Photo du film À 2 HEURES DE PARIS

À 2 HEURES DE PARIS, une jolie quête d’un père – Critique

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Pour son premier film, À 2 HEURES DE PARIS, Virginie Verrier dresse le portrait d’une jeune femme singulièrement libre, à la recherche du père de sa fille.

On sait tous que réaliser un film est un chemin constamment semé d’embûches et que certains films sont plus difficiles à monter que d’autres. Producteurs frileux et parfois donneurs de leçons moralistes sur les personnages ou abandonnant le navire à des moments clés. En effet, combien de scénarios restent dans les tiroirs, combien d’idées ne voient jamais le jour, combien de « films fantômes » comme le dit si bien le réalisateur Jean-Pierre Améris ? Sans parler des films réalisés mais qui ne trouvent pourtant pas de distributeurs et se font connaître grâce aux festivals (tel Post Partum de Delphine Noels présenté en compétition au Festival du Film Francophone d’Angoulême)? Enfin, combien de films projetés dans trop peu de salles françaises pour donner une chance au public de le voir (comme Bienvenue en Sicile) ? Mais parfois la détermination et l’envie d’un réalisateur sont plus fortes que tout et permettent à son film de voir le jour. Lâchée par un diffuseur, Virginie Verrier, dont À 2 heures de Paris est le premier long métrage, s’est ainsi battue jusqu’au bout. Elle a récolté des fonds grâce à un crowdfunding et a monté sa boîte de production. Et elle a bien fait, car son film est un petit bijou de tendresse! Photo du film À 2 HEURES DE PARISVirginie Verrier, qu’on a interviewée, portait son projet et son héroïne Sidonie depuis plusieurs années. On ne voit pas souvent ce type de personnages de femme libre et singulière dans sa façon d’envisager la vie. Même si la réalisatrice ne revendique pas avoir réalisé un film féministe, À 2 heures de Paris a de fortes chances de renvoyer une image positive des femmes. Rendez-vous compte: Sidonie a eu sa fille à 16 ans, a brutalement quitté sa famille de notables et l’a élevé seule. Mais la réalisatrice tenait absolument à « porter un regard réaliste sur son personnage, à contre-courant des clichés faciles et montrer une célibataire qui ne soit pas en souffrance, ni solitaire avec sa boite de kleenex« .

Sidonie est devenue une femme épanouie qui ne craint pas le regard d’autrui. Son auteure lui a d’ailleurs symboliquement choisi le métier d’hôtesse de l’air « qui a longtemps incarné la liberté pour une génération de femmes« . Sidonie est donc une femme libre au sens où elle choisit ses amants, ne s’attache pas plus que cela et assume sa sexualité « en femme ni trash, ni nymphomane« . Erika Sainte, l’interprète de Sidonie, est magnétique et filmée amoureusement par la caméra.

« Parenthèse enchantée dans la Baie de Somme, À 2 heures de Paris se révèle une jolie surprise pleine de grâce. »

La jeune femme a une très jolie relation de confiance avec sa fille de 15 ans Lolo (Matilda Marty-Giraut). Là encore, pas de cliché opposant les deux. Même si Lolo a un côté trop raisonnable et éteint, à l’inverse de sa mère plus fantaisiste et désinvolte, qui attire toute la lumière à elle. Lolo n’en veut pas à sa mère de ne pas connaître son père, car même Sidonie ne le sait pas. Mais puisque c’est le vœu le plus cher de Lolo, elles partent ensemble en quête de l’autre ADN dans le village natal de Sidonie. Car tous les pères potentiels de la liste de Sidonie y sont encore. Oui, tous les cinq.

