L’histoire est belle car elle est réelle. Si la musique adoucit les mœurs, DIVERTIMENTO apaisera votre cœur. Le septième long-métrage de la réalisatrice Marie-Castille Mention-Schaar est un véritable plaisir à la fois auditif et social, loin de la soupe habituel servie par des œuvres clichées et caricaturales. DIVERTIMENTO nous prouve que la musique rassemble, bien au-delà des origines, des convictions, des valeurs.
La vie de Zahia Ziouani, 17 ans qui rêve de devenir cheffe d’orchestre. Le boléro de Maurice Ravel aura raison d’elle, sa voie était tracée. Femme algérienne vivant en Seine-Saint-Denis, Zahia veut sortir la musique classique de l’élitisme qu’elle incarne afin de la rendre accessible à tous. Un pari ambitieux, difficile, mais sûrement pas insurmontable pour cette femme qui peut compter sur le soutien indéfectible de sa famille, notamment sa sœur Fettouma, violoncelliste professionnelle. Plusieurs fois en phase à une certaine désillusion, notamment face à son un directeur d’École qui lui rappelle qu’une femme ne peut pas être cheffe d’orchestre, Zahia prendra le taureau par les cornes, en prouvant ce dont elle est capable face à son maître depuis toujours, Sergiu Celibidache. Soutien et détermination lui permettront de créer son propre orchestre, Divertimento.
DIVERTIMENTO réussit à ne pas rentrer dans les facilités de certains de ces prédécesseurs, comme Ténor de Claude Zidi Jr. Où la caricature dénature le propos. Le film réussi à montrer une réalité sans dériver vers un clivage facile et populaire. Certes, la confrontation entre classe aisée et populaire existe, et il ne faut pas l’oublier, mais elle est ici très justement pointée du doigt, sans en faire des tonnes. On comprend les enjeux qui se dénoueront subtilement pour laisser place à ce qui rassemble tous ces individus, la musique.
Bercé pendant presque deux heures au violon, au piano, une douceur auditive s’installe et prend de l’ampleur au fur et à mesure de l’histoire. On est rythmé par les répétitions des étudiants, la démonstration du maestro Sergiu Celibidache (brillamment interprété par Niels Arestrup) et la rage d’une femme prête à tout pour prouver au monde sa légitimité. Et c’est là toute la force du film, aller au-delà des différences et rassembler par un biais commun. On ressent l’évolution de Zahia au travers des épreuves qu’elle affronte. Les moqueries de ces camarades, la difficulté de se faire une place dans un milieu « d’hommes », un milieu élitiste, traditionnel et masculin. Cette force de caractère émane de la prestation d’Oulaya Amamra, qui avait déjà brillé dans Divines, film pour lequel elle a reçu le césar du meilleur espoir féminin en 2017. Une performance intéressante tant l’actrice arrive à jongler entre les émotions, passant de l’espoir à la désillusion en un instant. Les doutes subsistent, et Sergiu Celibidache, son mentor, est là pour le lui rappeler. Rien n’est jamais acquis, on n’arrive jamais au bout. Niels Arestrup n’a plus rien à prouver, sa prestance naturelle et sa voix imposante font que son rôle de chef d’orchestre exigeant lui va à merveille.
« Je pense que tout est possible à qui rêve, ose, travaille et n’abandonne jamais » disait Xavier Dolan à l’occasion du 67e Festival de Cannes, lors de la remise du prix du jury pour son cinquième film Mommy. Cette phrase résume assez bien l’ambition de DIVERTIMENTO et de la véritable histoire raconté par Zahia Ziouani, désormais cheffe d’orchestre reconnue, briser les codes sociaux et prouver au monde que l’on est capable de tout.
Si les thématiques sociales et raciales dans le cinéma français ont souvent tendance à diviser plus qu’à rassembler, ce n’est pas le cas de DIVERTIMENTO, qui, au-delà de l’aspect humain, nous propose une douce poésie musicale où tout le monde est le bienvenu.
Amaury Dumontet
• Réalisation : Marie-Castille Mention-Schaar
• Scénario : Marie-Castille Mention-Schaar, Clara Bourreau
• Acteurs principaux : Oulaya Amamra, Lina El Arabi, Niels Arestrup
• Date de sortie : 25 janvier 2023
• Durée : 1h50min