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L’influence de Last of Us au cinéma

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A priori, rien ne semble pouvoir rapprocher deux films comme Logan de James Mangold et The Last Girl de Colm McCarthy. Pourtant, tous deux se rejoignent par une “possible” influence du jeu vidéo The Last of Us.

Sortie en 2013 sur PS3, The Last of Us fut une petite bombe dans le monde du jeu vidéo, considéré comme l’un des meilleurs jeux de l’année, et plus encore. S’il est évident qu’il fut, lui-même, grandement inspiré d’œuvres cinématographiques (Les Fils de l’homme, 28 jours plus tard, Je suis une légende, The Road…), The Last of Us semble avoir suffisamment touché l’imaginaire collectif pour devenir à son tour un influenceur. Un retour à l’envoyeur donc pour une œuvre qui aura marqué une génération de gamers. Alors que le cinéma continue de se casser les dents sur des adaptations de jeux vidéo mal maîtrisées, les films Logan, grosse production de la Fox sur le super-héros Wolverine, et The Last Girl, film post-apocalyptique avec des zombies, pourraient, dans une certaine optique, être ce qui se rapproche le mieux d’une bonne adaptation du jeu vidéo. Attention SPOILER !

L’histoire de The Last of Us commence en 2013. Joel, la trentaine, vit avec sa fille Sarah. Lorsqu’une infection touche soudain la population, Joel décide de s’enfuir avec sa fille – offrant là une des meilleures séquences d’introductions vues dans les jeux vidéo, mais aussi au cinéma, rappelant notamment La Guerre des mondes de Steven Spielberg ou encore L’Armée des morts de Zack Snyder. Le jeu débute concrètement 10 ans plus tard. Alors que le monde entier a été touché, les populations se sont réfugiées dans des zones sécurisées sous le contrôle de l’armée. À l’extérieur de ces zones, la nature a repris le dessus, et les infectés sont autant un danger que les hommes qui ne respectent plus que la loi du plus fort.

Logan / The Last of Us

À première vue, rien à voir avec l’histoire de Logan, où Wolverine a décidé de ne plus jouer les héros et s’occupe de son vieil ami, le professeur Charles Xavier. Pourtant, en observant d’abord les personnages, leur caractère et leur évolution, se trouve de nombreuses similitudes avec le jeu. Déjà physiquement, entre Joel et Logan, la ressemblance est assez frappante : deux hommes, cinquantenaires, barbe et cheveux grisonnants, le visage marqué par le temps. Sur le caractère, Logan a perdu tout désir de vivre depuis la perte d’êtres chers – on peut supposer Jean Grey. Comme Joel, il est dans la survie, privilégie égoïstement son propre intérêt et se refusera, jusqu’à un certain point, à tout acte d’héroïsme.

L’élément déclencheur des deux intrigues est alors une jeune fille, qui vient contrarier leur petite routine. Ellie, une adolescente immunisée contre le virus pour The Last of Us, et Laura, une enfant d’une dizaine d’années aux pouvoirs similaires à ceux de Wolverine pour Logan, qui gardent leur nature secrète. Elles s’imposent littéralement aux deux personnages masculins, menant, dans un premier temps, à une relation conflictuelle. Les deux relations évolueront ensuite, jusqu’à donner naissance à un attachement réciproque. Pour le jeu vidéo, forcément, cela se fait sur la durée (plusieurs heures de jeu). Le joueur développant ainsi une profonde empathie tandis qu’il suit – en plus de les incarner – ces personnages, obligés de collaborer et de survivre ensemble. Pour ce qui est de Logan, en raison du format plus resserré qu’exige un film, les sentiments ne se développeront que sur quelques scènes. Suffisant néanmoins, pour que se reproduisent des éléments scénaristiques communs à de The Last of Us, qui mèneront à ce fameux rapprochement des protagonistes. Notamment, l’objectif principal du héros qui est, dans les deux cas, de conduire la jeune fille à un lieu précis – chez le groupe de révolutionnaires, les Lucioles, pour le jeu, dans le Dakota du Nord, à “Eden”, dans le film. Durant leur parcours, des ennemis s’en prendront à eux, et c’est en faisant face à la violence alentours que les héros s’attacheront l’un à l’autre. Tout en suivant cette trame scénaristique, le réalisateur James Mangold propose de nombreuses situations proches de celles vécues dans le jeu vidéo, allant parfois même reproduire quasiment à l’identique certains plans.

