JAUJA
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[CRITIQUE] JAUJA

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Mise en scène
6
Scénario
4
Casting
6
Photographie
8
Son/Musique/Bruitages
6
Note des lecteurs8 Notes
7.2
6

[dropcap size=small]S[/dropcap]eule véritable star du casting, Viggo Mortensen (Loin des hommes), également co-compositeur ici, continue d’explorer les chemins discrets et parfois exigeants du cinéma indépendant, s’y consacrant corps et âme. Car lorsque l’acteur accepte un tel projet, c’est pour aller au bout, avec une implication et une dévotion toujours impressionnantes, refusant même de s’engager dans la nouvelle super production d’un Tarantino (The Hateful Eight). Dans JAUJA, présenté l’année dernière à Cannes dans la catégorie Un Certain Regard, il y campe un capitaine danois se lançant à la recherche de sa jeune fille qui a fugué avec un jeune soldat au beau milieu de la Patagonie. Jonglant allègrement entre le danois et l’espagnol lors des rares séquences dialoguées de ce film singulier, l’homme s’engouffre dans une quête désespérée, parcourant un désert luxuriant ou aride qui menace de l’avaler.

Le réalisateur filme cette déambulation en procédant à des choix radicaux de mise en scène qui nous saisissent dès le premier plan. La palette colorimétrique nous renvoie immédiatement aux délires d’un Alejandro Jodorowsky et aux tubes de gouaches rouge vif utilisés dans les années 60 pour les giallo, westerns spaghetti et autres films de genre, lorsque l’on voulait montrer du sang. Le bleu, le rouge et le vert semblent fluorescents et se démarquent royalement au milieu de paysages à l’immensité réduite par un nouveau choix déstabilisant, l’utilisation d’un format carré en 1.33.

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Esthétiquement, la beauté naturelle des décors, dont le rôle va être primordial, laisse plus souvent place à la frustration, s’avérant un frein considérable quant à l’immersion. D’autant plus regrettable pour un film qui invite la caméra, les personnages et le spectateur à se perdre dans une expérience temporelle rare, mais à la lenteur rebutante.

Prenant place aux alentours de la fameuse « Conquête du Désert », le récit fait office de prétexte pour permettre au cinéaste de mettre en doute nos certitudes temporelles avant de progressivement les faire éclater jusqu’à un final d’un culot extraordinaire. Chaque fin de plan, avant une coupe ou un raccord est très souvent étirée de plusieurs dizaines de secondes. Si un personnage passe devant nous au premier plan, la caméra le laisse se promener dans toute la profondeur de champ, jusqu’à ce qu’il ne soit plus visible.

« Un Western contemplatif languissant ou surprenant, pour qui aura accepté de le suivre jusqu’à son final d’une audace folle. »

On a d’abord du mal à accepter ce rapport au temps au cinéma, habitués que nous sommes à des tempos soutenus et des récits ellipsés censés nous tenir en haleine. Puis, au fur et à mesure, une sorte de fascination opère. Le paysage change, le soleil n’est plus. Les nuits ne sont plus montrées. Depuis combien de temps notre capitaine courage erre-t-il dans cette nature hostile ? Bientôt, il rencontre des personnages qui font flirter le film avec le surréalisme, avant de s’engouffrer pleinement du côté de la métaphysique.

On se souvient alors des premiers cartons du générique, qui nous définissaient ce qu’était JAUJA : une terre mythique de bonheur que de nombreuses personnes ont cherché sans jamais y parvenir. En recherchant une fille qu’il a toujours couverte d’amour mais qui lui échappe désormais, notre protagoniste parviendra-t-il malgré lui à approcher ce lieu légendaire ? Ce rapport aux personnages et aux décors, lié à une temporalité incertaine, n’est pas sans nous rappeler le cinéma de Michelangelo Antonioni, tout comme les expérimentations d’un Gus Van Sant (on pense à sa trilogie sur le temps et tout particulièrement à Gerry, qui prenait déjà place dans un désert).

Pour tous ceux qui accepteront de se laisser aller à ce voyage défiant toute rationalité, le résultat peut s’avérer surprenant. Les autres eux, auront déjà quitté la salle voilà une heure.

Les autres sorties du 22 avril 2015

AVENGERS 2, GOOD KILL, JAUJA, EVERY THING WILL BE FINE, CAPRICE, BROADWAY THERAPY, ENTRE AMIS, LE DOS ROUGE, etc.

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22 avril 2015 - Jauja (1)

 

Titre original : Jauja
Réalisation : Lisandro Alonso
Scénario : Lisandro Alonso, Fabian Casas
Acteurs principaux : Viggo Mortensen, Ghita Norby, Viilbjørk Malling Agger
Pays d’origine : Argentine, Danemark , france , mexique , U.S.A., Allemagne , Pays-bas, Brésilien
Sortie : 22 avril 2015
Durée : 1h48min
Distributeur : Le Pacte
Synopsis : Un avant-poste reculé au fin fond de la Patagonie, en 1882, durant la prétendue « Conquête du désert », une campagne génocidaire contre la population indigène de la région. JAUJA est l’histoire de la quête désespérée d’un homme pour retrouver sa fille, une quête solitaire qui nous conduit dans un lieu hors du temps, où le passé n’est plus et l’avenir n’a aucun sens.

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Mise en scène
Scénario
Casting
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Son/Musique/Bruitages
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