BLADE RUNNER 2049

BLADE RUNNER 2049, réussite quasi-parfaite de Denis Villeneuve – Critique

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L’attente est terminée. L’un des films les plus désirés de 2017 est finalement arrivé dans nos salles, s’apparentant d’ores et déjà comme une réussite, non sans quelques imperfections néanmoins.

L’exercice était périlleux. S’emparer de la suite d’un mythe cinématographique de la science-fiction, plus de 35 ans après sa sortie d’origine. D’autant plus lorsque l’on s’appelle Denis Villeneuve, dont la carrière atteint un point culminant après une suite de longs-métrages aussi différents dans leurs genres que qualitatifs. Le risque de tout perdre est immense. Sortir enfin de la projection et devoir écrire sur le film avec un recul de quelques heures seulement est tout autant délicat.

Car le Blade Runner de 1982 s’est forgé une réputation et des ajustements considérables en terme de rythme et de narration, avec le temps. Le temps, dans BLADE RUNNER 2049, peut parfois sembler un peu long, ce qui est à la fois un point salutaire et une tare. En voulant rendre un hommage sincère à la lenteur envoûtante du film originel, Denis Villeneuve étire tous ses plans, ce qui fonctionne à merveille lors de séquences de déambulations visuellement fascinantes, à pied ou dans les airs, mais un peu moins lors de certains dialogues en champ/contre-champ qui auraient gagnés en intensité si une coupe était intervenue plusieurs secondes avant.

D’autant qu’en comparaison avec la version final cut du premier film qui ne dépassait même pas les deux heures, la version cinéma de cette séquelle est d’une durée tutoyant presque les trois heures (2h43). La première impression en sortant de la salle est donc la suivante : nous venons d’assister à un très gros morceau, parfois déstabilisant, mais qui nous aura aussi offert de beaux moments de cinéma, tout en rassasiant l’amoureux de 1982.

Photo du film BLADE RUNNER 2049

Si le novice de l’univers Blade Runner pourra largement apprécier le spectacle, à condition de ne pas s’attendre à un film d’action spectaculaire, ce qu’il n’est pas, les fans seront gâtés, tant le film va bien plus loin que d’offrir de simples clins d’œils. L’histoire développée 30 ans après les événements opposant la Tyrell Corporation aux Nexus 6 s’étant rebellés, est ici prolongée sous un angle bien plus intime et sensible, jouant sur la fibre émotionnelle des personnages et la nostalgie des spectateurs.

En parlant de nostalgie, ce BLADE RUNNER 2049 semble s’attarder tout particulièrement sur tous les éléments qui constituent notre monde ou qui l’ont constitué, de l’art aux divertissements et qui ont désormais disparus du Los Angeles 2049 dépeint ici. Un Los Angeles différent, qui a évolué bien que toujours aussi pollué et en ruines, mais étrangement tellement semblable au travail remarquable effectué par Syd Mead il y a plus de 30 ans. Car l’un des tours de force de Denis Villeneuve est d’avoir réussi un prolongement esthétique de l’original tout en proposant quelque chose de nouveau. Troublant.

Aussi, ce qui est délectable pour le connaisseur une fois de plus, c’est la manière dont le film fait écho à l’original, via des personnages, des objets ou une musique. On pense aux premiers cartons du film définissant le terme « Replicant », puis au tout premier gros plan, nous dévoilant un œil vieilli d’abord fermé qui va ensuite s’ouvrir… Un côté fan-service évidemment assumé mais très discret, qui ne viendra jamais s’imposer pour rompre la narration et ainsi faire sortir de l’histoire son public.

Sans rien dévoiler de cette dernière, il est à noter qu’elle suit son cours avec parcimonie, dévoilant ses fausses pistes et ses rebondissements un brin laborieusement dans la dernière partie. Un scénario imparfaitement construit donc, mais heureusement suffisamment prenant et recelant ce qu’il faut de mystère pour remplir son contrat jusqu’à un final assez audacieux, surtout dans la mise en scène. Les mélomanes reconnaitront l’hommage envers une scène devenue emblématique, heureusement assez subtil.