Logan / The Last of UsLogan / The Last of Us

En suivant le fil de Logan, d’autres liens apparaissent. Notamment dans la dernière partie, alors que Logan, blessé et ne tenant presque plus debout, est obligé de laisser Laura prendre le relai. C’est ainsi elle qui le traînera inconscient chez un médecin, puis qui les conduira jusqu’au refuge d’Eden. C’est exactement le même genre de transition d’un héros à un autre qui se produit dans The Last of Us entre les chapitres Automne et Hiver, complétés avec le contenue téléchargeable The Last of Us : Left Behind. Après que Joel se soit violemment empalé, Ellie le laisse dans une cabane avec des médicaments le temps qu’il se remette un peu sur pied. Avant cela, il faut noter un moment marquant dans leur aventure, lorsqu’Ellie sauve Joel en tuant un de ses agresseurs d’une balle dans la tête à bout portant. Un premier meurtre pour la jeune fille, que le jeu prend garde de ne pas prendre à la légère. “C’était lui ou moi” finira par lui concéder Joel pour la rassurer et maintenir ce besoin de moralité. Ce moment de flottement qui suit alors son geste se retrouve dans les derniers instants de Logan. De manière similaire, Laura tire avec une balle en adamentium sur le double de Logan, pour sauver son compagnon. Bien sûr, à la différence d’Ellie, Laura n’en est pas à son premier crime à ce stade du film. Mais la symbolique de l’arme à feu – un outil que Logan répète détester et qu’il n’utilise qu’en dernier recours -, reste présente. Un geste fort qui n’aurait certainement pas eu la même valeur si Laura s’était simplement jetée, une fois de plus, sur son assaillant avec ses griffes.

The Last of Us

En l’espace de quelques minutes, le film passe alors d’une violence ultime (le sauvetage de Laura par Logan) à une émotion touchante et délicate, où la question de la paternité – évidente dans le jeu – trouve enfin toute sa valeur. Bien que n’ayant plus longtemps à vivre, Logan voit sa relation avec Laura atteindre son paroxysme. Il lui prend la main, accepte qu’elle le considère comme son père et peut ressentir, une dernière fois, des sentiments pour quelqu’un. Une trajectoire similaire à la dernière partie de The Last of Us, lorsqu’Ellie est retenue par les Lucioles qui veulent l’utiliser pour créer un remède. Joel fera un véritable massacre dans le laboratoire pour pouvoir l’atteindre – dans une forêt pour Logan. Chez Logan comme chez Joel, il y a un réel basculement dans la brutalité, dès lors que sa compagne se fait enlever. Si tous deux parviennent à un sauvetage, la finalité reste différente. Contrairement à Logan, Joel parvient à s’en sortir et repart avec Ellie, laissant sur un dernier plan extrêmement puissant. Mais dans d’autres circonstances (si Hugh Jackman n’avait pas tenu ce rôle depuis près de quinze ans par exemple), Logan aurait tout à fait pu également survivre, et poursuivre sa route vers d’autres aventures aux côtés de Laura, comme Joel et Ellie.

Logan / The Last of Us

Évidemment, entre Logan et The Last of Us, il reste difficile de voir davantage qu’une forte influence – encore une fois pouvant être tout à fait inconsciente. La relation des personnages et ce à quoi ils se confrontent, ainsi que les décors et certains plans reproduits, permettent de faire des liens, mais les intrigues restent différentes. À l’inverse, le film The Last Girl trouve des similitudes, non pas directement dans les personnages, mais dans l’association de l’intrigue à une imagerie bien précise.
Le film se déroule en Grande-Bretagne, après que le monde a été infecté par des zombies. Ce qu’il reste du gouvernement tente de trouver un remède en étudiant un groupe d’enfants, deuxième génération de « hungries ». Ces derniers, tout en étant infectés, parviennent à maîtriser leurs pulsions cannibales. Dans une base militaire, ils sont soumis à différents tests visant à développer davantage leur humanité. Alors que la base est soudain envahie par une horde de zombies, la jeune Melanie (une “hungrie”), ainsi que son institutrice Helen et un petit groupe de soldats, parviennent à s’échapper. Ensemble, ils rejoignent une ville dans le but de trouver des vivres et des secours. C’est à partir de là (donc après la première moitié du film environ) que The Last of Us et The Last Girl se rejoignent de manière étonnante. En effet, après avoir adopté la forme du huis clos (on reste confiné dans la base) et s’être focalisé sur le personnage de Melanie, le scénario du film développe davantage l’univers et le monde extérieur. Là encore, on retrouve une ville abandonnée, remplie de zombies, où la nature a repris ses droits.