Pour le coup, il y a une forme de facilité scénaristique à envisager qu’il y en a eu cinq et qu’ils sont bizarrement restés dans le même village pendant 15 ans quand elle en est partie avec fracas. Assumant sa filiation avec Broken FlowersVirgine Verrier assure qu’elle connaît ce genre de personnes issues du milieu provincial middle class, qui ne sont jamais parties de leur village. Certes, les amants ont vieilli mais sont restés les mêmes. Attendaient-ils secrètement son retour? Photo du film À 2 HEURES DE PARIS
Grâce aux dialogues aux petits oignons et au ton volontairement plus léger qu’un pathos dramatique, À 2 heures de Paris tient la route. Il y a bien une petite baisse de régime au milieu, laissant le champ à la mise en valeur des paysages et de la lumière si particulière de la Baie de Somme. Dans sa façon de filmer les visages de ses personnages au plus près, Virgine Verrier se dit « contemplative des gens comme des paysages, et aime imaginer des choses en regardant des visages« . Et c’est exactement ce que provoque À 2 heures de Paris. On éprouve en effet la curiosité d’imaginer qui était Sidonie à 16 ans. et de savoir si c’est son destin qui a fait ce qu’elle est aujourd’hui, ou si elle possédait déjà sa singularité à l’époque. On a envie de comprendre sa vie et sa famille et de connaître le rôle que chacun de ces hommes a tenu auprès d’elle à l’époque. Bien sûr, les retrouvailles laissent des indices.

Certains penseront sans doute que cinq relations simultanées avec des mecs aussi différents, ça fait beaucoup pour une gamine de 16 ans. Mais on a tous connu une jeune fille qui ressemblait à Sidonie, qui fascinait et dont on enviait secrètement la liberté et les choix. Clope au bec, parfois hautaine, Sidonie s’est sans doute forgée une carapace pour éviter que des plaies mal fermées se rouvrent. Car en devenant mère si tôt, dans un contexte familial peu propice au dialogue, elle n’a vraisemblablement pas achevé sa mue adolescente et a été projetée trop tôt dans le monde des responsabilités. Photo du film À 2 HEURES DE PARIS
Quant au casting masculin de À 2 heures de Paris, il se devait d’être à la hauteur. Certains hommes apparaissent vulnérables et tendres, heureux de revoir Sidonie et n’osant pas forcément poser la question de l’âge de Lolo, de peur de la réponse. Fred Testot est Bruno le garagiste et Frédéric Pierrot Henri le châtelain. On croise aussi les épouses de deux candidats à la paternité, dont les réactions sont originales et hilarantes. Là encore, la réalisatrice et sa coscénariste Shirley Bousquet -qui incarne Jeanne, la vieille copine de Sidonie- ont veillé « à montrer des femmes intelligentes dont les réactions sortent des sentiers battus de la jalousie« . Les personnages sont attachants et on a envie que notre candidat préféré gagne la timbale. Parenthèse enchantée dans la Baie de Somme, À 2 heures de Paris se révèle une jolie surprise pleine de grâce. Gageons que le film replongera le spectateur empathique et attendri dans la jeunesse de ses 16 ans, tout en l’interrogeant sur ses propres choix d’adulte.

Sylvie-Noëlle

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Note des lecteurs9 Notes
Titre original : À 2 heures de Paris
Réalisation : Virginie Verrier
Scénario : Virginie Verrier, Shirley Bousquet
Acteurs principaux : Erika Sainte, Shirley Bousquet, Fred Testot, Thierry Frémont, Frédéric Pierrot
Date de sortie : 27 juin 2018
Durée : 1h20 min
3.5

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Rédactrice

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Note finale

  1. Film sans réel interêt, l’histoire est plate, la fin décevante (retour a la case départ quel intérêt cette femme ne mûrie pas), les acteurs interprètent bien mal leur rôle et enfin si j’avais voulu voir un reportage sur la baie de somme je me serai adressé à son office du tourisme. Premier essai de cette réalisatrice mais certainement le dernier pour moi.

    1. Bonjour tous les goûts sont dans la nature …les premiers films sont souvent imparfaits, mais l’histoire de la quête du père est intéressante et je ne suis pas d’accord avec vous: elle évolue et peut avancer, mais c’est surtout sa fille qui cherchait des réponses. Et puis, il y a beaucoup de naturel dans le jeu. A bientôt

  2. J’ai plutôt apprécié ce film mais j’ai trouvé le personnage de Sidonie absolument détestable. On croirait voir une enfant de 5 ans à moitié élevée. J’avoue que c’est un aspect du film que j’ai peu compris. Qu’elle le soit avec les gens du village, les parents de Bruno, son père… Oui pourquoi pas. Mais Jean-Paul, ou sa mère… Etre libre mais au prix de sa bonne tenue je vois pas l’intérêt du personnage