• Réalisation : Juan Antonio Bayona
• Acteurs principaux : Lewis MacDougall, Sigourney Weaver, Felicity Jones
• Durée : 1h48min
Adapté du roman éponyme de Patrick Ness (également au scénario), QUELQUES MINUTES APRÈS MINUIT (A Monster Calls) raconte l’histoire de Conor O’Malley (Lewis MacDougall), un jeune garçon qui doit faire face à la grave maladie de sa mère. On devine assez vite la finalité, mais Conor ne peut accepter la réalité et le mal-être terrible que la situation provoque en lui. Le soir, quelques minutes après minuit, il imagine la venue d’un géant qui lui racontera trois histoires, trois soirs durant. Le quatrième soir, Conor devra raconter sa propre histoire, et accepter la vérité.
Après L’Orphelinat et The Impossible, le cinéaste espagnol Juan Antonio Bayona continue d’observer les rapports entre l’enfant et l’adulte. Une thématique qui relie ses films, dans des styles pourtant très différents – le film fantastique d’épouvante pour L’Orphelinat, le film catastrophe pour The Impossible et enfin le drame fantastique pour QUELQUES MINUTES APRÈS MINUIT. Ainsi, si Bayona ne se révèle pas en metteur en scène virtuose, c’est dans sa maîtrise du récit et de son sujet qu’il est à considérer comme un réalisateur talentueux. QUELQUES MINUTES APRÈS MINUIT en est l’exemple le plus parlant.
Pas besoin d’y aller par quatre chemins, QUELQUES MINUTES APRÈS MINUIT est d’une émotion pure et magnifique. Comment ne pas être touché par cet amour et cette complicité entre une mère et son fils ? Et par la tragédie liée à la maladie qui gangrène leur relation ? On se souvient de Luigi Comencini qui avec L’Incompris réalisait un sublime mélodrame sur l’après – il s’agissait du deuil d’un jeune garçon suite au décès brutal de sa mère. On retrouve ici les mêmes sentiments, sauf que la mort n’est pas encore là, mais elle reste inévitable. Et Conor (comme le spectateur) le sait. Pas question pour autant de faire tomber le film dans quelque chose de larmoyant. Bayona restant particulièrement pudique dans son traitement des personnages. Chacun étant fort bien (d)écrit, doté d’une psychologie parfaitement réfléchie, qui les rend tous terriblement humains.
En Conor, on comprend son renfermement et comment une forme de culpabilité se développe en lui tant l’état de sa mère devient difficile à vivre. Le voilà donc à un premier niveau délaissé par l’adulte. Un schéma reproduit avec son père, venu le voir des Etats-Unis, où il vit avec sa nouvelle famille. Bien qu’il refuse d’accueillir son fils chez lui, le père (Toby Kebbell) n’en devient pas pour autant antipathique. De même que la grand-mère (Sigourney Weaver) qui derrière son air autoritaire et froid, s’avoue simplement désemparée par la situation et tout aussi déchirée à l’idée de perdre sa fille.
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QUELQUES MINUTES APRÈS MINUIT évite ainsi d’accabler le monde adulte en montrant que leurs erreurs de jugement sont humaines. A l’image de la mère (Felicity Jones) qui est bien incapable d’admettre devant son fils que la maladie l’emportera bientôt. Par sa volonté de le protéger, par le mensonge, elle produit à l’inverse un rejet de la part de Conor, et le fameux mal-être qui l’éprouve – qui s’exprime par une envie d’être puni. Cet adulte qui fait défaut, rappelle d’ailleurs un certain Guillermo del Toro (avec L’Echine du diable et Le Labyrinthe de Pan notamment), qui avait produit le premier long-métrage de Bayona, L’Orphelinat.
Une sensibilité commune qu’on retrouve par l’intervention du fantastique dans le réel et l’esprit d’un enfant. Le géant, sorte d’arbre immense qui s’extirpe de la terre, et ses histoires, permettant à Conor de comprendre les réactions de ceux qui l’entourent et ses propres émotions et pensées qui le font culpabiliser. Bien que ces séquences d’animations qui illustrent les contes d’horreur du géant soient d’une grande beauté visuelle, on ne peut que regretter qu’elles s’étendent trop dans la longueur. Bayona perdant ainsi le rythme de son film, seul véritable défaut qu’il faut admettre.
Mais omis ce détail, QUELQUES MINUTES APRÈS MINUIT reste une réussite en tout point. D’une beauté aussi bien à l’image (comme l’esthétique du géant) que par le récit. Tout de même, il est vrai que ce dernier prévaut sur la réalisation générale. En effet, Bayona reste sobre avec sa caméra, comme s’il se mettait en retrait dans le but de laisser au récit la liberté de s’exprimer seul. Il reviendrait alors avant tout à l’auteur Patrick Ness de recevoir ces louanges. Néanmoins, l’illustration que fait Bayona de cette histoire, en toute simplicité et pureté, rend l’œuvre filmique d’autant plus appréciable. Ne serait-ce que par son choix et sa direction excellente des interprètes. Principalement le jeune Lewis MacDougall, belle révélation, ainsi que Felicity Jones qui confirme son statut d’actrice à la grande sensibilité – une sensibilité notable par exemple dans A la folie (2011) de Drake Doremus. La réunion des deux interprètes dans un sublime plan de fin, qui porte l’émotion au plus haut, conclut QUELQUES MINUTES APRÈS MINUIT dans une joyeuse tristesse qui émerveille en toute simplicité.
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