Blade Runner 2049 ne surpasse pas son aîné, mais s’impose tout de même comme une œuvre de science-fiction totale.

L’agent K, interprété par un Ryan Gosling une fois de plus monolithique (bien justifié ici), rentre chez lui après une journée de travail et interagit avec l’intelligence artificielle qu’il possède, jouée par la jolie Ana de Armas. Une occasion intéressante pour l’actrice de révéler une profondeur de jeu que ses précédents rôles ne lui permettaient pas. De primes abord anodines, ces séquences se multiplient et contribuent à créer un lien emphatique se développant toujours plus entre le couple et sensibilisent le spectateur à un hologramme doué d’émotions.

La froideur générale de l’ensemble, malgré une photographie somptueuse de Roger Deakins, variant les tons et les couleurs des zones traversées, tend à se réchauffer lorsque Rick Deckard sort de son ombre et donne du whisky à boire à son chien. Malgré sa présence écourtée et un humour bien plus développé que par le passé, le personnage culte apparaissant sous les traits d’Harrison Ford occupe une place centrale dans l’histoire. Concernant ce dernier, on saluera l’intelligence de Villeneuve d’avoir judicieusement évité de répondre à la fameuse question du replicant (en est-il un ou pas), tout en la soulevant une nouvelle fois, laissant libre cours à de nouvelles spéculations. Chacun se fera son propre avis.

Enfin, le son est omniprésent dans BLADE RUNNER 2049. La musique est très proche du score que Vangelis avait composé en 1982, ayant recours aux mêmes instruments électroniques parfois, mais beaucoup plus grave. Nous sommes dans quelque chose de bien moins aérien et poétique, qui peut s’avérer un brin lourdingue par moments. Le nom de Hans Zimmer au générique, ayant remplacé Jóhann Jóhannsson, n’y étant sans doute pas étranger. Une semi-déception tout de même.Photo du film BLADE RUNNER 2049Œuvre de science-fiction totale, mais certainement pas meilleure que l’original, BLADE RUNNER 2049 demeure un tour de force de la part de Denis Villeneuve, qui s’en sort avec les honneurs. Certes, l’un des meilleurs metteurs en scène actuel n’a pu réaliser un sans faute, mais qui pouvait objectivement s’y attendre ? Les quelques défauts grignotant le résultat final semblent surtout nés d’un petit surplus de générosité et d’amour envers le film réalisé par Ridley Scott en 1982. Difficile à blâmer donc, même s’il apparaît indéniable que le rythme particulier et la durée du film pourront en laisser plus d’un sur le carreau. Pour les autres, le cadeau est sacrément appréciable.

Loris Colecchia

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Note des lecteurs15 Notes
Titre original : Blade Runner 2049
Réalisation : Denis Villeneuve
Scénario : Michael Green, Hampton Fancher
Acteurs principaux : Ryan Gosling, Harrison Ford, Ana de Armas, Jared Leto, Robin Wright
Date de sortie : 4 Octobre 2017
Durée : 2h43min
4
Humain

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Flegelei
Flegelei
Invité.e
18 octobre 2017 4 h 02 min

Pour les intéressés, voici mon analyse de Blade Runner 2049. Allez-y tranquille.. je n’en ai pas trouvé sur le net des aussi approfondies, à mon grand désarroi…Enjoy..

