Flynn, un concepteur de jeux vidéos qui s’est vu voler ses jeux vidéos par son ex-employeur, veut à tout prix récupérer une preuve qui lui ferait valoir ses droits. Avec l’aide d’Alan et de Lora, deux de ses anciens collègues, il infiltre le MCP (Maître Contrôleur Principal), un ordinateur avide de pouvoir à l’intelligence artificielle surdévelopée. Quand ce dernier découvre que Flynn veut s’infiltrer dans ses circuits, il le téléporte dans un jeu vidéo. Pour s’évader, Flynn devra compter sur l’aide de Tron, un programme indépendant inventé par Alan.
Note de l’Auteur
[rating:4/10]
• Date de sortie : 8 décembre 1982
• Réalisé par Steven Lisberger
• Film américain
• Avec Jeff Bridges, David Warner, Bruce Boxleitner, Cindy Morgan, Barnard Hughes
• Durée : 1h36min
• Titre original : Tron
• Bande-Annonce :
[youtube]http://www.youtube.com/watch?v=k5TdLrtYoVU[/youtube]
Les ordinateurs ont quelque chose de terriblement flippant. Ils sont plus intelligents que nous, connaissent tous nos secrets, et nous sommes arrivés à être dépendants d’eux, tandis que la réciproque n’est pas vraie. On trouvera toujours des petits malins pour dire que leur vie n’en serait pas affectée s’ils se débarrassaient de leur PC, mais il suffit de réfléchir deux secondes à la question pour se dire que cette peur, cette suspicion, n’est pas infondée. Le plus flippant, et de loin, c’est qu’à moins d’être ingénieur, le fonctionnement exact des systèmes informatiques échappe complètement au clampin lambda ; savoir ce qu’il y a dans la « tête » d’un ordinateur prend alors la forme d’un questionnement mystique d’un genre nouveau, formulation des cauchemars d’un savant craignant d’être bouffé par sa créature.
Shirow Masamune s’est penché sur le sujet, et il en a fait Ghost In The Shell ; Ryutaro Nakamura en a fait le troublant Serial Experiments Lain et, bien sûr, les Frères Wachowski en ont fait Matrix… des œuvres matures, aux thématiques fortes.
Longtemps avant eux, cependant, les studios Disney s’étaient aussi intéressés au sujet, en produisant Tron, pour le meilleur et pour le pire. Surtout pour le pire, en fait : aujourd’hui, il n’y a que les geeks entre trente et quarante ans, qui ont réellement vécu l’arrivée de l’informatique mainstream et son évolution-éclair, pour dire que c’est un film culte. Tous les autres le trouvent juste ridicule, kitsch, ou pathétique. Quand ils n’en ont pas tout simplement jamais entendu parler.
La désuétude dans laquelle il est tombé s’explique de plusieurs manières, mais la plus évidente, c’est qu’il est bien trop ancré dans son époque pour survivre à l’épreuve du temps. En 1982, Windows en est à ses premiers balbutiements, l’usage des ordinateurs est un truc assez pointu, et on s’émerveille encore qu’une machine puisse jouer aux échecs. Tout semble alors possible, et pourtant on regarde aujourd’hui la technologie de pointe de l’époque avec un petit sourire condescendant ; il devient alors relativement difficile de se sentir impliqué dans l’intrigue de Tron, car rien ne vieillit plus vite que la SF.
D’autant qu’une production Disney, c’est forcément un truc gentillet et bon enfant : impossible de donner dans le trop sombre, le trop psychologique, le trop intelligent… il faut aussi de ce genre de film, parce qu’il faut de tout, mais pas sûr que l’univers de la technologie et de ses potentialités y soit forcément approprié. D’autant que pour tenter d’offrir un univers visuel à l’intérieur du cerveau informatique dans lequel se déroule le film, le réalisateur Steven Lisberger a pris le parti de se lancer dans un trip à la Il Etait Une Fois… La Vie, cette série animée de notre enfance dans laquelle nos cellules, nos globules rouges et tous les composants de notre corps étaient représentés par des petits bonhommes sympathiques.
Dans Tron, donc, lorsque Kevin Flynn (Jeff Bridges) se fait digitaliser et se retrouve propulsé dans le monde des machines, il découvre un univers lisse et lumineux, où les programmes informatiques sont comme des humains intelligents, sensibles, doués d’émotions et capables de raisonner, bien qu’incapables de se rendre compte qu’ils sont ridicules dans leurs combinaisons en néon. Le système informatique dans lequel il se retrouve est régi par un maître tyrannique, le Master Control Program, sorte de cyber-dictateur très méchant. Heureusement, notre héros, tel l’Élu, va libérer tout ce petit monde, qui passera alors du rouge au bleu, pour bien qu’on comprenne. Pour accomplir sa cyber-sainte mission, il sera aidé de Tron, un programme rebelle tellement insignifiant qu’on se demande pourquoi le film porte son nom, et d’une fille qui ne sert à rien, mais qui a le mérite d’être là, ne serait-ce que parce qu’il faut toujours une fille.
Dans l’épilogue, expédié en moins de 5 minutes, Flynn a bien entendu retrouvé tout ce qu’il avait perdu, les méchants ont été punis et le système informatique connaît enfin la paix.
Mine de rien, Tron pose des vraies questions de cinéma. Un film dont le sujet est la technologie a-t-il encore un intérêt une fois que celle-ci est dépassée ? Un film dédié au jeune public a-t-il forcément un scénario de merde ? Où se trouve la limite entre vulgarisation respectueuse et simplification honteuse ? Matez-le, réfléchissez-y, et vous pourrez vous lancer dans des grands débats entre cinéphiles.
Quand il est sorti, Tron était une friandise sucrée qu’on regardait avec émerveillement. Les lumières paraissaient belles, l’esthétique novatrice et futuriste, les effets spéciaux déments. Dommage pour lui, sa date de péremption est dépassée depuis pas mal de temps. Disney, qui ne perd jamais espoir, est en train de produire un reboot (Tron : L’Héritage) qui, s’il est fidèle à son modèle, nous éblouira visuellement en 2011 et nous fera marrer quelques années plus tard. Affaire à suivre.