[dropcap size=small]C[/dropcap]’est en partant de son propre vécu que Maxime Giroux a réalisé FELIX ET MEIRA, son troisième long métrage. Agé de 38 ans, le réalisateur a côtoyé durant des années la communauté juive hassidique ultra-orthodoxe du quartier de Mile End à Montréal (Canada). Une communauté particulièrement renfermée sur elle-même avec laquelle Maxime Giroux n’a jamais pu communiquer. FELIX ET MEIRA, prix du meilleur film canadien au Festival international du film de Toronto, nous fait découvrir cet univers particulier. Il dévoile ses défauts et ses contraintes mais sans jamais se permettre le moindre jugement sur les membres de cette communauté religieuse, qu’il dépeint avec beaucoup de délicatesse et un profond respect, en toile de fond à la romance impossible entre Meira et Félix.
Tout oppose Félix et Meira. Lui mène une vie sans responsabilité ni attache. Son seul souci, dilapider l’héritage familial. Elle est une jeune femme juive hassidique, mariée et mère d’un enfant, s’ennuyant dans sa communauté. Rien ne les destinait à se rencontrer, encore moins à tomber amoureux.
Une femme qui n’aime plus son mari et tombe amoureuse d’un autre homme. Un thème simple dont regorge le cinéma et pourtant pouvant être mis en scène de bien des manières. Construit de manière lente, provoquant parfois un certain ennui, FELIX ET MEIRA trouve sa beauté dans sa finesse. Si Félix (Martin Dubreuil) est particulièrement insouciant, voire enfantin, il comprend bien qu’avec Meira (Hadas Yaron) leurs rapports n’évolueront pas vite. Cette dernière qui a vécu toute sa vie au sein de sa communauté où les choses les plus simples lui sont interdites et inconnues (dessiner, écouter de la musique, danser) va braver ces coutumes, mais sans jamais subir l’insistance de Félix, qui se contente de recevoir ce que Meira veut bien lui offrir. Car au centre de l’histoire il y a surtout une remise en question, ou du moins une perte de foi, de la part de Meira qui ne se reconnaît plus dans sa pratique religieuse, n’éprouvant plus l’enthousiasme d’antan lors du shabbat et qui s’ennuie. Malgré l’amour qu’il lui porte, Shulem (Luzer Twersky), son mari, ne parvient pas à la comprendre et à communiquer avec elle. La rencontre de Félix n’a donc rien d’évident et le réalisateur met en scène leur relation avec une intelligente prudence. D’abord se parler, puis se regarder, enfin se toucher. Maxime Giroux suit l’évolution de leurs rapports en tournant autour de ces protagonistes, quitte à les filmer de dos, tout en les laissant vivre devant les yeux du spectateur. En suivant cette optique Giroux offre des séquences d’une grande beauté. Par exemple Meira, qui n’a pas le droit de regarder un autre homme que son mari, hésite dans un premier temps avec Félix. Le regard de la jeune femme vaque autour du visage de Félix avant de se fixer enfin sur ses yeux l’espace de quelques instants. La caméra capte chaque détails du visage sublime de son interprète, Hadas Yaon. L’actrice de 25 ans est une révélation et fait de Meira le point fort du film. Avec sa perruque plus que visible et pas le moindre maquillage, elle illumine le film par sa malice et sa beauté simple et naturel, dans un décors pour le moins terne.
”Hadas Yaon, actrice de 25 ans, est une révélation et fait de Meira le point fort du film.”
Avec Félix qui vient de perdre un père qu’il n’avait plus vu depuis dix ans, et Meira enfermée dans sa religion, l’ambiance générale est emplie d’une profonde tristesse. Il y a cette absence de couleur dans le décors qui fait presque de FELIX ET MEIRA un film en noir et blanc. Les nuances de gris et de bleu des bâtiments et du ciel se mêlent parfaitement à la blancheur de la neige et aux tenues sombres que portent les membres de la communauté juive hassidique. Les seules couleurs apparaîtront avec les dessins de Félix, élément déclencheur de l’intérêt de Meira pour ce dernier. Seulement là où le film trouve son véritable intérêt c’est dans son discours sur cette religion qu’il ne se permet pas de critiquer pleinement. Car malgré les interdits qu’il impose à Meira, son mari reste bon et humain. Shulem a conscience de l’état de sa femme mais reste impuissant. Sa confrontation avec Félix fait basculer le film dans un profond drame. Shulem, qui n’est jamais dénigré, fait alors de la peine. L’intelligence du réalisateur est d’en faire un personnage attachant, prêt à laisser Meira partir faire une grave erreur. Car oui, avec un final pour le moins mélancolique, et en atteste les excuses dites à sa fille, Meira regrettera son acte, comme payant le pris de sa liberté.
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• Titre original : Félix et Meira• Réalisation : Maxime Giroux
• Scénario : Maxime Giroux, Alexandre Laferrière
• Acteurs principaux : Hadas Yaron, Martin Dubreuil, Luzer Twersky
• Pays d’origine : Canada
• Sortie : 4 février 2015
• Durée : 1h45mn
• Distributeur : Urban Distribution
• Synopsis : Tout oppose Félix et Meira. Lui mène une vie sans responsabilité ni attache. Son seul souci, dilapider l’héritage familial. Elle est une jeune femme juive hassidique, mariée et mère d’un enfant, s’ennuyant dans sa communauté. Rien ne les destinait à se rencontrer, encore moins à tomber amoureux.
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