LES NOUVELLES AVENTURES D'ALADIN
© Pathé Distribution

LES NOUVELLES AVENTURES D’ALADIN – Critique

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Mise en scène
2
Scénario
4
Interprétation / Personnages
6
Humour
4
Note des lecteurs96 Notes
0.9
4

Un succès surprise, un blockbuster français au rabais, Kev Adams, un matraquage médiatique hardcore, une manipulation de l’opinion… Peu de monde en dehors du public cible a vraiment vu LES NOUVELLES AVENTURES D’ALADIN mais tout le monde (même nous finalement) s’accorde à cracher sur le film…

Un tel effort de groupe tend à lui donner des intentions un peu faussées de représentant de la « mauvaise qualité du cinéma populaire français »- et de son public…
Sans aller jusqu’à le défendre en mode seul contre tous comme on a pu (enfin… comme j’ai pu) le faire avec 50 Shades of Grey, il nous fallait tout de même donner un avis sur le film, et pourquoi pas, recentrer un peu le débat sur ce qu’il représente au-delà de notre appréciation.

Mais du coup, qu’en est-il du film ?

LES NOUVELLES AVENTURES D’ALADIN adopte une structure narrative à la Princess Bride : un conte du moyen-orient médiéval raconté à des gosses du présent. Il y avait donc d’emblée un certain anachronisme propice à de bonnes blagues empreintes de pop culture et un inhérent décalage. Mais la logique ne semblait pas faire partie du cahier de charges des stoyboarders, plutôt pressés d’aligner de bonnes (???) idées sur le papier mais ne cherchant jamais la cohérence d’ensemble. Enchaîner sans aucune transition blagues homophobes et blagues anachroniques, ou humour cartoon/burlesque, et humour noir… Il faut un sacré sens de l’absurde ou de l’image pour le mettre en scène. Ce n’est pas le cas ici, ou seul Kev Adams sert de liant… Pourtant, on le sait : son talent est dans l’identification à son public via ses propres idoles, plutôt que dans l’humour véritable. Lui faire porter un film en se reposant sur son « talent comique » est un risque cinématographiquement impensable – ce que les producteurs ont du envisager puisqu’il n’a pas le premier rôle mais celui de catalyseur scénaristique. Ainsi, l’humour de ces NOUVELLES AVENTURES D’ALADIN ne repose heureusement pas que sur sa prestation mais sera à chercher dans les gags purement visuels ou chez quelques personnages secondaires à fonction de comic-relief.

Les Nouvelles aventures d'Aladin
Il y aura donc le vizir de Jean Paul Rouve, sorte de Amonbofils inexpressif ; Eric Judor en mode Eric et Ramzy presque sans Ramzy (j’me comprends) fait un génie impeccable et un peu fun ; puis il y a le toujours parfait car discret William Lebghil (Les Combattants, Jacky au royaume des filles). Même la princesse parvient à arracher un sourire par sa connerie – assumée par le rôle et son interprète Vanessa Guide. Les autres protagonistes seront soit exactement ce qu’on en attend (ceux d’Audrey Lamy, Michel Blanc et donc, Kev Adams), soit COMPLÈTEMENT ratés, comme le magicien gay/Arthur Benzaquen (le réal du film par ailleurs). Cela dit, aucun de ces personnages ne résiste au rythme imposé par la mise en scène incohérente, persuadée que faire durer les blagues en plus d’en faire des running-gags est une bonne idée. L’incompréhensible longueur des scènes rend ainsi très pénible toute tentative de décalage humoristique. Certaines scènes, comme l’intro en tapis volant/tuning, la partie de tap tap dance ou le clip, entre autres, tombent complètement à plat.
De plus malgré la richesse du conte original, LES NOUVELLES AVENTURES D’ALADIN présente d’immenses lacunes scénaristiques, inefficacement camouflées par des ellipses dégueulasses et des brisures trop confiantes du quatrième mur. La piste narrative du présent ne sera d’ailleurs jamais vraiment exploitée avant l’indigeste et impromptu final. Au contraire, ses inintéressants « retours à la réalité » cassent franchement le rythme déjà oscillant du film. Puis les publicités mal amenées (Galeries Lafayette, Guerlain, Chanel, singles à vendre ou Quick), les effets spéciaux et incrustations qu’on dirait sorties des 90’s…

En fait, tout cela illustre le manque de subtilité et de finitions du film. Placer des publicités, tenter des gags décalés, utiliser des effets spéciaux à bon escient, réaliser un blockbuster français de qualité… Ça s’est déjà vu – Mission Cléopâtre ou Marsupilami en sont de « bons » exemples. Par contre Arthur Benzaquen, s’il s’inspire structurellement des films de Chabat, manque clairement d’expérience. Comment avec un premier film, prétendre à la même précision comique qu’un artiste ayant éprouvé pendant plus de 20 ans toutes sortes d’humour avant de devenir réalisateur et de tester plusieurs genres cinématographiques (Gazon Maudit, Didier) avant de s’attaquer au blockbuster familial ?

