UNE HISTOIRE DE FOU
© Diaphana Distribution

[CRITIQUE] UNE HISTOIRE DE FOU

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Scénario et dialogues
7.5
Mise en scène
8
Photographie
8
Plongée dans l'histoire
9
Émotions
7
Casting
8.5
8
Note du rédacteur

Le génocide arménien, acte de folie qui n’est toujours pas reconnu depuis cent ans par la Turquie, a rendu fous de douleur les Arméniens survivants et leur descendance dans le monde entier. Robert Guédiguian, concerné dans sa propre histoire personnelle,  nous raconte dans UNE HISTOIRE DE FOU  les actes meurtriers commis par des Arméniens rendant justice à leur peuple, mais aussi la façon dont chaque membre d’une famille appréhende cette Histoire.

Et il est vrai que le poids du génocide, dont les conséquences sont encore d’actualité, est quelque peu impressionnant pour qui veut critiquer un film portant sur ce sujet, passionnément défendu par le réalisateur que nous avons eu la chance de rencontrer (lire notre interview).

Robert Guédiguian nous a déjà emmené dans les reconstitutions historiques avec l’Armée du Crime ou Le Promeneur du Champ de Mars. Dans UNE HISTOIRE DE FOU, il revient sur l’histoire de la mémoire arménienne, nous expliquant que la lutte armée de l’Armée Secrète Arménienne de Libération de l’Arménie (ASALA), qui a sévi dans les années 1980 en Europe, trouve ses origines dans les actes commis dans les années 1920. Les Arméniens de l’Opération Némésis se présentaient comme des justiciers et tuaient les dignitaires turcs ayant participé au génocide.

Le réalisateur a pris le parti de scinder son récit en deux, à soixante ans d’intervalle, avec comme point commun la violence. Le film s’ouvre donc sur le fameux procès de Soghomon Tehlirian/Robinson Stévenin pour le meurtre de Talaat Pacha et qui, acquitté, portera les espoirs de tous les Arméniens de la diaspora et du futur. Les scènes ont été tournées presque comme un documentaire, en noir et blanc, avec la caméra qui s’attarde avec empathie sur les visages des magistrats et membres du jury écoutant avec horreur Tehlirian raconter les massacres auxquels il a assisté.

Diaphana
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Puis nous faisons un bond dans l’Histoire et suivons la trajectoire idéaliste de Aram/Syrus Shahidi depuis Marseille jusque dans les camps d’entrainement au Liban. Bien sûr, sa conscience d’avoir blessé le jeune Gilles/Grégoire Leprince-Ringuet dans l’attentat contre l’ambassadeur turc, le tiraillera, jusqu’à accepter de lui demander pardon. Le réalisateur nous brosse le portrait d’un garçon un peu naïf, dépassé par les événements, qui va évoluer et s’endurcir par la force des choses. Sa réflexion l’amènera à choisir un nouveau mode de lutte non violente sans plus subir l’influence de son camarade d’écriture Vahé, de la jeune combattante Anahit ou du chef du camp meneur d’hommes Vrej.

La mue qui fera de Aram un homme est intéressante mais ne provoquera pas réellement d’émotions, car nous sommes un peu comme Gilles : nous comprenons son geste mais nous ne pouvons pas le justifier. Nous n’avons d’ailleurs pas eu l’impression que Robert Guédiguian portait de jugements, nous laissant totalement libres de penser ce que nous voulons. Et les quelques lignes à la fin du film à l’adresse de ses camarades Turcs rééquilibrent un peu la charge portée contre la Turquie.

« Malgré quelques imperfections scénaristiques, UNE HISTOIRE DE FOU nous fait réfléchir à la folie du génocide arménien et aux notions de mémoire, de vengeance, de justice, de honte, de pardon et d’amour filial. »

Robert Guédiguian alterne les scènes en parallèle de cette vie au Liban avec celles des parents de Aram à Marseille et de Gilles découvrant sa vie et ses jambes brisées dans sa chambre d’hôpital.  Il dit s’être librement inspiré du livre La Bombe écrit par le journaliste espagnol José Gurriaran, blessé dans un attentat de l’ASALA, qui  a pardonné à ses bourreaux et est même devenu porte-parole de la cause arménienne.

