MADAME BOVARY
© Warner Bros Ent.

MADAME BOVARY, une nouvelle adaptation lisse et fade – Critique

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Muse des cinéastes, Madame Bovary n’en est pas à sa première adaptation. Alors quand un réalisateur s’attelle à une nouvelle interprétation, il prend forcément le risque d’être comparé au livre, aux précédents films et doit en plus apporter quelque chose de nouveau à cette célèbre histoire. Autant dire que ce n’est pas une mission facile !

Il est déjà assez compliqué de compresser l’œuvre de Flaubert en 2h et encore plus de choisir quels passages garder et quels passages écarter. Sophie Barthes dans cette version se concentre sur Emma et sa relation avec son mari, Charles. On découvre par touches successives la vie d’Emma au couvent, son mariage et le début de son installation en tant que femme mariée, ses aventures extra-conjugales puis ses frasques.

© 2015 Warner Bros Ent.
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« Montre ne dit pas » est une des premières règles de l’écriture. Barthes suit ici cette règle, évidente pour l’écran mais pas pour autant facile à respecter, à la lettre. Les émotions et les pensées d’Emma ne sont pas vocales, elles passent par le jeu d’acteur de Mia Wasikowska mais aussi par de longs plans fixes, un enchaînement d’images du quotidien et par le silence qui règne en maître. Emma, qui rêvait de sa vie maritale, est cruellement déçue par la réalité et par sa condition sociale, loin du luxe qu’elle s’imaginait. Elle tente d’entraîner son mari dans ses fantaisies mais ce dernier est perméable à tout romantisme et à toute fantaisie. Dans un premier temps, elle prendra son mal en patience et tentera de s’habituer à sa situation. Elle repousse les offres d’objets et d’étoffes somptueuses de monsieur Lheureux ainsi que les avances de Louis Dupuis, jeune clerc de notaire décrit comme « le dernier romantique de toute la France » en qui elle avait trouvé un compagnon d’esprit. C’est le départ de Louis suite à ce refus qui va la précipiter dans les bras du Marquis d’Andervilliers lorsqu’il lui fera à son tour des avances. Le contraste entre ce dernier, un homme riche, puissant et audacieux, et sa vie quotidienne, redevenue si monotone, la décidera à sauter le pas.

Une adaptation trop belle pour être crédible.

La scène de la chasse marque le tournant dans l’état d’esprit d’Emma. A l’écran, elle entame sa métamorphose. Auparavant pâle, effacée, habillée de couleurs sombres comme en deuil, la rencontre avec le marquis lui redonne vie. Elle se pare de tissus colorés, décore l’intérieur de sa maison, a le regard pétillant et le rouge aux joues. C’est à partir de ce moment que le film échoue à capturer l’essence d’Emma Bovary. Elle devient l’emblème des amoureuses éperdues alors que celle de Flaubert est celle des courtisanes libres de conventions sociales. Choisir de faire du marquis son amant, un homme inatteignable, nous fait accepter les comportements désinvoltes et indifférents de ce dernier. De la même façon, MADAME BOVARY ne parvient pas à retranscrire la province de Flaubert. Il en fait une toile romanesque, immaculée, un Disneyland d’époque. La caméra nous séduit et les costumes nous éblouissent mais ils trahissent l’histoire et élève Emma à un rang auquel elle ne peut pas prétendre et qui est pourtant la base de son mal. Quelle belle adaptation nous livre Sophie Barthes, trop belle pour être crédible à l’image de son interprétatrice, trop intelligente pour incarnée cette femme à l’esprit romanesque.

MADAME BOVARY
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Mia Wasikowska brille pourtant dans son rôle. Elle n’est pas étrangère des films d’époque – on pense à Jane Eyre – et son éternelle moue insatisfaite et son jeu sonnent justes. Le seul reproche qu’on peut lui faire est son intelligence qui ressort et qui décrédibilise son personnage. A côté, les hommes qui l’entourent ne sont pas marquants voire même pas crédibles.

La fin est un peu bâclée, les déboires s’enchaînent à une vitesse étourdissante. Un choix qui se justifie pour tenter d’expliquer la fin tragique montrée dès les premières secondes du film. Malheureusement les spectateurs étrangers à l’histoire pourront discerner des lacunes scénaristiques et douter du cheminement d’Emma. Ne pas évoquer la rencontre des deux époux avant leur mariage, par exemple, amène le public à percevoir leur relation sous un certain angle et à ne pas comprendre la dynamique qui s’instaure entre eux. L’atmosphère feutrée, la lenteur du rythme de narration et le montage inégal enlève à l’histoire la passion qu’elle raconte. Emma Bovary est toujours à la recherche de son adaptation parfaite.

Valérie Lassalle

Mise en scène
Scénario
Casting
Photographie
Musique
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2.3

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