CARBONE

[CRITIQUE] CARBONE

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Pour son 5ème long métrage, Olivier Marchal perdure dans le polar noir mais le « glamourise » : casting cinq étoiles, lumières superbes, décors élégants, CARBONE séduit en tous points et c’est presque regrettable tant il met à l’honneur « l’escroquerie du siècle ».

En effet, en réalisant et en adaptant un scénario initialement écrit par un metteur en scène israëlien – Emmanuel NaccacheOlivier Marchal met en lumière la gigantesque arnaque financière à la taxe carbone ayant eu lieu en 2008 et 2009. Cependant, CARBONE mêle réalité et fiction en insérant à la fois des personnages ayant existé (en changeant à peine les prénoms pour certains), tels que ceux interprétés par Gérard Depardieu, Laura Smet, Carole Brana ou Dani, et des personnages de pure fiction tels que son « héros » Antoine Roca, interprété par Benoît Magimel.

Il valorise ainsi l’intelligence du cerveau ayant conceptualisé et concrétisé ce montage complexe, tout en lui substituant une histoire, une motivation et une personnalité qui le rende sympathique aux yeux du spectateur (et donc du contribuable ayant subi les conséquences de cette arnaque). D’un point de vue cinématographique, cette approche est excellente puisqu’elle confère un intérêt à la fois humain et scénaristique au long métrage mais moralement il est gênant que de tels escrocs puissent se réjouir qu’un film aussi qualitatif mette en scène leur histoire de façon quelque part flatteuse…

CARBONE
Michaël Youn, Idir Chender, Benoît Magimel et Gringe interprètent « les braqueurs du siècle »

Car force est d’admettre que CARBONE est un polar « à la française » très réussi. Clairement inspiré de L’impasse de Brian de Palma, A most violent year de J. C. Chandor ou encore Le Loup de Wall Street de Scorcese, Olivier Marchal apporte un côté instinctif, intime et très humain à sa réalisation. Cette empreinte personnelle lui permet d’impliquer le spectateur dès les premières secondes. C’est alors sans relâche que sa caméra nous embarque dans cette ambiance nocturne et qu’elle nous fait vivre cette incroyable aventure aux côtés de ses protagonistes.

Captivés par l’intrigue, on se prend même à espérer une fin différente alors que le sort en est jeté dès la scène d’introduction. C’est d’ailleurs ici que se joue l’ambivalence et la qualité principale de CARBONE. La morale est affichée d’emblée « Qui veut les sommets doit s’attendre aux abîmes » : on ne peut pas voler l’Etat et se frotter au grand banditisme en s’en sortant indemne, et pourtant…En transposant les faits réels à la vie d’un petit patron qui a juste cherché un moyen de sauver l’entreprise familiale puis s’est laissé griser par l’appât du gain, Olivier Marchal suscite d’emblée une incroyable empathie envers son « héros dépité ».

« Fascinant, violent, glamour et élégant, CARBONE est un polar comme on aimerait en voir plus souvent !»

Et si toute cette machinerie fonctionne aussi bien, c’est aussi et surtout parce que le réalisateur s’est entouré d’une équipe d’écorchés vifs dont les déboires, largement médiatisés, ont forgé ces caractères à la fois fragiles et intenses qui servent leurs rôles à merveille. Magimel est bouleversant de sincérité, il porte littéralement le film, mais au delà de son propre jeu, il apparaît une sorte de solidarité non feinte entre les protagonistes, quelque chose qui fait que l’on s’attache à tous ces personnages, à leurs failles, et que l’on se sente concerné par leur sort. Qu’il s’agisse de Laura Smet, Dani, Patrick Catalifo, Gringe, Idir Chender, Michaël Youn –parfait à contre-emploi-, ou Catherine Arditi, tous nous embarquent avec eux dans le cœur de cet engrenage, pour le meilleur et pour le pire.

CARBONE
Antoine (Benoît Magimel) et sa petite amie Noa (Laura Smet) avant que les ennuis commencent

En vulgarisant le principe complexe de l’arnaque à la taxe carbone pour rendre sa compréhension plus accessible (1,6 milliards de TVA volés à l’Etat français et bien plus à l’échelle européenne par le biais du marché d’échange des quotas d’émission de CO2), Olivier Marchal nous plonge de façon passionnante dans le récit de ce spectaculaire braquage. Il interroge sur les failles du système et nous fait vibrer au rythme saccadé de Suicide social (Orelsan) ou On pense tous monnaie monnaie (Scred Connexion). Fascinant, violent, glamour et élégant, CARBONE est un polar comme on aimerait en voir plus souvent !

Stéphanie Ayache

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Note des lecteurs6 Notes
Titre original : Carbone
Réalisation: Olivier Marchal
Acteurs principaux : Benoît Magimel, Gérard Depardieu, Laura Smet
Date de sortie : 1er novembre 2017
Durée : 1h44min
4
Captivant

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Rédactrice

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Note finale

  1. Vu Jeudi, c’est un chef d’oeuvre…
    De toute les critiques que j’ai pu lire après avoir rédigé la mienne, la votre est, à mes yeux,, la meilleure…
    Bravo Stéphanie :)

    Ma critique :

    La marque de fabrique d’Olivier Marchal, c’est le bon polar nerveux.

    Avec « Carbone », il signe un thriller efficace porté par un casting admirable avec, à sa tête : Benoit Magimel
    Si je trouvais le choix de départ surprenant, il m’aura fallu à peine 5 minutes, pour admirer son charisme.
    Comme à l’accoutumé, O.Marchal apporte un soin particulier à ses personnages en filmant leurs pensées. La tension est donc palpable du début à la fin.
    Michael Youn est très touchant durant les premières minutes. J’espère que ce contre emploi lui donnera des perspectives d’avenir pour des rôles plus sérieux.
    Cette fiction, adaptée d’un fait divers, représente mon coup de coeur du moment. La direction d’acteurs et la mise en scène y contribuant pour beaucoup.
    A voir absolument.