[critique] Dogville

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Dogville affiche

Dans les années trente, des coups de feu retentissent un soir dans Dogville, une petite ville des Rocheuses. Grace, une belle femme terrifiée, monte en courant un chemin de montagne où elle fait la rencontre de Tom, un jeune habitant de la bourgade. Elle lui explique qu’elle est traquée par des gangsters et que sa vie est en danger. Encouragée par Tom, la population locale consent à la cacher, en échange de quoi Grace accepte de travailler pour elle. Lorsqu’un avis de recherche est lancé contre la jeune femme, les habitants de Dogville s’estiment en droit d’exiger une compensation, vu le risque qu’ils courent à l’abriter. Mais la pauvre Grace garde en elle un secret fatal qui leur fera regretter leur geste…

Note de l’Auteur

[rating:9/10]

Date de sortie : 21 mai 2003
Réalisé par Lars Von Trier
Film français, italien, danois, norvégien, suédois, finlandais,néerlandais
Avec Nicole Kidman, Paul Bettany, Patricia Clarkson, Chloë Sevigny, Stellan Skarsgard, James Caan, Lauren Bacall, Jeremy Davies
Durée : 2h57min
Titre original : Dogville
Bande-Annonce :

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Le réalisateur danois n’en est pas à son premier coup de maître. Fortement remarqué déjà pour Breaking The Waves (Grand Prix du jury au Festival de Cannes en 1996) et Dancer In The Dark (César 2000 du meilleur film étranger), Lars Von Trier signe ici le premier volet d’une autre trilogie. Manderlay, la suite, sera réalisée en 2005, et Washington viendra un jour clore le chapitre. Si le créateur n’est plus à présenter, Dogville a su depuis s’imposer comme la référence d’un genre nouveau, plus expérimental.

Dogville 3

Ce film trace une fable remarquable sur la cruauté humaine, conjuguée à une critique acerbe mais concise de la société américaine telle que Lars Von Trier la voit. Car c’est tout un monde qui se tient dans Dogville, chaque comédien incarnant un rôle-type : l’agriculteur, la marchande, l’enseignante, l’handicapée, la femme de ménage noire… Cependant, les comédiens transpercent ici l’écran, dépassant largement la caractérisation extrême dont ils pourraient souffrir. Si Grace (Nicole Kidman) tient le premier rôle, il demeure impossible de laisser au second plan les performances des autres habitants de Dogville. Chaque comédien, aidé par le regard toujours emprunt de cynisme de Lars Von Trier, nous donne à voir le meilleur comme le pire de son personnage.

Dogville 1

Bien sur, Nicole Kidman exploite ici son talent au maximum, nous offrant une interprétation au plus juste, équilibrant parfaitement fragilité et détermination, sans jamais tomber dans l’apitoiement. A saluer également, le court mais remarquable passage de James Caan, saisissant dans l’échange qu’il tient avec Grace. Il n’en fallait pas moins que ces deux grands acteurs pour aborder un tel sujet : l’homme est-il responsable de ses actes ? Est-il pardonnable ? Lars Von Trier aux commandes, la parfaite maîtrise des dialogues est saisissante.

Dogville 2

Dogville diffère particulièrement par sa mise en scène épurée. Ni décor, ni paysage, ni façade. De simples traits blancs sur un sol noir nous dessinent les contours de la ville, chaque lieu étant scrupuleusement annoté. Si cela surprend au premier abord, l’expérience capte rapidement le spectateur. Enfermés dans leurs rôles et dans leurs cases, les personnages se dévoilent au-delà de leurs murs. Tout le monde surveille tout le monde, mais pourtant personne ne voit véritablement personne, et les pires atrocités s’offrent ouvertement aux seuls yeux du spectateur à qui rien n’est caché. Le film approche de l’œuvre totale, mêlant cinéma, théâtre et littérature. Par ce choix audacieux, Lars Von Trier nous dévoile la misère et l’hypocrisie humaine, dans une mise en scène résolument symbolique. Il ne reste plus que les acteurs, leur présence et leur dialogue.
On pourrait craindre l’ennui, mais cette bourgade fascine et angoisse tant, que sans même s’en rendre compte, chaque spectateur bâtit son propre Dogville intérieur.

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