Un bien mauvais film. Qui mérite toutefois qu’on s’y intéresse au-delà de notre simple appréciation.

Mais reconnaissons tout de même au film de ne jamais cacher son ambition de divertissement décérébré et mercantile pour adolescents et/ou public familial moyen. LES NOUVELLES AVENTURES D’ALADIN se pose comme ce film à voir « parce qu’il n’y a rien d’autre », et qui ne prendra même pas la peine de faire autre chose que d’aligner des blagues, un semblant d’histoire et un happy end bien gras… Le tout suffisamment bien amené pour laisser un souvenir positif à celui qui ne s’intéressera pas trop à sa technique. Il y a une certain pattern de production ici, rappelant (encore une fois) la formule Chabat d’Astérix à savoir : star populaire du moment, humour anachronique, aventures extraordinaires, et exploitation cinématographique d’une icône de la pop culture.
En fait, à y regarder de près, cette formule n’a même pas été inventé par Chabat, elle circule dans le cinéma français depuis très longtemps. BourvilDe Funès, Coluche, Depardieu, Pierre Richard, Christian Clavier / Le Splendid, Jamel, Kad Merad ont successivement incarné ce « succès populaire »… Acteurs se passant justement le flambeau au sein du même genre de films d’aventures : portés par un humour générationnel et une volonté d’exotisme plus ou moins local. Chaque itération fit probablement grincer des dents les « vieux cons » de son époque et pourtant, les plus anciens font maintenant figure de classiques.

Alors oui, aujourd’hui, LES NOUVELLES AVENTURES D’ALADIN  est clairement l’un des plus mauvais films familiaux de l’année (juste au dessus des pourtant sincères Pourquoi j’ai pas mangé mon père de Jamel et Profs 2 de PEF).
Mais une bonne question à se poser, c’est comment seront perçus cet Aladin et autres « succès populaires » dans 40 ans ?

Les Nouvelles aventures d'Aladin

Puis remettons les choses à leurs places : le cinéma français, ce n’est pas qu’ALADIN.
Même le cinéma français populaire, ce n’est pas qu’ALADIN.

Rien que cette année, Papa ou Maman et La Famille Bélier (sorti le 17/12/14) s’illustraient par leur qualité et leur générosité tout en étant résolument « populaires ». Même les médiocres Pourquoi j’ai pas mangé mon père de Jamel et Profs 2 de PEF possédaient une certaine sincérité qui les sauvaient du naufrage. Quant au reste de la production française, c’est tout de même 107 films dont de nombreux de qualité. Par exemple : Le Petit Prince, Nos Futurs, La Glace et le Ciel, Marguerite, Dheepan, Fatima, Much Loved, Microbe et Gasoil, Ni le ciel ni la Terre ou le fantastique Avril et le monde Truqué – les derniers s’illustrant par leur contre-performance au box-office. D’ailleurs, n’oublions pas que même avec moult redistributions vers producteurs, acteurs et autres actionnaires, le succès de films tels qu’ ALADIN est nécessaire à l’économie du cinéma.
Dans le seul cas de Pathé (producteur d’ALADIN), le succès d’un Supercondriaque (6,5M de spectateurs) influence forcément la production d’un Paradise Lost ou d’un Illustre Inconnu – de même que celui d’un Papa ou Maman pallie à leurs échecs au box office. Plutôt que de nous arrêter à un bashing du film, rappelons également qu’un ALADIN à supporter permet quelque part, à un Cowboys ou à un Youth d’exister, et facilitera peut-être le financement du prochain Kechiche ou d’une nouvelle éventuelle merveille de Sylvain Chômet. Des paramètres qu’il est important de garder en mémoire.

Au final, pas grand chose à sauver dans cet ALADIN, à part peut-être la princesse et deux-trois autres personnages. Malgré tout, le film mérite d’être recontextualisé, tant pour se rendre compte d’une certaine logique dans sa production, que pour éviter l’amalgame d’un cinéma français en perdition.

Georgeslechameau

 

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benj
benj
Invité.e
1 février 2016 16 h 49 min

Tres bon divertissement que j’ai regarde double en Anglais au cine aux Philippines… Pas tres fan de Kev Adams, mais je l’ai trouve tres bon dans ce film… Comme quoi votre critique n’engage que vous!

Guillemin
Guillemin
Invité.e
12 novembre 2015 12 h 20 min

Ça peut paraître petit mais rien que le fait qu’un classique disney soit repris par des français… me fait reculer d’un bond. Pourquoi seul les américains savent rendre la beauté d’un disney en film?

Guillemin
Guillemin
Invité.e
Répondre à  Georgeslechameau
12 novembre 2015 15 h 52 min

Non mais dans aladdin ici je n’ai vu qu’une reprise humoristique et à la limite du foutage de tête alors que dans les autres il y a quelque chose tout simplement. Et puis les français sont plus doués en humour on le sait bien mais la aladdin avait pas à être repris… enfin ça reste mon avis après je ne critique pas en étant mal élevé, je dis juste que je n’ai pas apprécié.

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