Todd Anderson, un garçon plutôt timide, est envoyé dans la prestigieuse académie de Welton, réputée pour être l’une des plus fermées et austères des États-Unis, là où son frère avait connu de brillantes études. C’est dans cette université qu’il va faire la rencontre d’un professeur de lettres anglaises plutôt étrange, Mr Keating, qui les encourage à toujours refuser l’ordre établi. Les cours de Mr Keating vont bouleverser la vie de l’étudiant réservé et de ses amis…
Note de l’Auteur
[rating:10/10]
• Date de sortie : 17 février 1990
• Réalisé par Peter Weir
• Film américain
• Avec Robin Williams, Ethan Hawke, Robert Sean Leonard,
• Durée : 2h08min
• Bande-Annonce :
De toutes les formes littéraires, la poésie est de loin la plus nébuleuse et la plus abstraite aux yeux du grand public. Véhiculant plus de clichés bucoliques sur la beauté des fleurs et le gazouillis des oiseaux que de vérités profondes, l’incompréhension générale a mal résolu cette énigme. Le cinéma ne s’y est pas sincèrement intéressé avant Le Cercle des Poètes Disparus, bien qu’un certain nombre de films antérieurs et postérieurs à celui-ci aient été poétiques en eux-mêmes. Peter Weir a donc palpé le sujet sur les bases d’un scénario original signé Tom Schulman. Il en résulte que la poésie n’est pas un genre littéraire, non. C’est une façon importante de placer l’œil et une façon de placer la jambe, c’est tout. Un regard et une démarche. Peter Weir ne s’y est pas trompé.
Mitan du XXème siècle, Etats-Unis. Le gotha. Ancien élève de la Welton Academy, John Keating revient y enseigner la littérature aux prochains piliers de la société. A ses méthodes audacieuses visant à les rééduquer par la poésie, les élèves de Keating répondent par la même audace de vouloir dessiller leurs yeux et vivre selon des idées contraires à leur éducation. Cependant, le carpe diem des poètes se heurte aux lois pratiques de la société conventionnelle. Dans ce grave affrontement, des rêveurs y laisseront par quantité leurs plumes d’albatros.
Dénonciation de l’arbitraire, apologie de l’indépendance, Le Cercle des Poètes Disparus infuse des valeurs irrésistibles. Le décor enchanteur de la Welton Academy avec ses lacs, ses forêts, ses oiseaux migrateurs et son parfum de mondanité britannique adoucit à peine la peau dure de la mentalité clanique. Un être est un maillon, les maillons font la réputation, la réputation fait l’école, l’école fait l’élite. Quiconque sort du rang de la pudibonderie, de l’humilité et du prestige collectif se verra écrasé par le système. John Keating demande à ses élèves d’être enfin Dieu ! D’apporter leurs rimes et de vivre intensément. Comment pourrait-il ignorer qu’il forge des électrons libres au destin périlleux ?
Robin Williams éclaire de l’intérieur ce mentor facétieux, incisif et discret dans les mains duquel se forme une fervente génération de contestataires. L’acteur est connu pour sa dextérité à passer du rire aux larmes, il représente ici un idéal de pédagogie. Sa petite tribu de disciples, avec en son sein un Judas, suscite la tendresse du spectateur comme tout œuf qui éclot. On retiendra la vulnérabilité d’Ethan Hawke pré-pubère et la sensibilité de Robert Sean Leonard, le martyr de cette communauté alternative d’apprentis orateurs. L’histoire se termine nécessairement par une tragédie. Les poètes ne brisent pas leurs chaînes. Les poètes dénoncent leur mauvais maître. Les élèves plient sous la correction des matons de l’élite. Pourtant, sans emprunter les sentiers du misérabilisme ni ceux de l’utopie béate, le film lègue un espoir aux fortes têtes : assumez vos têtes ! dit-il. Il n y a pas de poésie sans armes, armez-vous ! Sortir du rang se mérite ! Méritez votre indépendance de ton ! Boxez ! La défaite de Neil Perry, ce martyr étouffé par la morgue paternelle choque par sa vérité : muet de peur devant son conservateur de père, ce poète sans arme c’est-à-dire sans Parole, se détruit lui-même. Peter Weir a compris une chose que Shakespeare, Rimbaud, Alexandre Pouchkine et leurs frères ont comprise avant lui. La timidité ne sert à rien.