La première image est l’oeil du Héro qui s’ouvre. Exactement, le même principe que dans Alien Covenant, à ceci près est que David était plus un anti-héro qu’autre chose. Cependant, tous 2 sont des Androïdes.
Dès le début du film nous sentons que Ridley commande le fond du film et qu’il n’a laissé que la forme à Villeneuve.
Pourtant, c’est une réussite sur les 2 tableaux.
En effet, sous des airs de polar SF atmosphérique avec une intrigue tout au plus correct, se cache l’oeuvre d’un Ridley Scott en plein questionnement sur l’humanité. C’est pourquoi sera clairement traité dans l’oeuvre une réflexion sur l’Amour, la Création, l’IA, l’Art et la Religion. En gros…Strictement les mêmes sujets de fond qu’Alien Covenant..La similitude ne s’arrêtant pas la car l’humanité a encore une fois, flingué la planète, et est en majorité obligée de vivre dans des colonies en dehors de la terre.
L’ambiance est celle des mornes plaines, d’un règne des Hommes passé, du monochrome et des natures mortes.
Pour les connections directes avec Covenant, outre ce fameux Oeil, il y a en premier lieu le passage avec des statues de simili-Ingénieurs enfermées dans du verre que l’ont voit au même moment où la secrétaire de Wallace raconte que l’Humanité c’est installée dans des colonies en dehors de la Terre.
Ensuite, la connection avec Ozymandias de PB Shelley quand le héro va chercher Deckard et marche seul dans le désert, avant de se trouver face à face avec une tête de statue à moitié cassé, puis, finir plus loin entre les jambes tronquées par la caméra d’une statue féminine.
Pour le reste les liens ne se font réellement que sur le fond des sujets traités par les 2 films.
Cependant, la quête de Wallace à retrouver l’enfant Replicant, cache grossièrement son désir de ressembler à ses créateurs, en voulant absolument obtenir le secret de la création en copiant le système de reproduction humain. Plus loin que cela, on ressent une détresse énorme des Androïdes dans leur incapacité à trouver l’Amour. Que ça soit celui d’un Père, d’une Mère, d’un Enfant, ou celui du Couple.
Wallace comme David de Covenant est frustré de ne pouvoir ni se reproduire, ni aimer et être aimer. Il se contente simplement de recréer ce qui lui est accessible en tant que Robot évolué, donc créer des machines sans âmes qui ne peuvent au mieux que simuler des émotions. Seul les anciens modèles, donc les Replicants semblent en avoir le secret et ont été mis à mort par les Hommes pour cela.
« Ô vous les puissants, Contemplez mes oeuvres et soyez en affligé » dirait David, et le passage dans le désert n’est pas anodin à ce propos..
On y trouve aussi un puissant message de la création au sens divin, car si Wallace ne peut recréer son créateur, il n’hésite pas à paraphraser la Bible en tentant clairement de se positionner en Dieu tout puissant dominant les Hommes et les Machines. Comme David, il y a un désespoir de ne pouvoir qu’entrevoir ce qu’est que d’être humain et de ne pouvoir créer et procréer.

Si on devait tirer une conclusion du message sur la Création de Blade Runner et de Covenant, il est clair que l’auteur la voit comme l’échappatoire absolu face à la mort.. Qu’elle serve la reproduction de l’espèce, l’élaboration de technologies divers ou d’une oeuvre d’art, elle seule assure l’immortalité face à l’angoisse du néant et permet de projeter une partie de soi au delà de son temps de vie biologique.
On pourrait même y constater le peu de trace de sympathie envers l’Homme que Ridley laisse entrevoir, qui fait comparer une oeuvre d’art à l’Homme. Mais ici et maintenant, l’art est devenu mauvais…
Plus loin, c’est aussi à se demander si R.S. défie Freud qui soutenait que la Libido s’opposait principalement à la pulsion de mort, en lui répondant que ce n’est pas celle-ci qui contrecarre cette angoisse du néant, mais bien l’espoir de pouvoir pro-créer/créer.. Ne plaçant de ce fait la Libido qu’en simple vecteur de la Création. Le scénariste veut subtilement nous montrer que seule la Création nous donne accès à l’immortalité en s’opposant à la pulsion de mort.

Au plus haut degré, la Création est détenu par les Dieux, d’où la volonté de Wallace et David de s’approprier et s’identifier à ceux-ci, car tout comme eux, la technologie a fait d’eux des éternels. Malgré tout, ils ne peuvent donner la vie autrement que par la création technologique et artistique. Il y a un paradoxe net qui se crée chez ces robots car si la Création sert de frein aux pulsions d’anéantissements, eux qui sont éternels (ou presque), n’ont dans l’absolu plus besoin de créer. Et pourtant..On retrouve ici une image du concept de sublimation des instincts qui est depuis fort longtemps considéré comme source de la création artistique chez l’Homme.
Par ce message Scott, s’identifie un peu à ces 2 Droïdes à la folie créatrice sans limites, mais surtout invente une nouvelle mythologie plaçant l’Artiste absolu à l’égal de Dieux et faisant de Dieux un Artiste.

