Antoine Doinel a épousé Christine Darbon. Toujours instable, il exerce provisoirement un métier inhabituel : il teint des fleurs dans la cour de son immeuble, pour les rendre plus attrayantes. Christine donne chez elle des leçons de violon. Elle est bientôt enceinte et Antoine, qui a perdu son emploi de fleuriste à la suite d’une mauvaise manipulation chimique, mais il entre dans une importante entreprise américaine qui effectue des recherches et expériences hydrauliques. Celui-ci, toujours volage, rencontre une Japonaise, c’est la première fois qu’il trompe Christine. Kyoko envoie à Antoine des petits mots d’amour et les cache dans un bouquet de tulipes. Christine découvre les mots de Kyko et sent bien qu’Antoine la trompe. Christine et Antoine vont se séparer mais Antoine s’ennuie avec Kyoko. Un soir, au restaurant, alors qu’il dîne avec elle, Antoine quitte la table à plusieurs reprises au cours du repas pour téléphoner à Christine. Antoine retrouve Christine : le couple se reforme.
Note de l’Auteur
[rating:10/10]
• Date de sortie : 9 Septembre 1970
• Réalisé par François Truffaut
• Avec Jean-Pierre Léaud, Claude Jade, Daniel Ceccaldi, Claire Duhamel, Hiroko Berghauer
• Film français
• Durée : 1h35min
• Titre original : Domicile Conjugal
• Bande-annonce :
Le premier objectif de François Truffaut avec ce film était de faire une sorte de comédie américaine. Le cinéaste français a repris son thème habituel : l’amour. De plus, il continue de conter les histoires de son personnage Antoine Doinel, joué par Jean-Pierre Léaud. Mais avec ce film, François Truffaut voulait faire quelque chose de différent. Il voulait parler de l’amour en riant, de la manière dont le faisaient McCarey et surtout Lubitsch.
Dans ce film, François Truffaut parle d’adultère. Mais comme il le voulait, il parle d’un sujet dramatique du quotidien en intégrant de l’humour. Comme cette première scène où Christine (Claude Jade) marche avec son violon et rétorque « non, pas mademoiselle, madame ». Ou lors des scènes dans le lit avec Antoine Doinel (la lecture d’un article, la recherche d’un nom pour les seins, …). Ce film est très intelligent dans sa façon de nous offrir un mélodrame mais avec humour. Un humour qui prouve que François Truffaut aime ses acteurs et qu’il aime les gens.
C’est surtout ça dans les films de François Truffaut. Il filme d’abord ses acteurs avant de raconter une histoire. Claude Jade est toujours habillée de telle façon à la valoriser. Que ça soit dans le lit, ou même cette volonté qu’elle soit constamment en jupe (à une exception près, lors de la fusion d’une nouvelle pièce), il y a un plaisir chez Truffaut de filmer les jambes de l’actrice). Puis avec cette cour d’immeuble, Antoine Doinel est le centre de toutes les attentions. On pourra noter ses chaussures très classes, soir un jean ou un pantalon en velour, soit en costume ou en pull à col roulé.
Un film sur la chute progressive d’un couple, qui finira par se retrouver, ressemblant beaucoup aux comédies romantiques américaines.
Cette cour d’immeuble est en fait bien plus que cela, elle est un espace scénique où se croisent toutes les histoires sentimentales des voisins. En parallèle du couple Antoine/Christine, on a leurs voisins de paliers avec la femme qui énerve son mari, on a le gérant du bar qui dispute sa femme car elle ne travaille pas, on a le dépanneur qui n’a pas épousé la fille qu’il aimait, etc. Sans parler du retour des parents de Christine, avec une scène clin d’œil au film Baisers Volés où Christine et Antoine s’embrassent dans la cave à vins.
Ce film marque la continuité directe des aventures d’Antoine Doinel. Mais dans ces aventures, quelque chose passe en priorité. Les histoires sentimentales d’Antoine passent avant ses histoires professionnelles. On remarque bien que le changement de travail est bien un prétexte pour Truffaut afin que son personnage d’Antoine Doinel rencontre la japonaise Kyoko, déjà d’apparence ennuyeuse dans ses gestes limités et son regard baissé.
Il y a tout de même une nette différence entre le traitement du personnage d’Antoine Doinel entre L’amour à 20 ans, Baisers Volés et ce film. Ici, Antoine Doinel a bien grandi, il a mûrit, et il s’est marié (la demande à Christine a été faite à la toute fin de Baisers Volés, assis sur un banc). Même si l’humour est constant dans ce film, il n’empêche qu’Antoine Doinel est assez noir. Il n’écoute pas Christine sur le nom de leur fils, il trompe sa femme, il veut tout aussitôt, etc.
Ceci peut être traduit par un sentiment de manque de contact humain. On pourra relever cette réplique dite par Claude Jade où elle reproche à Antoine Doinel qu’il « faut t’embrasser quand tu as envie qu’on t’embrasse ». Mais Antoine Doinel aura de quoi se consoler. En effet, la naissance de l’enfant va relancer le récit et c’est là que l’histoire du couple va prendre son envol. Par exemple, Antoine Doinel qui a l’impression de ne pas avoir eu de père (dans Les 400 Coups) se montre comme un père très câlin et très attentif envers son fils.
Cet enfant va relancer le rythme du film. Ce film qui, rappelons-le, a la volonté de s’apparenter comme une comédie américaine, démarre doucement et s’accélère petit à petit. Ca démarre par l’exposition du domicile conjugal, ça continue par le quotidien du couple, l’enfant arrive, la japonaise arrive, la séparation du couple, les retrouvailles en douceur. On a ici le rythme typique d’une comédie romantique américaine.
On retiendra également cette scène où Antoine et Christine se confient chacun à des femmes où ils racontent ce qu’ils aiment chez l’autre. Et François Truffaut nous parle de petits détails de la personnalité de l’autre. Les gros plans sur les visages des acteurs à ce moment, leurs sourires, leur ton sur accent de regrets : preuves d’amour.
Enfin, on appréciera aussi les multiples références cinéphiliques dans le scénario. Que ça soit dans la volonté de faire une comédie américaine par son rythme, il y a de nombreux clins d’oeils. On se rappellera de Laurel et Hardy, à propos des seins de Christine. Ou alors Antoine Doinel qui essaie de téléphoner à Jean Eustache, ami de François Truffaut, qui a aussi dirigé Jean-Pierre Léaud dans quelques uns de ses films.
Finalement, Domicile Conjugal est un film qui ressemble beaucoup aux comédies romantiques américaines de l’époque. François Truffaut parle d’adultère avec humour car il aime ses personnages et il aime les gens. Antoine Doinel a bien grandi, il a mûrit et il est marié. Il a un sentiment d’enfermement qu’il veut combler avec le contact humain. Mais cela amènera à la chute progressive d’un couple, qui finira par se retrouver. C’est léger, drôle, et rempli de merveilleux sentiments.