Le cadavre mutilé d’une jeune femme est retrouvé à son domicile. Pas d’effraction, pas de témoin : le crime est parfait. L’enquête est confiée au commandant Lassalle, un flic expérimenté et solitaire, détruit par la mort de sa femme. Alors que d’autres meurtres tout aussi sanglants sont perpétrés, Lassalle est intrigué par la personnalité d’un aveugle, Narvik. Mais l’alibi du suspect est plausible et son infirmité le met hors de cause. Un étrange duel, telle une partie d’échecs, s’engage alors entre les deux hommes.
Note de l’Auteur
[rating:5/10]
• Date de sortie : 7 mars 2012
• Réalisé par Xavier Palud
• Film français
• Avec Jacques Gamblin, Lambert Wilson, Raphaëlle Agogué
• Durée : 1h34min
• Titre original : À l’Aveugle
• Bande-Annonce :
[youtube]http://www.youtube.com/watch?v=kRptMQHoU1g[/youtube]
Je vais commencer cette chronique par un aveu : j’ai eu un mal fou à mettre une note à ce film. En effet, depuis que je suis sorti de la salle, je suis tiraillé entre le sentiment d’avoir vu un film policier fort honorable avec un twist moins prévisible que la bande-annonce ou l’affiche laissaient à penser et le sentiment d’avoir vu un film regroupant la plupart des tics désagréables assez courants dans l’audiovisuel français.
En effet, la première moitié du film a un sale goût de déjà-vu avec la quantité de séries policières que le PAF nous sert depuis des années (bien que l’on soit plus proche des séries France 2 ou Canal+ que de Julie Lescaut ou Navarro) : on s’ennuie un peu, la photographie est quelconque et le commissariat français fait administration sclérosée avec ces bureaux cloisonnés et relativement silencieux (le téléphone ne sonne que pour l’affaire en cours…) en comparaison avec le foisonnement de son homologue américain dans la plupart des films qui est sans doute moins réaliste mais nettement plus punchy, surtout quand c’est couplé avec une réalisation plus nerveuse. De même, on retrouve également un défaut souvent présent dans le cinéma français dans l’interprétation : le côté un peu sur-joué, héritage d’une culture théâtrale bien ancrée. L’ensemble du cast ne joue pas foncièrement mal, mais joue souvent clairement trop, notamment mal servis par des dialogues trop écrits et parfois peu naturels : il ne suffit pas d’ajouter des injures occasionnelles dans les répliques pour en faire du langage parlé naturel.
En 1h30, À l’Aveugle développe des personnages et une intrigue relativement intéressants mais souffre du poids d’une culture cinématographique française plus littéraire que populaire dans le domaine des films policiers ou d’action.
Toutefois, À l’Aveugle a également des qualités indéniables. Le personnage principal de Lassalle est bien écrit et l’interprétation que propose Jacques Gamblin de ce flic torturé, suicidaire et râleur est assez pertinente. En face de lui, Lambert Wilson est un aveugle et un assassin très crédible (je ne déflore aucune surprise : la bande-annonce comme l’affiche le disent). D’ailleurs, outre son twist assez intéressant et qui est clairement captivant sur le dernier tiers du film, les moments les plus intéressants de ce métrage sont les rencontres entre les deux personnages : les acteurs disposent du charisme nécessaire et leurs répliques, bien que peu naturelles, sont cinglantes (et volontairement amusantes parfois). En contrepartie, le reste de la distribution est effacée, voire maladroite. Par ailleurs, la réalisation ne fait certes pas de miracle mais quelques scènes sont très bien réglées : la scène où le premier suspect est appréhendé n’a rien à envier aux scènes du même genre chez nos amis américains par exemple et les scènes de combat avec le personnage de Lambert Wilson sont également très bien rendus.
Ce film est certainement plus adapté au format télévisuel qu’aux salles obscures finalement, mais il dispose d’une histoire correcte et de bons côtés qui le rendent certainement bien moins inintéressant que bon nombre de films d’outre-atlantique trop longs ou trop convenus. Il manque un peu d’audace comme on a pu la constater récemment dans Les Lyonnais d’Olivier Marchal par exemple (mais sans en faire un énième ersatz de Braquo non plus). En 1h30, À l’Aveugle développe des personnages et une intrigue relativement intéressants mais souffre du poids d’une culture cinématographique française plus littéraire que populaire dans le domaine des films policiers ou d’action. Si en mon sens il ne faut pas forcément oublier complètement cette spécificité culturelle pour copier le cinéma américain, il faudrait néanmoins que les futurs films policiers français digèrent enfin l’ensemble de ces influences pour en sortir une nouvelle norme, que j’espère de meilleure qualité.