Christophe est un jeune jockey parisien pétri d’ambition et d’illusions. Mis à pied après avoir été contrôlé positif à l’issue d’une course, il choisit de s’expatrier en Asie, à Macao. Rapidement, son statut change. Les victoires en course se succèdent, lui amenant argent facile et conquêtes féminines. Mais Macao a ses règles, auxquelles Christophe pense pouvoir déroger. Les événements vont se précipiter alors que l’étau se resserre autour du jeune jockey. Poussé par l’amour d’une jeune femme chinoise moderne, distante mais obsédante, Christophe va finalement remettre son destin en jeu, mais cette fois sur le tapis vert.
Note de l’Auteur
[rating:4/10]
• Date de sortie : 12 janvier 2011
• Réalisé par Charles de Meaux
• Film français
• Avec Nicolas Cazalé, Fan Bing Bing, Nicolas Duvauchelle, Pete Teo, Lowell Lo, David Carradine
• Durée : 1h30min
• Titre original : Stretch
• Bande-Annonce :
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Il y a des personnages-types qui ont traversé l’histoire du cinéma : le flic, le mafieux, le boxeur, le cowboy, le soldat… Le public en raffole, et les scénaristes ne se lassent pas de les utiliser, encore et encore. On les connaît bien, et on ne s’en lasse pas : le temps passe et ils restent toujours aussi cools, véhiculant tout un tas de valeurs qui leurs sont propres, auxquelles on est habitués et dans lesquelles on se reconnaît. Et puis, gosse ou adulte, on a tous un jour ou l’autre rêvé d’être l’un d’entre eux, non ? Dans Stretch, le personnage principal est un jockey. Ca se passe de commentaire, vu qu’à part Omar Sharif et quelques autres fétichistes glauques, peu de gens bandent devant un cheval. C’est pourtant le cas de Charles de Meaux, ancien jockey qui, une fois devenu réalisateur, a tout naturellement décidé de faire un film noir dans le milieu de la course hippique.
Stretch a bénéficié d’une sordide publicité : c’est pendant son tournage que David Carradine, l’étalon autoérotique, est décédé. L’argument marketing est d’autant plus délicat que Carradine n’apparaît que dans 2 scènes, pour un temps total de moins de 5 minutes. Dur de jouer là-dessus donc, au risque de décevoir les spectateurs. On accordera d’ailleurs une mention spéciale au réalisateur pour son manque de tact absolu lorsque, dans la scène d’exposition, une voix off à la radio annonce le décès de l’acteur ; en termes de mauvais goût et d’indélicatesse, ça se pose là. Mais passons.
Stretch, c’est donc une sorte de film noir avec des chevaux et des chinois dans lequel Christophe, un jeune jockey en mal de popularité, part en exil plus ou moins volontaire pour Macao. Comme il monte bien, il devient rapidement une star locale, et obtient ce dont il a toujours rêvé : la reconnaissance, la thune, les filles. Le bonhomme est aussi doué qu’il est candide, alors il tombe de haut quand il découvre que le cheval n’est pas seulement une grande passion, mais aussi un business où la morale n’a pas sa place. Tout de suite, dès qu’on saupoudre une pincée de mafia sur le sable de l’hippodrome, ça a l’air plus intéressant, non ? Sauf que ça ne l’est pas : pendant presque tout le film, Charles de Meaux reste collé à sa tête à claques de personnage principal trop innocent pour être crédible et trop con pour être attachant, tandis que tout ce qui tourne autour de lui nous paraît mille fois plus alléchant que ses petits soucis personnels.
Les vraies stars de Stretch, en fait, ce sont ses seconds rôles asiatiques. Le joueur invétéré au rictus jovial et empoisonné interprété par Lowell Lo accapare toute l’attention à chacune de ses apparitions, à un point tel que Nicolas Cazalé, qui tient pourtant le premier rôle, se retrouve systématique propulsé au second plan à chaque scène qu’ils partagent. Que dire alors de Pete Teo, le vrai-faux ami en costard aux airs mystérieux ? Même sans qu’il ait besoin de parer, son charisme tranquille pulvérise sans effort la franchouille-attitude du premier rôle, dont on n’a alors plus rien à foutre. Si Cazalé ne sait pas trop quoi faire de son personnage, le premier rôle féminin, Fan Bing Bing, a tout compris aux subtilités du métier d’acteur. Par son regard, sa gestuelle, ses attitudes, elle parvient d’une manière inexplicable à faire sonner ses répliques de merdes (« les pandas ne font l’amour qu’une fois par an ») comme des sentences mystiques, et réussit la gageure de nous faire gober que son personnage est subtil et profond alors qu’il est à peine écrit… classe. Dommage qu’aucun des ces trois-là ne soit le personnage principal.
Mais le meilleur second rôle, et de loin, c’est la ville de Macao en elle-même. Accompagnés de la BO planante de Devendra Banhart, les plans de l’architecture futuriste de la ville, de ses côtes, de ses statues ou de ses ruelles crades éclairées au néon en font le terrain de jeu rêvé pour un bon neo-noir bien tendu à tendance psychédélique. On a l’impression que tout peut s’y produire, que c’est une zone de non-droit absolu peuplée de types magnétiques et inquiétants aux intentions impénétrables et aux regards énigmatiques, qu’elle attend à tout instant de refermer ses mâchoires impitoyables sur le premier qui montrera un signe de faiblesse. Un coin fascinant auquel le réalisateur n’a, une fois encore, pas laissé assez de place.
Le grand drame de Stretch, c’est que Charles de Meaux avait les bonnes cartes en main, mais qu’il ne les a pas jouées correctement. Il s’était trouvé un putain de lieu de tournage et des putains d’acteurs (Carradine et les autres seconds rôles), mais quelque chose a merdé en cours de route. Il a filé le rôle principal à un Nicolas Cazalé fadasse et a centré le film sur son blues à deux balles, ses cas de conscience miteux et un retournement de situation mal foutu au lieu d’exploiter le potentiel qui s’offrait à lui : David Carradine et des mafieux bridés. Une erreur de calcul, qui, ajoutée à une romance complètement niaise et à une fin pitoyablement bidon, achèvent de plomber ce qui aurait pu être un bon film mais qui n’est finalement qu’une anecdote soporifique.