SPOTLIGHT
© Warner Bros. France

SPOTLIGHT, excellent film-enquête qui se déguste comme un thriller – Critique

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Tempo narratif
8
Scénario
8
Casting
8
Photographie
7
Musique
6
Note des lecteurs14 Notes
7.6
8

SPOTLIGHT est un peu le film de ce début d’année sorti de nulle part. Un réalisateur aux commandes peu connu de nos radars, l’après Birdman pour un Michael Keaton revigoré et une pluie de nominations en vue des prochains Oscars.

Intrigant, d’autant plus que malgré son sujet brûlant, basé sur de terribles éléments ayant secoué l’Amérique puis le reste du monde, les premiers retours sont quasi-unanimes, louant un film-enquête passionnant. Qu’en est-il réellement ?

Un film-enquête digne de ce nom sorti chez nous en France remonte au passionnant Zodiac de David Fincher, c’est-à-dire une enquête basée sur de véritables éléments et soutenu par le style formel de son auteur, avec une approche documentaire dans l’écriture. Si Oliver Stone pour son immense JFK penchait très rapidement sur la thèse du complot quant à l’assassinat du président Kennedy, Fincher lui bouclait son film relatant la traque du tueur du Zodiaque de la même manière dont l’investigation s’est véritablement arrêtée. Étouffée avec le temps, sans conclusion satisfaisante, le tueur courant peut-être toujours.

SPOTLIGHT, c’est ici le nom donné à une équipe de journalistes déterminés à faire éclater au grand jour de terribles révélations autour d’un groupe de prêtres pédophiles au début des années 2000 à Boston et ses environs. Un scandale d’autant plus fort qu’il souillera l’image de l’Église et se répercutera par la suite dans le monde entier, cette révélation nous étant présentée comme un déclic.

Outre le fait de compter également dans ses rangs Mark Ruffalo (dont la prestation est tout bonnement impressionnante, l’Oscar du meilleur second rôle est tout proche), le film de Tom McCarthy rappelle aussi la même construction narrative que le Zodiac de Fincher. Il s’agit ici de dévoiler dans le temps la manière dont cette poignée de journalistes parviendront finalement à publier un terrible article et ce, par-delà les nombreux obstacles auxquels ils se sont heurtés. L’histoire est sous nos yeux, nous savons donc pertinemment que l’article en question a été publié, tout comme nous savions que la traque autour du tueur du Zodiaque n’avait jamais été menée à son terme. Mais alors, pourquoi vouloir s’embarquer dans 2h de pérégrinations bavardes pour un résultat déjà connu alors ?

Parce que SPOTLIGHT se révèle au cours de ces 2h, un film utile et même nécessaire sur un sujet fort et révoltant, qui n’oublie pas le cinéma pour autant.

Photo du film SPOTLIGHT
© Warner Bros. France

Les premières minutes donnent le ton : le tempo va être soutenu, les dialogues francs et directs seront dénués de gras inutile et la caméra se plie à une transparence pour mieux cerner les acteurs et mettre en valeur une belle efficacité narrative. C’est un plaisir de retrouver Michael Keaton qui joue ici sur les registres de la sobriété et de la gravité avec une grande finesse. Son équipe nous est vite introduite et le spectateur s’apprête à travailler en bonne et due forme avec cette petite famille qui ne s’arrêtera pas d’aller frapper aux portes des victimes ou des bibliothèques, gratter sur ses bloc-notes et passer des coups de fils et ce, au détriment de leur vie privée sur laquelle nous ne nous attarderons presque jamais. Au détour de quelques témoignages crus, le film devient alors captivant et le processus empathique se met inexorablement en marche : peu importe nos croyances, ce que nous venons d’entendre est tout simplement ignoble et nous aussi ne voulons dès lors plus qu’une chose, voir ces soi-disant hommes de Dieu être punis comme il se doit.

Un film utile et même nécessaire sur un sujet révoltant, qui se déguste comme un thriller.

En cela, SPOTLIGHT fonctionne remarquablement bien dans la façon dont il réussit à nous interroger et remettre en cause certaines de nos certitudes selon nos appartenances religieuses. Le scandale était énorme, le bruit semble s’être étouffé aujourd’hui, mais les interrogations demeurent alors que le fléau continue probablement de se propager dans le silence. Un fléau d’autant plus difficile à révéler, de par la place occupée par l’Église et sa toute puissance outrepassant certaines lois, un fait révoltant sur lequel le film insiste également. Des punchlines résonnent encore dans nos têtes en sortant de la séance, de même que le carton final nous présentant rapidement tous les pays touchés par ces odieux agissements. Lors d’un face-à-face, le personnage de Michael Keaton parle au nom du spectateur, avouant être resté dans le mutisme trop longtemps alors qu’il pouvait sans doute déjà condamner les mauvaises personnes en temps voulu. Une affaire d’autant plus indigne et délicate qu’elle s’est nourrie du silence de chacun, protégeant ces hommes de foi aujourd’hui encore traités comme des rois.

Enfin, il convient de saluer, en dépit d’une musique parfois inutilement présente, la maturité, le métier et une certaine humilité avec lesquels ont été réalisé SPOTLIGHT, loin d’un pathos et d’un discours pro-Américain vantant lourdement le mérite de ces Yankees journalistes via des effets pompeux et trop appuyés. Rien de tout cela ici, bien au contraire. À l’instar de ses dialogues brillants et coup de poings, SPOTLIGHT est dénué de tout superflu et se révèle un excellent film-enquête qui se déguste comme un thriller.

Loris Quinto

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