Depuis plusieurs années, Martin Scorsese n’est plus que l’ombre de lui-même, une ombre allant de production en production avec une saveur, un talent, à peine palpable (le pâle remake Les Infiltrés, le décevant Aviator, le très mitigé Gangs Of New-York pour ne citer qu’eux). L’époque Scorsese / De Niro s’est envolée et a laissé sa place à la collaboration Scorsese / Di Caprio qui a bien du mal à faire ses preuves et à mettre tout le monde d’accord. Et pourtant…
Aller voir un film comme Shutter Island peut donc paraître comme une forme de sadomasochisme pour les fans de la première heure, des fans qui n’arrivent pas à retrouver le Scorsese d’antan. Et pourtant… Dès les premières secondes, nos appréhensions les plus tenaces se dissipent, laissant place à une adaptation à fleur de peau du roman du même nom de Dennis Lehane.
Dès les premières minutes, un charme vénéneux opère, charme qui se rapproche de l’excellent Les Nerfs A Vif avec sa montée en puissance, son crescendo qui nous cloue au fauteuil jusqu’à la toute dernière seconde. La collaboration Scorsese/Di Caprio commence à porter ses fruits avec une fusion parfaite de ces deux mondes les séparant. Leurs univers s’imbriquent mieux et Scorsese arrive enfin à faire un bon film du genre avec le charme de ses premières réalisations. A cela s’ajoute un très grand jeu d’acteurs qui transcendent chacun de leur personnage. Di Caprio est excellent, Mark Ruffalo envoûtant et Ben Kingsley magnétique à souhait.
Shutter Island nous plonge immédiatement dans un climat de paranoïa intense grâce à une mise en scène sublime qui accroche immédiatement l’œil, un montage chirurgical parfait, un jeu d’ombres et de lumières saisissant et une ambiance sonore qui colle parfaitement avec la montée en puissance du stress. Avec Shutter Island, Martin Scorsese s’est fait plaisir et ça se ressent à chaque instant. Un grand merci pour ça.
Une mise en scène sublime, un montage chirurgical parfait, un jeu d’ombres et de lumières saisissant et une ambiance sonore qui colle parfaitement avec la montée en puissance du stress.
Malheureusement, si tous les éléments cités précédemment font de Shutter Island une référence d’ingéniosité et de maitrise, le film souffre d’un handicap que l’on ne peut passer sous silence : son scénario. L’édifice voit l’une de ses fondations pencher légèrement, rendant l’ensemble instable par moment, à cause d’une intrigue téléphonée. Passé les vingt premières minutes, le final de Shutter Island saute aux yeux. Martin Scorsese tente de brouiller les pistes mais la surprise s’est définitivement évaporée. Pour un thriller c’est quand même très limite et agaçant. Aussi agaçant qu’un membre de votre entourage croyant intelligent de vous révéler la fin de Seven, Fight Club ou Usual Suspects. Dommage car avec un scénario mieux ficelé, Shutter Island aurait été définitivement classé au rang de référence du genre.