Sebastian, jeune réalisateur passionné et son producteur arrivent dans le décor somptueux des montagnes boliviennes pour entamer le tournage d’un film. Les budgets de production sont serrés et Costa, le producteur, se félicite de pouvoir employer des comédiens et des figurants locaux à moindre coût. Mais bientôt le tournage est interrompu par la révolte menée par l’un des principaux figurants contre le pouvoir en place qui souhaite privatiser l’accès à l’eau courante. Costa et Sebastian se trouvent malgré eux emportés dans cette lutte pour la survie d’un peuple démuni. Ils devront choisir entre soutenir la cause de la population et la poursuite de leur propre entreprise sur laquelle ils ont tout misé. Ce combat pour la justice va bouleverser leur existence.
Note de l’Auteur
[rating:7/10]
• Date de sortie : 5 janvier 2011
• Réalisé par Icíar Bollaín
• Film français, mexicain, espagnol
• Avec Gael García Bernal, Luis Tosar, Carlos Aduviri
• Durée : 1h43min
• Titre original : También la lluvia
• Bande-Annonce :
[youtube]http://www.youtube.com/watch?v=xUX9-lZyZx8[/youtube]
Il n’est pas étonnant que Même La Pluie ouvre cette deuxième édition du Festival de Cinéma Européen des Arcs. Après avoir fait l’ouverture de la 55ème semaine Internationale de Cinéma de Valladolid et participer au festival de Toronto en 2010, Même La Pluie a été sélectionné par l’Espagne pour la course du meilleur film étranger aux Oscars. Le festival commence donc avec un film d’une grande qualité qui annonce une programmation de choix.
La narration particulière de Même La Pluie est parfaitement maitrisée : elle s’appuie sur de nombreux parallèles. Notamment celui qui permet la rencontre entre une Amérique latine du 16ème siècle, reconstituée par le tournage du film de Sebastiàn, et celle du 21ème siècle, entre feu et sang. Cette comparaison, la plus évidente, rend le film quelque peu prévisible. Une conséquence qui ne gâche pas pour autant le plaisir que le spectateur trouvera au travers de cette mise-en-scène magistralement orchestrée.
Une autre opposition enrichit davantage ce long-métrage : le duo Sebastiàn (le personnage-réalisateur joué par Gael García Bernal) et Costa (le personnage-producteur interprété par Luis Tosar). Les deux personnages, à leur façon, semble défendre la cause des amérindiens. Une illusion cependant car le premier, Sebastiàn, est davantage touché par l’idée du film, jusqu’à ne plus pouvoir s’en détacher. Tandis que l’autre, le producteur, est un personnage qui quitte son obsession du financement, au contact de la population bolivienne. Sans prendre précisément partie pour le combat des Boliviens, il sera prêt à sacrifier le film pour la vie d’une de ses actrices. Chaque personnage revêt un caractère complexe et leur rôle dans le film de Sébastiàn nourrit davantage cette ambiguïté.
Ce film est un bijou en matière de mise-en-scène, et réussit son but de maintenir à vif l’attention du spectateur.
Au delà de la portée historique et politique de ce film, un regard est posé sur le cinéma lui-même, puisqu’est intégré dans ce long-métrage le tournage même de Sebastiàn. Il ne s’agit bien évidemment pas d’un making-off : en réalité, nous ne voyons quasiment jamais de matériel technique servant au film. Il s’agit d’avantage des relations réalisateur-acteur et réalisateur-producteur qui sont ici dessinées. Pourtant au sein de ce long-métrage, la cadreuse démontre une volonté forte de filmer ce qui se passe autour. Ainsi, son making-of se mélange avec la partie contemporaine de Même La Pluie : elle pressent la portée historique que cette tension sociale est en train de créer. Un troisième film se réalise donc en quelque sorte sous nos yeux. Ce documentaire, dont nous ne voyons que quelques bribes en noir et blanc est justifié car cette « guerre de l’eau », mené par Oscar Olivera, ayant fait rage en Bolivie en 1999.
Un film qui pourrait se résumer par « Passionnant et totalement maitrisé ». Nous pourrions cependant regretter que tous ces niveaux de lecture empêchent une véritable empathie et marquent une certaine distance avec nos émotions.