Après Longlegs, Oz Perkins adapte Stephen King avec THE MONKEY. Sorte de Destination Finale, avec son jouet maudit et ses morts aléatoires, le film entend avant tout divertir, et ne lésine pas sur l’humour noir caustique et le gore incisif. Moins profond que dans ses œuvres précédentes, Perkins livre une réalisation efficace mais néanmoins superficielle, oscillant entre esthétique rétro et effets numériques douteux.
Perkins adapte King
Dans le paysage horrifique, Stephen King relève autant de l’icône littéraire que du culte cinématographique. Toutefois, s’il subsiste quelques grandes œuvres incontestées, comme Carrie de De Palma ou Shining de Kubrick, et de nombreuses de séries B jouissives, telles que La Nuit déchirée de Mick Garris ou Cat’s Eye de Lewis Teague, les adaptations de King au cinéma ne sont pas toujours exactement synonymes de qualité. Encore plus depuis une dizaine d’années, où malgré quelques sursauts sympathiques, à l’image du Ça de Andrés Muschietti, les bonnes surprises n’ont cessé de s’éloigner dans le temps.
D’où l’intérêt suscité par THE MONKEY, produit par Atomic Monster – la société fondée par James Wan – et réalisé par Oz Perkins, derrière le polarisant Longlegs sorti en juillet dernier. Un choix intéressant, dans la mesure où le cinéaste nourrit une obsession certaine pour la thématique des abus familiaux, au cœur de la nouvelle adaptée – en l’occurrence Le Singe, publiée en 1980. De plus, que l’on apprécie ses élans mélancoliques ou non, Perkins tient son propre style et l’on reste intrigué de le revoir à l’œuvre dans une production plus calibrée, avec la structure narrative d’un récit littéraire culte comme garde-fou.
Un Destination finale au fond du Maine
D’ordinaire, Perkins a pour fâcheuse habitude de se perdre dans ses scénarios. À l’exception notable de Gretel et Hansel, scénarisé par Rob Hayes, le cinéaste écrit toutes ses réalisations. Un sacerdoce qui confère à son œuvre une dimension toute personnelle, bien qu’il se prenne souvent les pieds dans le tapis. Notamment dans les métaphores filées de I am the pretty thing that lives in the house et de Longlegs – bien moins profondes que ce qu’il tente de transmettre. L’écriture de THE MONKEY paraît, à l’inverse, plus contenue. Certainement car l’auteur se voit contraint par le cahier des charges d’Atomic Monster, davantage tourné vers le divertissement horrifique grand public.
Également par la nouvelle de Stephen King, dont il se permet d’étoffer les personnages et les péripéties, pour raconter une histoire proche d’un Destination Finale. Une évidence, compte-tenu de la malédiction contenue dans ce singe mécanique, qui s’actionne de manière aléatoire pour déclencher la mort – évidemment spectaculaire – d’une personne au hasard. Bien que peu fidèle au demeurant, THE MONKEY conserve ainsi le sel du récit de King. On lui reprochera néanmoins de se concentrer sur les thématiques du deuil et de la vacuité de l’existence humaine, et d’accorder une place moins importante aux violences intra familiales, terreau pourtant fertile chez Perkins.
Fun bien que superficiel
Cependant, le scénariste fait le choix intéressant de survoler quelque peu les questionnements sur la paternité, pour dépeindre une relation abusive entre les frères Shelburn, devenus jumeaux dans le film. Le propos ne tend pas à s’intellectualiser pour autant, contrairement aux œuvres précédentes d’Oz Perkins. De l’excipit de King, il préserve l’humour noir et caustique, qu’il émaille dans tout son film à grands renforts d’effets gores, dont les inserts brutaux tranchent avec l’atmosphère nostalgique, pesante et kitsch. On observe ici le trait d’union entre le style Perkins et la patte Atomic Monster.
Car THE MONKEY ressemble effectivement à une réalisation d’Oz Perkins, mais saupoudré de la touche grand-huit horrifique de sa société de production. Une union assez plaisante, bien qu’on reprochera au film des effets numériques d’un goût discutable, qui jurent avec l’esthétique rétro cotonneuse chère à son réalisateur. Une esthétique qui entretient des liens étroits avec la thématique des souvenirs d’enfance traumatiques – également parmi les marottes de Stephen King. En résulte un film d’horreur éminemment fun, soucieux de son matériau littéraire, bien qu’il pèche parfois par manque de profondeur. Un comble pour un scénario de Perkins, souvent coupable de trop en faire.
Lilyy NELSON