à un moment, on se dit « ah mais moi j’en ai rien à foutre de télécharger le film de Brad Pitt parce qu’il est dans sa baraque à 25 millions de dollars, et puis machin ne voyage qu’en jet privé, qu’est-ce que ca va changer dans sa vie ? », alors oui, évidemment pour lui ca ne va rien changer. C’est pour tous les autres qui travaillent sur les films.
A un moment si on permet à l’internaute de devenir gagnant avec un projet audiovisuel, il va se dire « ouais ben finalement pourquoi je piraterai ? », j’ai payé pour ce film.

AT : Et dans le mesure du possible, on offre le dvd du film. On va aussi leur donner accès aux coulisses, aux avant-premières, leur offrir des casquettes Your Major Studio, la possibilité de diner avec l’équipe du film et des comédiens par exemple.

Le réalisateur a donc plus de liberté, quels seraient ses nouveaux rapports avec les producteurs ?

MN : Il y aura toujours le producteur, il faut qu’il y ait le binôme producteur/réalisateur parce que c’est un opposant, mais un opposant de discussion. Il faut cependant différencier les financiers et le producteur. Le réalisateur va s’affranchir de certains financements ou alors ne pas se faire bouffer par une grosse major quand on arrive en bout de course, qu’il nous manque 100 000 euros, et qu’il y ait une grosse major qui dise « tu vas me faire le montage comme ça et ça j’aime pas », alors qu’ici le réalisateur reste maître de son projet. On laisse pas mal de liberté, après c’est l’internaute qui choisit, ce n’est pas nous.

AT : Je pense qu’on rend le cinéma au public. On inverse la relation : jusqu’à aujourd’hui, on imposait du contenu au public et là, c’est le public qui choisit. Je trouve ça très juste comme système. De toute façon qui fait le succès d’un film ? C’est le public.

Parmi les films présents sur Your Major Studio quel est votre préféré ?

MN : Franchement je les aime tous, parce qu’il y en a aucun qui se ressemble, donc je n’ai pas de préférence.

AT : Moi oui, mais je dirai rien.

MN : Il y a En souvenir de Lola qui a un coté très très dark, le scénario est très dur et on peut difficilement le comparer avec des séries comme J’ai jamais su dire non qui est plutôt marrante, ou avec Cellule 211 qui est un film à grand public espagnol qui a fait 4 millions d’entrées.

http://www.yourmajorstudio.com/

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