Dernier film posthume de la réalisatrice Solveig Anspach, malheureusement décédée des suites d’un cancer dont elle avait raconté l’apparition dans son premier film, autobiographique, Haut les cœurs !, L’EFFET AQUATIQUE n’en est pas moins une belle déclaration d’amour à la vie, aussi absurde soit-elle.
Samir (Samir Guesmi) est séduit au premier regard lorsqu’il croise la route d’Agathe (Florence Loiret-Caille), bien que la réciproque ne soit pas vrai. Le jeune grutier s’inscrit illico à la piscine municipale de Montreuil pour prendre des cours de natation, s’inventant un trauma infantile pour expliquer son incapacité à flotter. Sans le savoir, il va mettre le doigt dans un engrenage qui le forcera à une sur-enchère de mensonges, plus ridicules les uns que les autres, n’hésitant pas à suivre Agathe jusqu’au bout du monde.
L’EFFET AQUATIQUE suit ce fil rouge, prétexte à des gags qui, au-delà du rire, décortiquent les carapaces de ses personnages. Solveig Anspach filme avec tendresse ces corps disproportionnés (lui très grand, elle très petite) flottant dans l’eau, leurs regards se croisant subtilement sous la surface avant d’être masqué par une myriade de bulles d’air échappées de leurs poumons. Samir est empêtré dans une timidité maladive, qu’il combat héroïquement en sortant sans cesse de sa zone de confort. Agathe, elle, semble trop sûre d’elle, arborant un visage dur qui se détendra progressivement à mesure qu’elle prendra conscience de la pureté des sentiments de Samir.
« Comédie absurde et romance rafraîchissante, le dernier film de Solveig Anspach s’attache à des personnages dont la fragilité nous touche »
Comédie absurde et romance rafraîchissante, le dernier film de Solveig Anspach s’attache à des personnages dont la fragilité nous touche. La délicatesse de ce regard se retrouve évidemment dans la direction d’acteurs d’Anspach mais aussi, parfois, dans son découpage. La succession des plans lors de leur premier véritable échange de regards sous l’eau, se réserve bien de sauter trop vite à la conclusion d’un banal champ-contrechamp. La réalisatrice prend le temps d’installer les deux personnages dans un plan qui les réunit de profil. Ils auront le temps de remonter deux fois à la surface pour prendre leur respiration, et replonger, avant qu’on n’obtienne enfin ce champ-contrechamp. Du coup la banalité du procédé devient une force, car l’attente du spectateur pour cette convention a été mise à l’épreuve et a ainsi épousé la mécanique du désir amorcé entre Samir et Agathe.
De la même façon, le désir de Samir n’est pas traduit à l’image par une érotisation du corps d’Agathe, mais par son attention aux détails qui la rendent singulière. La tête plongée dans l’eau, Samir note qu’Agathe doit se tenir sur la pointe des pieds pour porter son grand corps à lui au-dessus de la ligne de flottaison. La maître-nageuse n’a pas tout à fait pied, donc elle se fait ballerine aquatique.
Le virage scénaristique que prend L’EFFET AQUATIQUE à sa moitié (un revirement qui change l’équilibre entre les deux protagonistes) paraît assez artificiel… Mais qu’importe : on suit désormais le film davantage pour Samir et Agathe que pour son intrigue.
Plutôt qu’un fou rire de 1h25, on cherchera dans L’EFFET AQUATIQUE un prétexte à la rencontre de personnalités bien campées dans l’apesanteur des piscines. Détendez-vous et laissez-vous flotter.
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