La cité de Blade Runner est Los Angeles et tous les bâtiments sont rectilignes, il y a des symétries et lignes droites partout, aucune folie n’est présente dans ce New Angeles de 2049. Tout cela est clairement à l’image d’un système de pensée masculine où la rectitude règne en maître. Seul quelques hologrammes de femmes, au mieux, et des prostitués, au pire, sont présents anecdotiquement pour garder une trace de cette féminité manquante à l’équilibre de l’humanité.
Nous retrouverons seulement les traces de cette fusion du masculin et du féminin dans l’architecture et les décors, au début du film, dans la maison du Replicant et à la fin chez Deckard avec nombre d’objets d’art présents à l’écran. Seulement on sent bien que ces endroits appartiennent au passé. Il y a comme dans Covenant un côté nihiliste très prononcé. L’Homme a détruit sa planète et son âme, et son salut semble ne pouvoir résider que dans l’anomalie d’une technologie qui peut-être les remplacera (les Replicants). Pourtant celui ci ne tient pas à se faire remplacer et comme les Ingénieurs, ils chercheront donc à détruire leur création trop similaire et humainement/technologiquement supérieure au modèle d’origine. Affront du fils envers le père. C’est un peu l’histoire d’un Oedipe avorté où la mère n’est plus de la partie.

Au sujet de la référence à Ozymandias quand le Héro arrive dans le désert, nous voyons en premier lieu une statue de femme géante sur fond de pyramide et temple égyptien avec des statues de leurs divinités. Puis, quand le héro avance dans cette sorte de reprise visuel du sonnet de Shelley faite de statues de femmes géantes au corps nues et poses difformes pour finir face à des ruches d’abeilles, nous nous devons de nous poser la question du pourquoi.
Pour ma part, je pense que c’est très clair, comme dans Covenant, Mister Scott se sert de ce poème pour pointer du doigt les courants dictatoriaux majeurs de la civilisation moderne. Si dans Alien c’était la religion et plus particulièrement le Judaïsme qui en prenait dans les dents, dans BD 2049 c’est bel et bien le côté obscur du féminisme qui est pointé du doigt.
En effet, les statues des femmes à l’image de leurs homologues égyptiennes nous renseigne sur le fait que la civilisation antérieur avait divinisé la Femme ou du moins son apparat.

Rappel : Ozymandias PB Shelley

J’ai rencontré un voyageur venu d’une terre antique
Qui m’a dit : « Deux immenses jambes de pierre dépourvues de buste
Se dressent dans le désert. Près d’elles, sur le sable,
À moitié enfoui, gît un visage brisé dont le sourcil froncé,

La lèvre plissée et le sourire de froide autorité
Disent que son sculpteur sut lire les passions
Qui, gravées sur ces objets sans vie, survivent encore
À la main qui les imita et au cœur qui les nourrit.

Et sur le piédestal il y a ces mots :
« Mon nom est Ozymandias, Roi des Rois.
Voyez mon œuvre, vous puissants, et désespérez ! »

À côté, rien ne demeure. Autour des ruines
De cette colossale épave, infinis et nus,
Les sables monotones et solitaires s’étendent au loin. »

