Pepi, Luci, Bom et autres filles du quartier

PEPI, LUCI, BOM ET AUTRES FILLES DU QUARTIER – Critique

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Mise en scène
7
Scénario
6
Casting
8
Photographie
7
Musique
9
Note des lecteurs1 Note
8.6
8
Note du rédacteur

Évidemment, mieux vaut en savoir le moins possible pour apprécier au maximum la surprise que constitue le film. Mais il faut comprendre que les différentes scènes qui constituent PEPI, LUCI, BOM ET AUTRES FILLES DU QUARTIER ont toujours un rapport particulier au sexe, ou plus précisément au plaisir. Comment le donner, comment le recevoir. Par qui, pourquoi, combien de temps ; un thème somme toute tabou, mais toujours d’actualité. Pedro Almodóvar, dès ce « premier » film impose un style et une façon de filmer, une liberté de ton.

Déjà, formellement, Pedro Almodóvar ne s’interdit rien. Bien qu’apparemment limité par les moyens, la liberté éclate dans chaque plan.
Pas techniquement toutefois. Le film est clairement moche, mal éclairé, mal sonorisé (bien que la musique estampillée 80’s résonne étonnamment actuelle). Il faut le voir comme un premier film typique ; celui d’un réalisateur qui n’accorde pas encore autant d’importance à l’esthétique qu’au fond.

Non… Cette liberté transparaît plutôt dans le ton donné au film !
Le décor est par conséquent aussi vivant que ses héroïne ; transmet un état d’esprit, une époque, une manière de vivre, inédits. Cela passe par une représentation singulière de Madrid – ses extérieur (des rues madrilènes, des bars underground gays), ou encore, les intérieurs, tous plein de personnalité, des différentes « femmes du quartier ».
L’esthétique globale est ancrée dans les années 80. Mais bizarrement, elle ne parait ni datée ni ringarde, au contraire en adéquation avec la liberté de ton et la mise en scène.

Par son rythme ensuite : Pedro Almodóvar ne s’encombre jamais de développements complexes et préfère toujours montrer cause et effets, plutôt qu’explications.
Les ellipses sont nombreuses et brutales. Les scénettes hors sujet également… Qu’importe ! Tout cela constitue un maelstrom sensitif, social et existentiel qui finit par nous immerger dans un quotidien inédit, parfois fantasque, parfois ultra-réaliste. Un quotidien ou les femmes, plus que d’être le sujet, sont aussi la moelle, le cerveau, la chair, le corps du film. Les rôles sont donc inversés : les femmes dirigent, pensent s’expriment.

Car Pedro Almodóvar  raconte avec PEPI, LUCI, BOM… une histoire de femmes.
Et pas qu’en surface : le réalisateur semble avoir véritablement compris les préoccupations de ces filles, mais plus généralement de la femme espagnole des années 80 : Comme l’indique le titre, plusieurs femmes y sont présentées. De Pepi, femme libre, imaginative à Luci & Bom la jeune et la quarantenaire, la dominatrice et la soumise ; la femme à barbe insatisfaite, la voisine dévote mais pas contre une petite baise rapide… Almodóvar nous présente un éventail large de pensées et réflexions féminines, qui, loin d’être anecdotiques, finissent par briser un des tabous du cinéma : la recherche et l’obtention du plaisir.
Comme si Pedro Almodóvar s’était donné pour mission de débrider le plaisir féminin, avec toute la violence qu’un tel geste entraînerait. Il est impressionnant de constater la modernité d’une telle entreprise.

Viol, sado/masochisme, Homosexualité… tout cela est traité non pas comme un tabou ou un interdit, mais comme moyen d’arriver à l’extase.
Ainsi, tirées de leur contexte, les scènes du film pourraient choquer, voire dégoûter – notamment la toute première scène qui, sans contexte, est particulièrement dérangeante car elle associe plaisir, et violence.
Pourtant, petit à petit, Almodóvar nous invite à dépasser ce postulat sans doute un peu provoc, et nous laisse pénétrer dans un univers beaucoup plus personnel, bien plus doux et sensuel qu’au premier abord. La quête du plaisir devient progressivement plus réfléchie, intellectuelle, sensible. Le charnel fait place aux sentiments ; le rythme se ralentit, observe plus qu’il ne montre.
L’état des lieux est passionnant. La liberté apporte du bonheur, mais l’autre également. Amour, amitié ou compagnie.

Une liberté de ton qui, on l’imagine aisément, a du créer son petit effet en 1980 et cataloguer le film comme pervers ou malsain alors qu’à l’inverse, il témoigne d’une véritable amour pour ses sujets : femmes, plaisir, sentiments
Et il n’y va pas par quatre chemins. A défaut d’être montrée explicitement, cette sensualité débridée est très fortement suggérée. Par les mots, bien sur (le film est incroyablement bien dialogué, même s’il est très vulgaire), par les images parfois suggestives, parfois explicites, souvent mémorables, puis dans la métaphore, constante. À ce sujet, la parodie de campagne publicitaire en milieu de film est cultissime !
Nul aspect ne prend le pas sur un autre, ce qui permet au film de ne pas être un simple objet provoc, mais au contraire un tout cohérent, un plaidoyer pour la libération sexuelle.

En bref, PEPI, LUCI, BOM ET AUTRES FILLES DU QUARTIER est un film unique, comme je n’en avais jamais vu.
C’est peut être pour cette liberté de ton sans pareille que Pedro Almodóvar est un cinéaste si respecté jusqu’a maintenant. Il y a 35 ans déjà, il utilisait un langage intemporel pour aborder un thème encore relativement tabou : le plaisir de la femme. Plus que cela, il développait ce postulat jusquà faire le lien avec l’affectif, qu’il définissait comme autant nécessaire que le charnel. Une étude des désirs de la femme espagnole des années 80 : Absolument passionnant, et à découvrir définitivement !

Georgeslechameau

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