un coeur en hiver

UN CŒUR EN HIVER, l’œuvre la plus aboutie de Claude Sautet – Critique

Nous souhaitons recueillir votre avis sur votre façon de nous lire. Merci de prendre 2 minutes de votre temps en cliquant ici !


UN CŒUR EN HIVER est certainement l’œuvre la plus aboutie de Claude Sautet. Il émane du film un rare mélange de pudeur et de froideur, d’une extrême finesse.

Daniel Auteuil trouve là son rôle le plus dense, et paradoxalement le moins loquace. Il incarne Stéphane, un luthier effacé, travaillant avec Maxime (André Dussolier), beaucoup plus ouvert, qui s’occupe des relations commerciales et musicales avec leur prestigieuse clientèle. Le jour où Maxime présente sa compagne Camille (Emmanuelle Béart), violoniste prometteuse, à son ami, Stéphane s’engage dans un jeu de séduction dangereux, que Camille prend pourtant très au sérieux.

Tout comme le trio de Maurice Ravel qui ponctue tout le film, UN CŒUR EN HIVER est une œuvre moderne, oscillant entre harmonie et dissonance. Comme deux accords discordants, les rôles masculins sont aux antipodes l’un de l’autre : l’un est brun l’autre blond, l’un mutique l’autre terriblement expressif. Ces deux hommes se complètent et emportent tour à tour les faveurs du spectateur tout au long du film. On balance entre l’attention de Maxime et la froideur énigmatique de Stéphane. l’extrême réserve de ce dernier  produit une tension, une simplicité infinie qui épure le propos et l’intensifie. Comme aucun autre réalisateur, Claude Sautet capte dans les gestes quotidiens et les dialogues une intimité rare. Entre hommes, entre femmes, mais aussi et surtout dans la relation amoureuse, aucune place pour le superflu. La mise en scène est une mise en vie. Dans le cadre fixe, la « tension de l’âme » de Stéphane est omniprésente, intensifiée ici par Daniel Auteuil qui, par ses regards et sa posture, joue tout e nuance cet handicapé de l’amour. L’intrigue amoureuse réside presque entièrement dans cet être mystérieux, dont on ignore tout, qui joue à séduire, à être quelqu’un qu’il n’est probablement pas. Les sentiments de Stéphane apparaissent comme les mouvements du trio que joue Camille, tantôt doux et enveloppants, tantôt d’une extrême aridité, dissonants et rudes.

Claude Sautet capte dans les gestes quotidiens et les dialogues une intimité rare.

Daniel Auteuil, très impressionnant, semble bien loin de ses rôles actuels. Tout en nuance, son regard noir exprime les multiples tressaillements de l’âme de Stéphane. En face de lui, Emmanuelle Béart est nature, viscérale, et Sautet tire le meilleur du contraste entre les deux jeux d’acteurs. Le réalisateur maintient un équilibre précaire dans la relation entre eux, qui vacille constamment et nous tient, nous emporte, nous bouleverse. Le reste du casting est solide, André Dussolier juste et Brigitte Catillon parfaitement employée pour créer une judicieuse tension homosexuelle, qui rajoute à la complexité des liens entre les différents personnages.

Décidément, Claude Sautet manque cruellement au cinéma français. On aura beau chercher d’improbables héritiers, il n’est pas d’égal à ce marionnettiste des sentiments humains, dont les fils, si fins, parviennent encore à nous émouvoir, particulièrement dans UN CŒUR EN HIVER.

Note des lecteurs4 Notes
4.5

Nos dernières bandes-annonces

Rédactrice depuis le 25.03.2015
S’abonner
Notifier de
guest

1 Commentaire
le plus récent
le plus ancien le plus populaire
Commentaires en ligne
Voir tous les commentaires
Le Marginal Magnifique
Le Marginal Magnifique
Invité.e
1 novembre 2017 8 h 59 min

Personnellement je me suis grave emmerdé ! Les trois derniers films de Sautet ont perdu la grâce des films précédents…

1
0
Un avis sur cet article ?x