Ici les visages sont inexpressifs au possible, seul le corps de ces statues de femmes semblent vivant de part le jeu des positions de nu alambiqué. Cette société passé vénérait donc, non pas la femme, en tant qu’âme mais bien son apparat uniquement. L’allégorie de la ruche, système matriarcale par excellence, confirme le « diagnostique » sur le fait que Ridley veut nous dire que la société précédente est tombée car elle remplaça Dieu par le côté purement utilitaire de la femme du point de vue de la sexualité. C’est un peu le pique de l’auteur vis à vis des dérives du côté obscur du féminisme qui ronge notre société dite moderne..Un féminisme hyper sexué encore trop dépendant du regard de l’homme..(cf les talons aiguilles, symbôle de la toute puissance de la femme..dépendante du pénis)
On peut finalement constater que cette ancienne L.A. « Cité des Anges » était soumise à des divinités castratrices. Ce qui a engendré par effet rebond une société hyper-masculine qui a fini par marginaliser tout ce qui touche à la féminité sans trier le bon grain de l’ivraie. Nous le remarquons tant dans la mise en avant des prostitués que des hologrammes de Joy. D’ailleurs le dernier hologramme qui parle au héro prête à Joy les yeux d’un démon et le tente par ses artifices après qu’il se soit libéré de son 1er modèle et surtout libéré de lui-même…

Malgré cette critique acerbe de la dérive féministe, le message n’est pas négatif bien au contraire. Le scénariste tient juste à remettre la hutte à sacrifice au centre du village.
Et c’est grâce au miracle de l’Amour que la féminité réelle sera retrouver, celle-la même qui fît naitre la fille de Deckard obligée de vivre dans une prison dorée, isolée de ce monde désenchanté. Soi-disante malade, on comprend facilement qu’à elle seule, elle est porteuse de tout ce qui reste de la vraie féminité nécessaire à la fusion du principe masculin et féminin qui sera nécessaire au salut de cette humanité « augmentée ou non ». Mais l’air de son temps ne peut tolérer cette féminité et elle est donc obligée d’en être séparée pour le moment.
Concernant sa naissance miraculeuse, n’aviez-vous pas fait le lien avec Jésus? Marie ne devait et ne pouvait pas être enceinte..Et pourtant..Nous ne voyons plus les étoiles et la Lune dans Blade Runner, le ciel semble avoir abandonné les Hommes qui eux mêmes l’ont abandonné pour des fausses divinités. Wallace en arrive même à s’autoproclamer en tant que tel, pourtant aveugle et ne devant sa vision qu’à la technologie des Hommes dont il est aussi issu.
Il y a une conséquence lourde pour l’humanité à avoir voulu s’approprier le pouvoir divin de la création sexué. L’usage strictement utilitaire du corps des femmes qui sera suivi par l’appropriation de la création divine par la technologie a fini par faire fuir toute trace du divin. Le prix a payé en est la perte d’âme de l’humanité comme le montre Villeneuve par bien des aspects.
Heureusement, le sauvetage de cette humanité en détresse est annoncé au début du film quand le Héro fait face à l’arbre mort « de la connaissance ». Il trouvera une fleur colorée pourtant sans racines, symbole de vie hors contexte naturel standard, qui volontairement choque dans ce paysage de nature morte. Celle-ci le guidera vers les (et ses) racines mortes où il découvrira l’indice qui l’emmènera au cheval et aux os de cette Marie 2.0. Le côté sacré du squelette est mis en évidence par le fait que ses os ont été lavé comme ont le fait avec ceux des Saints et à l’image d’une relique religieuse.
Que les féministes se rassurent donc, ça fini bien pour la Femme car le concept de la femme réelle et de la féminité authentique est sauvé par un Jésus.. au féminin!
Ridley Scott fait encore et toujours très fort avec son usage de la symbolique où il arrive en mêlant images, mots et musique à raconter plusieurs histoires en même temps. Avec ce film, il transpose une partie de la Bible dans un futur proche et crée comme dans Covenant une nouvelle mythologie.

Pour le Héro, il sera principalement présent pour soulever la problématique de l’amour et de l’IA. Ainsi il connaitra les problèmes de l’amour avec un hologramme, qui n’est principalement que le reflet de sa volonté et de son anima. Et nous comprendrons plus tard qu’il ne connaitra que le vrai amour avec une autre Replicant ou Humaine (le doute est volontairement laissé) quand il perdra son amour virtuel et se délaissera des illusions de la volonté et de l’ego.
On retrouve, à ce sujet, le côté égoïste et surtout nihiliste sur l’existence humaine qui nous dit que l’autre n’existe pas, que ce n’est qu’illusion et support à nos besoins primaires. Ainsi, son histoire d’amour avec son IA holographique est basé entièrement la-dessus, elle n’est que projection de ses désirs..La société encourageant cela en faisant de ce travers un business..
Plus encore, c’est son désir de trouver une famille, un Père, une Mère qui le fera persévérer outre la raison dans sa quête.

