En compétition à Cannes. La descente aux enfers d’une jeune mère, en pleine dépression post-partum. Lynne Ramsay filme une succession de scènes de vie où se manifestent les pensées sordides de la jeune femme. Un scénario bien pauvre, faisant office d’écrin pour la performance magistrale de Jennifer Lawrence.
« Jennifer Lawrence aura le prix d’interprétation. » C’est à peu près la seule certitude à l’issue de la projection de DIE, MY LOVE, présenté en compétition à Cannes. Et l’unique élément sur lequel les festivaliers s’accordent.
L’actrice y interprète Gracie, une jeune femme qui vient d’accoucher. De prime abord, tout va pour le mieux. Elle et son compagnon (Robert Pattinson) vivent dans une jolie maison en forêt, le bébé se porte bien… Alors pourquoi ne parvient-elle pas à être heureuse ?
Pensées intrusives
Elle-même ne comprend son mal-être. Dans sa tête, les pensées intrusives se bousculent. Un imaginaire foisonnant, pas toujours commode, où se mêlent désirs, agacements… et pulsions meurtrières. Des idées parfois mises à exécution, permettant à Jennifer Lawrence de déployer une impressionnante palette de jeu. Masturbation, violence… Oui, il est fort probable que l’actrice fasse partie du palmarès de cette 78ᵉ édition du Festival de Cannes.
Une expérience particulièrement éprouvante pour Jennifer Lawrence, elle-même mère de jeunes enfants. « J’avais du mal à séparer mes propres réactions de maman à celles de mon personnage », a-t-elle avoué au cours de la conférence de presse.
Rêve ou réalité ?
Prostrée chez elle, Gracie se contente de rêver sa vie. Ce beau motard qui passe régulièrement devant leur maison, ne ferait-il pas un superbe amant ? Le fantasme s’accomplit… ou pas ! Car le personnage de LaKeith Stanfield, simple père de famille, semble n’être qu’une projection de ses désirs.
Le doute se manifeste à plusieurs reprises pendant la séance. Lynne Ramsay nous amène dans les pensées les plus sombres de son héroïne, sans toutefois nous indiquer ce qui relève du réel ou non. De quoi générer de la confusion.
Il faut dire que Gracie, plutôt pudique sur ses sentiments, n’aide pas vraiment. Si son compagnon est dépassé en la voyant perdre la boule, le public peine aussi à comprendre ce qui lui arrive. Face à si peu d’expressivité, il devra se contenter de la voir se caresser la vulve ou se déshabiller dans une pièce remplie d’enfants… et tenter de saisir cette personnalité nébuleuse. Un choix étonnant, qui passe presque exclusivement par l’image. Surtout quand l’on sait que le roman d’Ariana Harwicz, « Crève, mon amour », dont il est adapté, prend la forme d’un monologue intérieur.
Enfermer le spectateur
DIE, MY LOVE est un huis-clos. Ou presque. En tout cas, pour Gracie, cette maison est synonyme d’enfermement. Lynne Ramsay traduit cette oppression de manière viscérale, à travers le format 4:3 qui resserre le cadre.
Cette sensation étouffante se retrouve aussi dans le mixage sonore, où les bruits du quotidien sont amplifiés – les mouches qui bourdonnent dans la cuisine, par exemple. Une approche immersive, qui ne suffit pas à compenser l’ennui profond qui s’installe tout au long du film.
DIE, MY LOVE se résume à une succession de scènes de vie – ou plutôt de crises – au rythme lent qui lasse. Un scénario minimaliste, surtout prétexte à dévoiler la performance magistrale de Jennifer Lawrence.
Lisa FAROU