The Last Girl

En plus de ce décor qui, finalement, peut aussi bien être une reproduction du jeu vidéo que de nombreux films (Je suis une légende par exemple), se trouvent des zombies aux caractéristiques différentes des habituels mangeurs de chairs. N’ayant plus rien à se mettre sous la dent, certains sont restés en “sommeil”. Inactifs, ils se tiennent debout et ne repèrent les humains que par leur odeur. Raison pour laquelle le groupe s’applique régulièrement une lotion sur le corps, pour passer inaperçu plutôt que d’engager le combat – The Last Girl n’étant évidemment pas un film d’action, mais bien plus intimiste. De la même manière, le jeu confronte les héros à des Claqueurs (troisième stade d’infection), qui se repèrent par le son, tandis que les Rôdeurs (deuxième stade) sont eux aussi souvent dans un état inerte. Plusieurs séquences de The Last of Us se prêteront alors à de l’infiltration pure. Le joueur devant passer discrètement autour des créatures pour économiser ses munitions et éviter de voir surgir une horde.

Une ambiance similaire entre les deux objets, liée aux caractéristiques des ennemis, mais également dans leur physique. En effet, le visuel des créatures de The Last Girl est assez commun à The Last of Us. Il s’agit d’êtres qui n’ont plus rien d’humain (contrairement à ceux, très actifs, qui attaquent la base au début du film), sortes d’hybrides qui auraient muté avec le temps et l’environnement. Leur visage est de moins en moins visible, déformés par des espèces de champignons qui ont commencé à se développer. Des éléments visuels auxquels s’ajoute la présence d’une immense plante, résultat de la fusion de plusieurs zombies avec la nature (et dernier stade de l’épidémie). Lorsque cette plante sera brûlée (dans les dernières minutes du film), le virus s’échappera sous la forme d’un gaz jaunâtre, contaminant ainsi l’ensemble de la ville. Ce dernier stade d’évolution n’est évidemment pas sans rappeler les spores envoyées par les Colosses dans The Last of Us.

The Last Girl / The Last of Us

Bien que le réalisateur Colm McCarthy affirme ne pas avoir eu connaissance du jeu vidéo avant la sortie de son film ou au moment de l’écriture (le jeu est sorti en juin 2013, le roman de M.R. Carey en juin 2014 et la production du film a débuté en mai 2015), la possibilité que les équipes au maquillage et aux décors aient reçu cette influence inconsciente est la plus envisageable. Car c’est donc avant tout par l’imagerie et l’ambiance proposées que The Last Girl paraît liée à The Last of Us. Et étant donné les différences scénaristiques majeures entre les deux – d’un côté la survie du duo Joel et Ellie aux Etats-Unis, de l’autre un groupe plus large en Grande-Bretagne – ce film peut davantage être considéré comme une œuvre parallèle, une espèce de spin-off (non-officiel) du jeu vidéo, se déroulant dans la même période, suite à la même infection, mais dans un lieu (pays) différent. Mais surtout, là où The Last Girl mériterait le titre d’adaptation réussie, c’est dans sa capacité à faire ressortir certaines thématiques, comme le rapport adulte / enfant. C’est pour le coup dès le début du film qu’on insiste sur la relation entre Helen et Melanie, que la jeune femme semble être la seule à considérer comme une enfant, une humaine, et non pas comme un objet scientifique. Ainsi, tandis que le sauvetage d’Ellie par Joel dans le laboratoire des Lucioles apparaît comme le climax du jeu, l’intervention d’Helen dans le laboratoire militaire fait office d’élément déclencheur. La construction scénaristique est donc inversée, tout comme les capacités des personnages (c’est ici la plus jeune qui domine les situations), mais cela mène à faire ressortir ce sujet commun, et à un traitement de l’empathie assez similaire.

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Si Logan et The Last Girl trouvent des points communs avec Last of Us, leurs inspirations restent bien plus générales. Néanmoins, par ces deux exemples, il peut être admis que le jeu vidéo a aujourd’hui une réelle influence sur le cinéma. Et notamment sur un certain cinéma d’auteur, ou ce qui peut s’en rapprocher. Car même si ces deux films visent le grand public, leur traitement s’éloigne assez des plus gros blockbusters, notamment de par leur personnalité. Un peu à la manière d’un Sam Raimi ou Christopher Nolan qui s’emparaient en leur temps du monde des super-héros. Peut-être, alors, verrons-nous un jour le même type d’adaptations pour les jeux vidéo, qui se détachent du matériau d’origine pour en capter l’essence et en faire une œuvre avant tout personnelle.

Pierre Siclier

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