Photo du film EQUALIZER 3
Crédits : CTMG, Inc.

EQUALIZER 3, se battre pour ses vieux jours – Critique

Le 30 août 2023, les murs tremblent au raisonnement des pas de celui à qui il ne fallait vraiment pas faire chier. Denzel Washington revient, une fois encore, nous montrer qu’à 68 ans, il peut toujours casser des bouches et ce avec le sourire, en retrouvant son personnage de Robert McCall. Les cœurs s’affolent alors pour cette dernière aventure, cet ultime combat livré contre l’obsolescence. Alors, que vaut cette retraite forcée ?

Que l’on apprécie ou non le travail du réalisateur Antoine Fuqua, force est de constater qu’il a pu, au fil de sa carrière, s’imposer dans le cinéma d’action américain en y occupant une place de choix, lui permettant un entourage optimal. Il est évident que son plus haut fait d’armes remonte maintenant à plusieurs années avec Training Day et qu’il tente aujourd’hui encore de proposer une œuvre de ce calibre, sans jamais vraiment y parvenir. En effet, s’il ne s’occupe pas de films véritablement honteux (Infinite), ces dernières années, Fuqua s’est vu se cantonner à la réalisation de remakes, bien que sympathiques, au demeurant, mais dont l’utilité reste encore à prouver. Même son Emancipation, qui devait signer son grand retour, a vite sombré dans l’oubli.

Et c’est dans ce contexte que sort EQUALIZER 3. Un projet bien plus simple, en théorie. S’agissant d’une suite de films s’étant déjà faite une place dans le cinéma d’action, il suffisait de peu pour convaincre le public de se déplacer. Et cela s’est fait remarqué, le film s’étant offert la tête du box-office français. Et pourtant des films de ce genre, on en ramasse à la pelle chaque année : un héros mystérieux, au passé trouble, arrive dans une ville de gentils, pour s’occuper des méchants très très méchants afin de les sauver. À peine caricaturé. Voilà, ce n’est ni son histoire qui va nous intriguer, ni même ses personnages secondaires.

Photo du film EQUALIZER 3
Crédits : CTMG, Inc.

En effet, chacun remplit une fonction particulière sans témoigner d’une quelconque profondeur. Les antagonistes ne reposent que sur une succession de clichés et les alliés ne sont là que pour être sauvés ou apportés des dialogues inintéressants qui alourdissent le récit. Mais la plus grande déception du film, est accordée à Dakota Fanning. En effet, le clin d’œil à Man on Fire est aussi subtil que le dernier volet de cette trilogie, mais reste néanmoins intéressant. Sauf que là où l’on pouvait s’attendre à une certaine importance accordée à ce personnage, Fuqua n’en fait rien, préfère la délaisser au second plan. Il est plaisant de la retrouver auprès de la star du film, on y distingue une alchimie, mais ce personnage, s’il ne répète pas les informations de McCall, ne sert pas à grand-chose, ce qui est tout à fait regrettable.

Parce qu’il ne faudrait pas oublier qui occupe l’affiche du film. Monsieur Denzel Washington. Acteur apprécié, récompensé et désiré, il nous offre ce qu’il a de mieux : son charisme légendaire ainsi que sa petite moue toute tremblante. L’acteur porte le film à bout de bras et livre une belle prestation pour ses adieux au personnage. Un personnage intéressant qui témoigne d’une sympathie sincère envers ce petit paradis perdu en Sicile et ses habitants. Un personnage capable d’exercer sur vous sa violence la plus crue, en vous regardant droit dans les yeux, le sourire aux lèvres ou avec le plus grand des dédains, au choix. Le film va d’ailleurs se permettre un temps de réflexion pour questionner cette violence avec un (trop) court passage en vue subjective, afin de revivre une scène d’action en adoptant le point de vue de McCall. Mais finalement, si l’on peut penser, à juste titre, que ce personnage est en recherche de violence, ici c’est le calme qu’il convoite. En effet, Robert McCall, tout comme Denzel Washington, commence à se faire vieux. Il y a d’ailleurs une analogie, assez intéressante entre le fusil et la canne, mis en relation grâce à des tapotements contre le sol qu’il va répéter dans le film.

Photo du film EQUALIZER 3
Crédits : CTMG, Inc.

Mais heureusement, les scènes d’actions sont assez bien pensés pour permettre au personnage et à l’acteur de ne pas exposer leur propre vieillesse aux spectateurs. Si l’on retrouve évidemment, LA « scène type » d’un Equalizer avec un McCall, chrono en main, qui se veut performeur, l’action très découpée de ces films va se transformer. Certes, il faut jouer avec la condition physique de l’acteur, mais la proposition n’en demeure pas moins intéressante. McCall nous est ici représenté comme un fantôme. La première séquence du film en est la porte-parole, puisqu’il nous est présenté l’après du combat. Les corps sont déjà tombés et le sang s’est déjà répandu et McCall, assis, en figure royale attend de nouvelles victimes. La fin du film en est toute aussi éloquente en proposant, à l’aide du directeur de la photographie, Robert Richardson, un espace sombre, à la limite du film d’épouvante avec des miroirs, des jeux d’ombre et une menace invisible, pour mettre en lumière cet aspect fantomatique du personnage : il est partout, tout le temps au bon endroit, au bon moment, là où l’on ne s’y attend pas. Moins spectaculaire que d’habitude, Antoine Fuqua nous construit une action implacable et sanglante.

Non, le dernier film de Fuqua ne tire pas vers l’originalité mais, oui, il réussit tant bien que mal à faire mouche, en empruntant un chemin déjà balisé depuis des décennies. Le film se trouve être plutôt manichéen dans son ensemble, en tombant parfois dans une pure niaiserie, malgré le personnage interprété par le charisme de Denzel Washington, qui apporte au moins un peu de nuance. De plus, le rythme du film, tout comme les victimes de McCall, se retrouve bien amoché : il est clairement évident de constater ce qui intéresse le réalisateur et ce qu’il se force à filmer. Ce n’est, certes, pas le film du siècle, certainement pas, il n’a pas vocation à l’être, mais il a au moins le mérite de proposer un divertissement, un personnage, un acteur qui sauront vous accrocher durant 1h49. Un bon film d’Antoine Fuqua, en attendant son prochain long-métrage, qui semble bien plus ambitieux : Michael

Jérémy FERET

Cet article a été publié suite à une contribution d’un·e rédacteur·rice invité·e.
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