Photo du film LA TOUR
Crédits : Wild Bunch

LA TOUR, apocalypse miserabilis – Critique

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Un soir, les habitants d’une tour HLM se découvrent enfermés dans leur immeuble… En effet, un inquiétant trou noir englobe leur habitation et aspire quiconque tente de le franchir. Avec ce concept fantastique fort, Guillaume Nicloux s’essaye au thriller horrifique. Non sans peine.

Artiste versatile, le réalisateur Guillaume Nicloux est également auteur d’œuvres littéraires, ainsi que sporadiquement, acteur. Sa filmographie témoigne d’une grande pluralité et il aura notamment signé la comédie policière Le Poulpe en 1998, le thriller fantastique Le Concile de pierre en 2006, le film de guerre Les confins du monde en 2018, mais aussi – et plus étonnement – la série documentaire Les Rois de l’arnaque, sortie en 2021 sur Netflix. Avec LA TOUR, Nicloux explore à présent le thriller horrifique. Malheureusement, si le film se révèle assez excitant, il n’en demeure pas pour autant une réussite.

Photo du film LA TOUR
Crédits : Wild Bunch

LA TOUR repose sur un concept fort. Or, si l’idée n’est pas mauvaise, elle s’avère assez mal exploitée. Visuellement, l’opaque matière noire qui entoure l’immeuble demeure oppressante et terrifiante. La photo, sépia et crasseuse, vient renforcer cette sensation. De même pour la mise en scène, qui tend à filmer les murs autour des personnages comme des barrières infranchissables les surplombant. La dégénérescence physique des acteurs au fil des ans caractérise un peu plus la violence de ce milieu, le manque de lumière, la famine… Du reste, trancher les membres qui traversent l’épais voile noir constitue une trouvaille brillante. Dommage qu’elle soit, elle aussi, sous-exploitée.

Un concept brillant, mais mal mené

Sous-exploitée, car le principal problème du film de Nicloux est le manque de place dont il dispose pour laisser s’exprimer tous ses enjeux. En 90 minutes, il soulève de multiples intrigues, mais les laisse mourir sur pieds. Aucune n’est suffisamment développée pour créer un quelconque rebondissement. Le long-métrage en devient confus et superficiel, donnant l’impression de tirer en longueur, sans jamais n’aller nulle part. Toutefois, on pourrait s’interroger sur le fait qu’il s’agirait peut-être d’une réelle intention de réalisation. Le film sous-entendrait dès lors que l’humain a beau s’agiter pour survivre, il n’en reste pas moins soumis à sa condition de simple mortel et toutes ses actions n’y changent rien. Elles en deviennent même inconsistantes et vaines.

Photo du film LA TOUR
Crédits : Wild Bunch

Malheureusement, même de ce point de vue somme toute légitime, LA TOUR souffre bel et bien d’innombrables faiblesses d’écriture. D’une part, sans spécifier réellement les méthodes de survie employées pour se nourrir, la suspension d’incrédulité relève presque de l’impossible. Il est, en effet, risible de croire qu’un quelconque végétal puisse pousser dans le noir complet. De même pour l’élevage d’animaux de compagnie : comment nourrir une femelle pleine, sans pouvoir se nourrir soi-même ? D’autre part, le film fait le choix de placer son intrigue dans une banlieue pauvre. En résulte un propos misérabiliste, qu’on ose croire involontaire, au regard de la filmographie de son auteur.

Effort notable

Or, c’est douloureusement là que le bât blesse. En effet, à trop vouloir verser dans le pan métaphorico-sociétal du cinéma de genre français, LA TOUR en oublie sa dimension fantastique et se plante dans les grandes largeurs. Dommage, car lorsque le film s’y intéresse, la terreur et l’angoisse s’avèrent bel et bien présentes. Il est même fort possible que l’on conserve les quelques qualités de LA TOUR enfouies quelque part au fond de notre mémoire, tant son concept fort et son atmosphère anxiogène en font un véritable Ovni au sein du système de production cinématographique français.

Photo du film LA TOUR
Crédits : Wild Bunch

Peut-être que le film ne bénéficie simplement pas de la bonne forme. Il aurait gagné à être développé sous forme de série pour limiter les flashforwards et offrir ainsi davantage d’espace aux multiples sous-intrigues qu’il effleure à peine. Ou peut-être aurait-il mérité de devenir un court-métrage, en épurant son scénario et en supprimant quelques personnages, dont la trajectoire paraît bien accessoire à l’intrigue principale. Quoi qu’il en soit, après visionnage, LA TOUR laisse un goût mi-doux mi-amer, car il en émane un tel potentiel que sa chute en devient frustrante et triste… Dommage, et malencontreusement irrattrapable.

Lily Nelson

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Titre original : La Tour
Réalisation : Guillaume Nicloux
Scénario : Guillaume Nicloux
Acteurs principaux : Angèle Mac, Hatik, Ahmed Abdel Laoui
Date de sortie : 8 février 2023
Durée : 1h29min
1.5
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