Et enfin, la question sur la conscience, l’âme via les souvenirs, qui sommes nous, qu’est-ce qui fait de nous ce que nous sommes, l’authenticité… Ici, un souvenir implanté active l’affect du héro, pourtant ça n’est pas le sien, mais ce souvenir est réel, et donc sa réalité apporte l’authenticité de l’existence propre à l’être humain dans son esprit de robot. L’auteur semble soutenir que les souvenirs réels font notre personnalité futur contrairement à des souvenirs programmés. la conscience est pour R. Scott lié à la qualité des souvenirs et la capacité à les intégrer.
Sieur Scott pousse ici le débat sur l’IA vers une direction de la conscience lié à l’affect et la création.
Le cheval étant le véhicule de par sa symbolique qui le fera passé de « l’autre côté » et se trouver lui-même en trouvant la fille de Deckard.

Pour la surface du film, rien à dire si vous acceptez le rythme lent et atmosphérique. La musique et les images sont d’une qualité exceptionnelle et la cohérence de l’intrigue est à la hauteur d’un bon polar SF. De plus, c »est aussi une excellente suite de Blade Runner premier du nom.
Maintenant, comme ce film est lié sur le fond à Alien Covenant, je dirai que ces films sont indissociables pour en comprendre toute l’essence. Car si sur la forme, il faudrait logiquement regarder les 2 Blade Runner à la suite, il faudra surtout sur le fond se plonger dans Covenant et ce film pour cerner l’immensité de l’oeuvre de Ridley Scott. Villeneuve n’est que le messager de quelque chose de plus grand et je vous invite à lire mon analyse de Covenant afin d’y voir plus clair.
Dans tous les cas, nous avons affaire ici à un chef d’oeuvre dystopique de très haut-niveau, à ne surtout pas manquer tellement cela se fait rare..

Yann
Yann
Invité.e
5 octobre 2017 21 h 57 min

Merci et bravo pour cette première analyse, je la partage sur presque tous les points. Cette suite commet peu d’erreurs.L’écueil le plus rédhibitoire du syndrome « Starwars 7 » a été évité : le film développe une intrigue autonome, la créativité y respire sans étouffer les codes d’un univers qui, après 35 ans de visionnages et de spéculations, nous est parfaitement familié. Je suis moins sévère que vous concernant d’ailleurs l’un de ses codes majeurs : la partition sonore, que j’ai beaucoup appréciée et que je réécoute avec bonheur en écrivant ces lignes!
Concernant les quelques longueurs liés à la réitération d’un rythme lent de narration, je souhaitais apporter une critique un peu différente de la vôtre : quelques scènes de dialogue méritaient d’être coupées en effet… mais ce que j’ai attendu et qui n’est semble-t-il n’est pas arrivé, ou en tout cas pas avec la même intensité que dans le premier Blade Runner, c’est la brutale hausse de l’intensité dramatique qui culmine avec la fin en apothéose de Roy Batty. La lenteur du récit avait pour effet de plonger le spectateur dans une torpeur de moine contemplatif, dont il était littéralement arraché pour éprouver, comme Rick Deckard, la sublime souffrance du réplicant. Ce renversement du récit mythique à la vérité ontologique constitue à mes yeux la véritable prouesse du chef d’oeuvre de Ridley Scott, qui s’était appuyé sur de nombreux symboles, en particulier animaux. Ils foisonnent également dans le nouveau 2049, ce qui ouvre la perspective à de nombreuses analyses et interprétations ; je suis donc certain qu’en le revisionnant et en l’étudiant de plus près, je prendrai la mesure de toute la charge émotionnelle de sa très belle fin. Les symboles sont ainsi faits qu’ils ne deviennent « expérience » que lorsque l’observateur attentif en a épuisé toute la porté signifiante !

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