Photo (2) du film EL CAMPO

[critique] El Campo

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Affiche du film EL CAMPO

Elisa et Santiago se rendent avec Matilda, leur fille de deux ans, dans leur maison de campagne pour passer quelques jours de vacances et envisager les premiers travaux. Loin de la ville, Elisa commence à éprouver des sensations inconnues. Sa vie lui semble vide et dépourvue de sens. Entre elle et Santiago, la méfiance s’installe.

Note de l’Auteur

[rating:10/10]

Date de sortie : 13 juin 2012
Réalisé par Hernán Belón
Film argentin, italien, français
Avec Dolores Fonzi, Leonardo Sbaraglia, Matilda Manzano
Durée : 1h24min
Titre original : El Campo
Bande-Annonce :

El Campo est un film de Hernán Belón mettant en scène Dolores Fonzi et Leonardo Sbaraglia. Présenté au Festival d’Amiens 2011, il est sorti en salles françaises le 13 Juin 2012. Elisa (Dolores Fonzi) et Santiago (Leonardo Sbaraglia) achètent une maison de campagne et s’y rendent avec leur fille de 2 ans pour prévoir des travaux et passer quelques jours de vacances. Loin de la ville, Elisa commence à éprouver des sensations inconnues. Sa vie lui semble vide et dépourvue de sens. Entre elle et Santiago, une distance s’installe.

Ce film était en compétition des long-métrages au Festival International du film d’Amiens fin 2011. Le film y a remporté le Prix Spécial du Jury et Leonardo Sbaraglia a, quant à lui, reçu le Prix d’Interprétation Masculine pour sa performance dans le rôle de Santiago. Un prix largement mérité tant il nous absorbe dans ce rôle d’un père de famille qui essaie de tout faire (les travaux, soutenir sa femme, …) pour que la vie de sa famille soit belle. Une famille qui décide de changer d’air pour retrouver un sens à sa vie. Le passage de la ville à la campagne, un gros changement qui fait peur à Elisa, qui est assez réticente à la décision de son mari quant à ce déménagement dans une petite maison qui lui parait menaçante.

Alors qu’Elisa est en pleine crise, son mari décide de retaper la maison, délabrée, sombre et perdue : comme l’est sa femme. Cette maison est tout le symbole du film donc, dans une atmosphère très particulère. El Campo se traduit par une atmosphère quasi fantastique, qui emprunte les formes du thriller, voire du film d’horreur. Notamment à travers le personnage d’Elisa où  Hernán Belón va s’attacher aux détails car ce sont ces petits riens qui vont faire la détresse d’Elisa, sa peur de ce changement soudain. Il y aussi la peur de ne pas sentir vivre.

Une vie qui a perdu tout sens. Un mari qui n’arrive pas à comprendre la détresse et l’angoisse de sa femme. Non pas un cliché, et très loin d’être traité de la sorte, ce point du film sonne comme la solitude de l’homme face à sa vie, face à son destin. Une peur avec à côté les situations propres au genre de l’horreur avec une voisine au comportement bizarre assez intrusive à volonté, des bruits durant la nuit (les volets, les bois où la maison est placée, …).

Mais c’est beaucoup plus un thriller où Hernán Belón ne veut pas accentuer le rythme d’un coup et prend le temps d’installer son intrigue, de poser le caractère de ses personnages et une ambiance qui deviendra pesante. Hernán Belón prend aussi le temps d’y aller petit à petit, afin de traiter chaque situation dans sa totalité, où chaque moment, chaque dispute, chaque geste et chaque parole a son importance dans une crise. Ce film travaille la question du couple, mais avec les codes du film de genre (ce temps où l’un et l’autre s’épuisent et s’annulent dans leur enfant). Ils croyaient qu’avec ce changement ils allaient se retrouver mais il en est tout autre. Un couple proche de la rupture (avec les départs consécutifs des deux) mais aussi avec toutes ses disputes, pas spectaculaire, qui restent réalistes : une crise conjugale assez forte pour apporter de la tension au spectateur.

Photo (1) du film EL CAMPO

El Campo est une reconquête à la vie, dans les codes du film d’horreur avec une écriture soignée et minutieuse.

Il y a aussi cette volonté du mari de vouloir un autre enfant, mais dont elle n’est pas prête. Comme si cette naissance pourrait être le point de réconciliation entre les deux. Ils finiront par se réconcilier après s’être lâchés lors d’une fête. Cette tension évacuée avec des gestes simples, une attitude simple : s’amuser et vivre l’instant présent. Il y a donc une joie de vivre qui a disparue entre un couple qui semble très liés, mais qui se révèlent être plutôt du genre « les opposés s’attirent », avec les difficultés du couple à ses moments les plus durs. Le réalisateur argentin signe ici son premier long-métrage (1 moyen-métrage en 1997 suivi d’un téléfilm et de 3 documentaires) raconte son histoire avec brio, se plaçant dans la famille d’un Edgar Poe ou dans un héritage.

Entre réalisme et stylisation, entre film d’auteur et film de genre, El Campo renouvelle le « cinéma du couple ». Ce couple, à travers le changement d’air et la crise conjugale nous fait nous questionner sur le sens à donner à la vie. Le réalisme apporté à cette peur et cette crise de couple et la stylisation à travers ce côté film d’horreur dans un thriller où la tension est maître. Un scénario très appliqué où la psyché d’Elisa est secondaire, juste pour nous amener une base à cette ambiguïté de la vie, un sentiment d’avoir une vie dénuée de sens, d’intérêt.

Hernán Belón nous offre avec tout cela une mise en scène très propre, avec des cadrages incitant à la captivation et un jeu de couleurs très juste, très saisissant. Hernán Belón joue autant avec ses personnages qu’il joue avec ses spectateurs. On ne sait où il nous emmène et on est installé dans un suspense palpable durant tout le film. Il livre une dernière séquence qui termine l’horreur de la crise, du changement et de la perte du sens de la vie dans une fin très belle. Le couple s’est retrouvé et ils peuvent vivre heureux (je ne dirais pas s’ils repartent en ville ou non). Comme quoi, l’apocalypse destinée à notre vie ferait plus peur quand ça touche à l’amour ? Que sommes-nous sans amour ?

Finalement, El Campo est une reconquête à la vie, dans les codes du film d’horreur avec une écriture soignée et minutieuse. Hernán Belón prend le temps d’installer les détails et les bases de son histoire pour mieux capter l’angoisse de son personnage féminin. Cette angoisse qui mettra le feu aux poudres dans une crise conjugale à venir avec ce déménagement conséquent, qui nous questionne sur le sens de la vie. J’ai vu ce film au Festival International du film d’Amiens 2011 et j’ai été totalement conquis par ce film.

Photo (2) du film EL CAMPO

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