Arizona Dream

ARIZONA DREAM, entre rêve et réalité – Critique

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Avec cette première et unique incursion sur le sol américain, Emir Kusturica réalise un film où domine l’onirique. Le réalisateur s’échappe, assouvit son besoin d’espace et son envie de repousser les frontières…

ARIZONA DREAM raconte l’histoire d’Axel , un orphelin de 20 ans, vivant davantage dans un monde bercé d’illusions et de poissons volant, qu’à New York où il vit. Parfois, il s’évade par l’esprit sur la banquise en Alaska, inaccessible et vierge. Leo Sweetie, vendeur de voitures, l’invite dans sa petite bourgade, à l’occasion de son mariage. Depuis la mort des parents d’Axel , Leo se sent responsable de lui et aimerait que son neveu reste en Arizona pour rencontrer l’amour de sa vie et reprendre son magasin d’automobiles d’occasions. Tandis qu’il apprend ce dur métier, Axel rencontre Elaine, une veuve fantasque qui ne rêve que de voler. La belle-fille d’Elaine, Grace, s’intéresse aussi au jeune garçon… Sur place, Axel va se retrouver balloté entre ses propres rêves, ceux de deux femmes, ceux de son oncle…

Au cours d’un voyage hypnotique, Axel incarné par Johnny Depp, rencontrera sur son chemin des personnages aussi dingues que décalés : Leo Sweetie, joué par Jerry Lewis (incarnerait presque à lui seul le rêve américain), souhaiterait empiler des voitures jusqu’à toucher la lune. Elaine Stalker personnifiée par Faye Dunaway, ranime, sans le savoir l’obsession des « fous volants », avec pour but de gagner la Papouasie où « une femme peut baiser avec des garçons ». Avec son désir de séduction passionné, elle combat le temps. Lorsque Kusturica filme une scène avec humour, les acteurs parviennent à manier un jeu dépravé. Lors des moments tragiques, ils touchent la perfection. Faye Dunaway jongle à merveille avec le pathétique, Jerry Lewis s’emploie habillement au tragi-comique. Parfois drôle, parfois déprimant, mystérieux et minutieux, ARIZONA DREAM frôle la perfection.

ARIZONA DREAM, ou la définition parfaite du cinéma d’Emir Kusturica. L’œuvre mêle le rêve à la réalité, sans jamais les dissocier.

ARIZONA DREAM, où la définition parfaite du cinéma d’Emir Kusturica. L’œuvre mêle le rêve à la réalité, sans jamais les dissocier. Comme dans Mulholland Drive de David Lynch, le film explore le songe sous toutes ses facettes, du désir aux cauchemars, de l’espoir aux désillusions… Le cinéaste filme le rêve américain, ou du moins en fait le bilan avec ses fantasmes abîmés. Comme son (ou ses) héros, le metteur en scène ne cesse de vouloir échapper aux contraintes de l’espace et du temps, s’identifiant à ces simulacres.

Tourné à New-York, en Alaska et surtout à Douglas en Arizona, la plus américaine des œuvres d’Emir Kusturica fait du désert un personnage à part entière et un lieu central du film. Ce paysage si photogénique au cinéma devient ici l’échappatoire imaginaire d’un cinéaste en quête de liberté (scénaristique et stylistique). Ces grandes étendues désertiques, arides, poussiéreuses, ses cactus… A la fois oppressant par sa sécheresse et synonyme d’évasion par son immensité, c’est ici même que les personnages ont rendez-vous avec leur destin, sous un ciel nuageux couleur sable. Avec ces tons ocres et chauds, sa photographie lumineuse, ses plans larges, le réalisateur serbe rend hommage à Hollywood et ses westerns.

Enfantine, espiègle, cette balade imaginaire rappelle le cinéma américain de années 70 (Coppola, Scorsese…), sa mise en scène soignée et distante, et ses travellings sobres. La bande-son signée Goran Bregovic et interprétée par Iggy Pop est aussi somptueuse qu’un peu trop omniprésente. Les images aussi belles soient-elle manquent trop souvent de souffle. La musique se détache trop du récit, jouant la surenchère. Au fur et à mesure que l’histoire se déroule, les personnages finissent par se laisser entrainer par leur destin tragique, et se retrouvent seuls au bord du précipice. Au final, la magie de ce conte finit par se dissiper et briser ce doux ARIZONA DREAM.

Deux fois lauréat de la Palme d’Or à Cannes, Emir Kusturica est un de ces cinéastes inspirés au style affuté. Son amour du cinéma classique, il le distille au travers de ces films, de Fellini à Hitchcock, en passant par Martin Scorsese. Dans celui-ci, le cinéaste s’inspire de Ragging Bull, notamment lors de la scène où Vincent Gallo récite un passage du film dans le cinéma. A la fois merveilleux et inconstant, ARIZONA DREAM, véritable icône des années 90, mérite largement sa réputation. Un voyage puissant, créatif et poétique.

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Tom Johnson
Tom Johnson
Membre
9 juin 2015 11 h 31 min

Une critique très intéressante et un point de vue personnel… On y perçoit en effet l’amour du réalisateur pour le cinéma en général, à travers les références mentionnées dans cet article.

Cependant je suis, je dois le dire, un peu en désaccord avec le paragraphe débutant par « ARIZONA DREAM, ou la définition parfaite du cinéma d’Emir Kusturica ».

Après avoir vu ‘Underground’, surtout ‘La vie est un miracle’ ou même ‘Chat noir, chat blanc’, je pense qu’Arizona Dream est plutôt un film unique et un peu singulier dans sa filmographie.

Certes, c’est l’une des facettes du réalisateur, mais si je voulais chercher une définition « parfaite » de son œuvre (ce qui est, en soi tout un programme !), je chercherais personnellement davantage de ce côté: http://www.mecavnik.info/wsw/index.php?p=197. Voici, à mes yeux, l’âme vibrante du cinéma de Kusturica.

Chacun sa perception, c’est certain !

Polly
Polly
Invité.e
8 juin 2015 13 h 30 min

La comparaison avec Mullholland Drive, vraiment?Il fallait metionner Vincent Gallo comme un des acteurs principaux, il etait aussi genial que les autres!

Georgeslechameau
Georgeslechameau
Membre
8 juin 2015 13 h 24 min

Axel – Alex, Il s’agissait d’une coquille sur les deux premières mention du nom; c’est corrigé.

Sinon, si vous n’êtes pas d’accord, votre avis ne peut qu’être complémentaire de celui d’Anna, vu que vous êtes toutes deux assez fan du film ! Faites-en nous part !

polly
polly
Invité.e
8 juin 2015 13 h 10 min

Mon film prefere!Je suis pas d’accord aver beaucoup de choses dans cent article…Avant tout, le personage principal s’appelle AXEL, pas Alex

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