• Réalisation : Arnaud Larrieu, Jean-Marie Larrieu
• Acteurs principaux : Karin Viard, Isabelle Carré, André Dussolier, Sergi Lopez, Denis Lavant, Philippe Rebbot
• Durée : 1h50min
Nous avons vu 21 NUITS AVEC PATTIE en avant-première française au Festival du Film Francophone d’Angoulême, qui a eu lieu en août dernier.
Les réalisateurs-scénaristes Jean-Marie Larrieu et Arnaud Larrieu ont l’habitude de réaliser des films portant sur des personnages ayant des relations quelque peu extraordinaires entre eux et de donner à la nature un rôle à part entière. 21 NUITS AVEC PATTIE n’échappe pas à la règle, même si leurs interprètes favoris ne sont pas présents : on ne croisera donc ni Mathieu Amalric (L’Amour est un crime parfait ou Les derniers jours du monde), ni Sabine Azéma (Le voyage aux Pyrénées ou Peindre ou faire l’amour).
Les spectateurs familiers de leur univers à la bordure du politiquement correct ne seront donc pas déçus ! Pour ceux qui ne s’y sont encore jamais frottés, les frères Larrieu ont prévenu : 21 NUITS AVEC PATTIE est un conte pour adultes !
L’histoire se déroule dans la montagne noire de l’Aude, propice aux croyances et événements surnaturels, comme paraît-il souvent lors de la fête de la Vierge du 15 août. De fait le corps de Zaza, la mère juste décédée de Caroline/Isabelle Carré, va disparaître puis réapparaître tout aussi mystérieusement. S’ensuivront des péripéties pour retrouver le corps avant les funérailles et démasquer les coupables. Le responsable est-il ce nécrophile recherché par la gendarmerie ? Est-ce Jean/André Dussolier, improbable JMG Le Clézio ou Kamil le fils de Pattie/Karin Viard? A moins qu’il n’y ait pas d’explications plausibles ?
La prude citadine Caroline rencontre donc Pattie, femme de ménage et amie de sa mère, qui s’assume totalement en fieffée coquine, entreprenant de lui raconter ses coucheries avec moult détails et mots très crûs. On voit bien que les frères Larrieu se sont délectés à offrir à Karin Viard ce langage outrancier. Ils ne sont d’ailleurs pas les seuls puisque Julie Delpy a récemment elle aussi été inspirée par Karin Viard dans Lolo.
Reconnaissons que les dialogues de ce film bavard sont plutôt savoureux et drôles. Mais c’est finalement assez poussif, même si le propos est de démontrer l’ouverture d’esprit de Pattie, dont il sera question dans la suite de l’histoire que nous ne dévoilerons pas.
La présence de Pattie reconnectera Caroline à sa propre sexualité, elle qui n’a plus de désir pour son mari qu’elle aime pourtant encore (Sergi Lopez dans une brève apparition). Les réalisateurs ont pris le parti de nous faire découvrir cette femme extraordinaire à travers les yeux de Caroline : ils l’ont voulu généreuse, naturelle, libre, sexy et assumant pleinement sa sexualité, amoureuse de la vie et des hommes… la femme idéale pour les frères Larrieu en somme !
Ces rencontres rafraîchissantes ont lieu dans une grande maison squattée par une sacrée bande d’énergumènes (famille, amis, ouvriers) et des campagnards bienveillants qui font joyeusement la fête au village. Tout ce beau monde a un rapport très naturel au corps et la baise si joyeuse qu’elle ne s’embarrasse pas des codes sociaux.
« 21 nuits avec Pattie explore plusieurs genres, laissant une impression d’un moment hors du temps, empreint d’une certaine poésie. »
Mais le film, véritable ode à la vie, ne nous laisse pas dupe de cette peinture du monde un peu trop fantaisiste et idéaliste pour être crédible. L’histoire explore finalement plusieurs genres sans oser en choisir un précis, interrogeant le spectateur indécis : c’était quoi ce film ? Il en sortira avec le sentiment d’avoir passé un moment hors du temps et empreint d’une certaine poésie, à laquelle se mêlent harmonieusement suspense et surnaturel.
Un surnaturel au passage parfois frustrant pour le spectateur et bien commode dans le scénario, qui vient d’obtenir le Prix du Meilleur Scénario au Festival International du Film de San Sebastian.
Enfin, comme tout conte, la mise en scène des réalisateurs nous tient volontairement à distance : ils nous racontent mais ne nous impliquent pas, et de fait nous ne sommes pas touchés par les personnages. Nous les voyons évoluer avec nos yeux seuls, et non avec notre cœur.
Les deux actrices sont assez justes malgré les traits un peu trop caricaturaux de leurs personnages, manquant de nuance. Isabelle Carré évite de peu le piège du type de rôles dans lesquels elle aurait tendance à s’enfermer (nunuche inadaptée de la vie comme dans Les Chaises musicales ) et Karin Viard (Belles-Familles) assume avec enthousiasme l’incarnation de son personnage d’allumeuse sex addict.
Mention spéciale aux acteurs qui sont formidables : André Dussolier qui parvient encore à surprendre, Denis Lavant (Grazziela) et sa présence intense même en short, Philippe Rebbot (Une famille à louer) toujours aussi naturel quelque soit son rôle, et enfin Laurent Poitrenaux (Microbe et Gasoil) en gendarme fin psychologue !
Sylvie-Noëlle
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