Si nous sommes effectivement émus par les histoires que nous content les personnages, les chants et les vielles photographies des familles victimes, le réalisateur manque son but à trop vouloir renforcer le propos avec une fiction qui dépasse la réalité et perd en crédibilité. Ainsi, nous éprouvons bizarrement peu d’empathie pour Gilles et vraiment aucune pour Anouch/Ariane Ascaride, la mère d’Aram. Comment croire en effet, même avec les meilleures intentions du monde, à cette mère aveuglée par l’amour qu’elle éprouve pour son fils, allant jusqu’à accueillir Gilles chez elle ?

Diaphana
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Robert Guédiguian oppose d’ailleurs les deux conceptions des Arméniens à propos de la non reconnaissance du génocide : ceux qui se battent, cultivant le souvenir des actions des justiciers de l’opération Némésis, et ceux qui s’intègrent, cultivant néanmoins leur arménité. Ces derniers transmettent oralement la culture, la langue et les traditions, mais sans haine, tel Hovannès/ Simon Abkarian, le père de Aram. Le réalisateur semble l’avoir volontairement placé en retrait, comme neutre, donnant de l’importance à la relation mère-fils et négligeant la relation père-fils. Il n’éprouve pas de colère, juste de l’abattement et de la sidération, comme dépassé par la situation et par les actions de son épouse.

Les acteurs incarnent leurs personnages avec justesse, tel Syrus Shahidi, croisé dans 24 jours, la vérité sur l’Affaire Ilan Halimi, et bien sûr Simon Abkarian, toujours excellent. Grégoire Leprince-Ringuet habitué à jouer dans les films de Robert Guédiguian, tels Les Neiges du Kilimandjaro , apporte une forme de distance à son personnage.

Pour être dense, le film est dense, et il faut, en tant que spectateur, tenir le choc des nombreuses informations historiques que nous recevons, même si nous sommes familiers de l’histoire du peuple arménien. Son mérite, sa vocation même, malgré quelques imperfections scénaristiques, est de nous faire réfléchir aux notions de mémoire, de vengeance, de justice, de honte, de pardon et d’amour filial.

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Affiche Une histoire de fou

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Titre original : Une histoire de fou
Réalisation : Robert Guédiguian
Scénario : Robert Guédiguian, Gilles Taurand, d’après l’oeuvre de José Antonio Gurriaran
Acteurs principaux : Simon Abkarian, Ariane Ascaride, Syrus Shahidi, Grégoire Leprince-Ringuet, Serge Avédikian
Pays d’origine : France
Sortie : 11 novembre 2015
Durée : 2h14min
Distributeur : Diaphana Distribution
 

[toggler title= »Synopsis » ]Berlin 1921, Talaat Pacha, principal responsable du génocide arménien est exécuté dans la rue par Soghomon Thelirian dont la famille a été entièrement exterminée. Lors de son procès, il témoigne du premier génocide du 20ème siècle tant et si bien que le jury populaire l’acquitte.
Soixante ans plus tard, Aram, jeune marseillais d’origine arménienne, fait sauter à Paris la voiture de l’ambassadeur de Turquie. Un jeune cycliste qui passait là par hasard, Gilles Tessier, est gravement blessé. Aram, en fuite, rejoint l’armée de libération de l’Arménie à Beyrouth, foyer de la révolution internationale dans les années 80. Avec ses camarades, jeunes arméniens du monde entier, il pense qu’il faut recourir à la lutte armée pour que le génocide soit reconnu et que la terre de leurs grands-parents leur soit rendue.
Gilles, qui a perdu l’usage de ses jambes dans l’attentat, voit sa vie brisée. Il ne savait même pas que l’Arménie existait lorsqu’Anouch, la mère d’Aram, fait irruption dans sa chambre d’hôpital : elle vient demander pardon au nom du peuple arménien et lui avoue que c’est son propre fils qui a posé la bombe. Pendant que Gilles cherche à comprendre à Paris, Anouch devient folle de douleur à Marseille et Aram entre en dissidence à Beyrouth… jusqu’au jour où il accepte de rencontrer sa victime pour en faire son porte parole.[/toggler]

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Scénario et dialogues
Mise en scène
Photographie
Plongée dans l'histoire
Émotions
Casting
Note finale