Dernier volet de la trilogie X, MAXXXINE rend hommage au cinéma d’horreur et aux vidéoclubs des années 80. Moins inspiré que X et Pearl, ses prédécesseurs, le dernier né de Ti West n’en demeure pas moins jouissif et habile dans ses références, malgré quelques évidences éculées.
Du porno au cinéma mainstream
En 2018, X nous introduisait au personnage de Maxine Minx, une jeune porn star, en plein âge d’or des années 70. Une époque où le cinéma pornographique devient mainstream et où ses actrices, comme Linda Lovelace ou Bambi Woods, sont propulsées au rang de vedettes. Une gloire effleurée du bout des doigts, qui pousse certaines d’entre elles à tenter leur chance dans le cinéma traditionnel dès le début des années 80. Ces jeunes femmes trouvent alors à cachetonner dans les productions horrifiques, friandes de ces starlettes prêtes à se déshabiller sans souci devant la caméra.
Après le golden age du porno et le survival des années 70 dans X, puis la comédie musicale et le grand mélodrame des années 50 à 60 dans Pearl, Ti West s’empare donc du cinéma horrifique des années 80 avec MAXXXINE. Jeune fille en simple salopette avec son fard à paupière bleu dans X, Maxine porte désormais une permanente de cheveux blonds décolorés, assortis de tenues glamour et de talons hauts. La volonté de se conformer au cahier des charges d’Hollywood se rend ainsi visible à travers le développement du personnage. Néanmoins, si les références culturelles des deux premiers volets s’égrenaient encore avec plus ou moins de subtilité, la main est devenue bien plus lourde dans ce dernier volet.
Meet the Night Stalker
En effet, le décor du motel de Psychose nous crie au visage, tout comme les similitudes entre l’immeuble de résidence de Maxine et l’hôtel Overlook de Shining. De même, l’antagoniste du récit est surnommé “Night Stalker”, à l’instar du célèbre tueur en série américain, Richard Ramirez. Des références particulièrement tapageuses, autant que pouvait l’être la décennie des années 80, période du capitalisme poussé à l’extrême, mais aussi du retour en force des pensées réactionnaires, avec la montée de la panique satanique. Une panique nourrie de récits horrifiques, tout droit héritée des films de possession des années 70.
Sur ce plan, MAXXXINE renoue avec des thématiques moins usitées, comme elles avaient pu être explorées dans X, mais peu approfondies dans Pearl. En effet, le film lie la panique morale des années 80 au besoin de reconnaissance de ces stars féminines de la série B, rarement citées, qui se vouaient à l’érotisme ou à la pornographie, pour arrondir leurs fins de mois. De même que les gants de cuir du Night Stalker évoquent les films de l’Italien Lucio Fulci, à cette période où il tentait de reproduire les succès américains. Avec ce qu’il faut de gore et de scènes choc pour attirer les spectateurs en salle ou… dans les vidéoclubs.
Maxine Superstar
Car le capitalisme s’étend, dans les années 80, sur de nouveaux supports. L’âge d’or de la VHS atteint son apogée, avec l’avènement des films en direct-to-video. L’offre répond à la demande par une surenchère de violence et de sexe, puis s’étend à un public plus jeune, qui ne peut accéder à ce type d’œuvre légalement en salle. Ce nouveau paradigme commercial attise la panique morale, compte-tenu du manque de contrôle sur ce marché encore récent. Paradoxalement, le support vidéo sert aussi aux plus conservateurs à promouvoir leurs idées, au travers de fictions ou de supports de propagande.
MAXXXINE dresse un portrait saisissant de cette période et érige son héroïne en symbole. Porte-étendard des vedettes de la série B, entre porno, érotisme et cinéma de genre, Maxine Minx incarne aussi le paradoxe de sa décennie, entre évangélisme exacerbé et star-system sans scrupule. Si l’on sent que Ti West porte un intérêt plus mesuré au cinéma des années 80 qu’à celui des années 50 à 70, il rafle tout de même la mise dans ses élans trash et dans sa volonté de faire triompher sa protagoniste. Car Maxine arrache sa victoire à l’ordre établi, là où des vedettes comme Michelle Bauer ou Linnea Quigley n’ont jamais eu la chance de transformer véritablement l’essai.
Lilyy Nelson