Comme tout best-seller international qui se respecte, le roman LA VOLEUSE DE LIVRES connaît désormais son adaptation cinématographique. Signé de la plume de l’auteur australien Markus Zusak, c’est le britannique Brian Percival qui est aux commandes de cette version filmée, un réalisateur surtout connu pour son travail sur des séries télévisées telles que NORTH AND SOUTH avec Richard Armitage (LE HOBBIT) et plus récemment DOWNTON ABBEY qui lui a valu le Primetime Emmy Award de la meilleur réalisation pour une mini-série ou un téléfilm en 2011.
A la veille de la Seconde Guerre Mondiale, Liesel Meminger (Sophie Nélisse) est envoyée dans la petite ville de Molching dans une famille d’accueil avec son petit frère Werner qui malheureusement meurt durant le voyage. Subtiliser un livre découvert sur sa tombe lui semble être le seul moyen de ne pas demeurer complètement seule chez ses nouveaux parents nommées Hans et Rosa Hubermann (Geoffrey Rush, Emily Watson) et respectivement peintre et femme au foyer. Être éloigné de sa mère, perdre son frère et atterrir chez de parfaits inconnus, une épreuve ô combien difficile pour une jeune fille de seulement 12 ans mais dès lors, son destin se dessine tel un récit d’apprentissage où les différentes étapes de son quotidien façonneront sa nouvelle identité. Elle apprendra à lire grâce à Hans qui s’adonnera à cœur joie à lui transmettre toute la magie et la poésie dont regorge les mots, ces deux-là tisserons rapidement une relation fusionnelle et offrent par conséquent de jolis moments de tendresse, comme s’ils avaient toujours été père et fille.
En s’imprégnant de son nouvel environnement autant qu’elle s’adonne aux 400 coups avec son voisin Rudy, Liesel acquiert une certaine sensibilité envers la nature mais également envers Rudy (Nico Liersch) qui n’est d’ailleurs pas loin d’éprouver plus que de l’amitié pour elle. Mais sa prise de conscience la plus flagrante intervient lorsque la Seconde Guerre Mondiale éclate et que Liesel réalise cette fois-ci que le langage peut-être un fléau particulièrement puissant, une arme dangereuse capable d’endoctriner les masses s’il est véhiculé par un leader charismatique. La pratique de l’autodafé reste la preuve que l’on prive de parole tous ceux qui ne seraient pas raccord avec la pensée imposée. Et quand les circonstances amènent le couple Hubermann a cacher un Juif (Ben Schnetzer) dans leur cave, Liesel vient lui lire des histoires, rappelant encore que le pouvoir des mots peut être positif et que ces derniers deviennent ici un véritable refuge.
Un bildungsroman émouvant mais tout aussi inégal.
Visuellement parlant, LA VOLEUSE DE LIVRES est une réussite: réalisation soignée, impeccables photographie et reconstitution historique, le film à le mérite de transporter le spectateur vers de somptueux paysages neigeux, une beauté qui contraste bien évidemment avec le contexte politique vécu par les protagonistes. Cependant le film pèche par son scénario manquant parfois de rythme et instaurant des longueurs qui finissent par nous ennuyer, et plus l’ennui est présent, plus le film nous paraît interminable. Le film aurait donc gagné à être réduit en durée mais également en « bons sentiments »: trop nombreux ces instants ne parviennent plus à nous toucher et donnent l’impression que le réalisateur et le scénariste ne savent plus quoi raconter, un sentiment très étrange étant donné que le film est l’adaptation d’un roman. Enfin, le spectateur peine à ressentir pleinement toute l’oppression et la cruauté de la guerre avec des affrontements hors-champs, des effets spéciaux moyens ou encore la superficialité avec laquelle est traitée la Nuit de Cristal, une scène si peu marquante qu’elle donne l’impression d’avoir été édulcorée.
Partant d’un postulat de départ intéressant voulant nous nous faire vivre différemment la Seconde Guerre Mondiale en surfant sur une dimension lyrique, LA VOLEUSE DE LIVRES n’obtient finalement pas totalement notre adhésion, la faute à un scénario qui s’épuise et d’un manque flagrant de tension. Le film vaut quand même la peine d’être vu ne serait-ce que par sa beauté technique, la solide performances des acteurs (éblouissante Sophie Nélisse !), ses sincères moments d’émotion et son narrateur quelque peu atypique. Un bildungsroman émouvant donc, mais tout aussi qu’inégal.
Lorry-James