[évènement] Avant-Première « Rapt ! »

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Nous voilà conviés – via Cinefriends, merci à eux – pour la première projection publique de Rapt !

Ce n’est pas n’importe quel lieu qui a été choisi pour cet évènement. Le Ciné 13 Théâtre est une petite salle, réunissant cinéma et théâtre, très atypique dans Paris. Nous entrons immédiatement dans une ambiance feutrée, chaleureuse et douce. En chemin nous croisons de nombreux portraits de grandes stars féminines du cinéma d’avant 1950. Mais la surprise nous attend dans la salle de projection : de nombreux fauteuils deux places en sky nous attendent face à l’écran blanc. Nous voilà loin des salles impersonnelles des grandes firmes.

Peu de temps après le film Rapt ! (ndlr : voir la critique) est diffusé. Puis enfin Lucas Belvaux, son metteur en scène, arrive pour discuter avec nous. Loin d’être un débutant, Lucas Belvaux a commencé en tant qu’acteur (Pars Vite Et Reviens Tard, Joyeux Noël) puis s’est tourné vers l’écriture et la réalisation. Il revient avec nous sur ces différentes « casquettes ».

« Ce sont des plaisirs différents. J’ai été acteur jeune, dès 18 ans. C’est un grand plaisir. Un plaisir quasi enfantin de jouer la comédie, même si c’est dur etc. Le moment sur le plateau, où on joue un personnage, où on l’attrape, où il faut l’inventer, c’est quelque chose d’extrêmement jouissif. Après il y a certains problèmes. On se soumet à ce qu’on nous propose. Parfois on nous propose des trucs qu’on n’a pas envie de faire, on a des périodes sans proposition et ça devient dur, et en bout de course on est obligé d’accepter un truc ou on s’ennuie un peu. C’est un métier compliqué. Après entre « scénariste » et « réalisateur »… D’une part j’ai toujours fait les deux, je n’ai jamais fait scénariste seul. Jai toujours écrit les films que je réalisais après. Et là ce sont deux plaisirs différents. Il y a le plaisir, en ce qui me concerne, le plaisir de la clandestinité, on est tout seul chez soi et on prépare quelque chose. J’adore le moment où le film se construit, où les personnages commencent à naitre. C’est quelque chose d’un peu magique et de solitaire, avec la difficulté et les angoisses, mais c’est quand même très jouissif. »

Lucas Belvaux continue, tel un professeur, sur les différentes étapes de la réalisation : de la préparation au montage en passant par le tournage, il en décrit tout le processus, les moments d’angoisses que cela suscite, etc.

« Mais c’est le plaisir de travailler avec une équipe, avec d’autres, et de travailler avec des acteurs. C’est quand même quelque chose de particulièrement magique. Quand on voit s’incarner un personnage que l’on a écrit, qui était pure image de l’esprit, et qu’il y a un acteur qui le joue qui est à la fois ce qu’on a imaginé et puis autre chose aussi… Et c’est une chose que l’acteur a mis en plus, à laquelle on n’avait pas non plus pensé. On met en scène ensemble, on réalise un rythme, des interactions, c’est un boulot passionnant. C’est un boulot physique, stressant, il doit y avoir 50 photos de tournage ou je regarde ma montre, mais c’est un tel plaisir… »

Le sujet se dirige ensuite vers le thème même du film Rapt !. Inspiré de l’affaire du Baron Empain, il y a 30 ans, Lucas Belvaux aborde avec sincérité cette douleur vécue par un homme.

« C’est l’idée de rapport à la barbarie, l’histoire d’un homme seul, que ce soit il y a 30 ans, aujourd’hui ou dans 30 ans. C’est l’histoire d’un homme. En général c’est ce qui m’intéresse, c’est l’histoire des gens. Donc c’est une histoire extrêmement forte et complexe. »

Il explique ensuite pourquoi, malgré ses nombreuses recherches dans la presse de l’époque et la lecture du livre du Baron, il n’a pas souhaité rencontrer cet homme pour s’en inspirer.

« Je veux garder de la distance. Jai fait la même chose avec Les Prédateurs. Ici c’est un peu différent puisque je change de nom, je change d’époque, etc. Avec Empain je n’avais pas envie de rentrer dans trop d’empathie non plus, dans trop de réel. J’ai lu son bouquin très attentivement, je ne pense pas avoir son expérience, en tout cas ce qu’il a pu ressentir de douleur et de violence. »

Le public présent dans la salle se montre ensuite curieux quant au casting avec, rappelons le Yvan Attal dans le rôle du Président kidnappé.

« En fait j’avais plusieurs idées et Yvan c’était la première idée quand j’ai écrit. En fait, je balançais entre un comédien qui ne lui [ ndlr : au baron Empain ] ressemblait pas du tout, comme Yvan, et quelqu’un qui lui ressemblerait. Au bout d’un moment je me suis dit autant décalé carrément physiquement, je me sentais plus libre en gros. A partir du moment où j’avais décidé de décaler l’histoire, de ne pas faire une reconstitution, ca me paraissait tout d’abord plus facile, et plus confortable de décaler franchement. Et Yvan étant un très bon comédien. Il a beaucoup apporté au film, il s’est investi énormément. C’était dur physiquement, et puis même psychologiquement. »

Pour le rôle, Yvan Attal a dû suivre un régime très complexe pour lui permettre d’avoir une apparence extrêmement maigre. Lucas Belvaux avait suivit pour l’occasion les conseils d’un autre de ses acteurs, champion de culturisme.

« Il a fait le Conservatoire de Paris, il est spécialiste dans la versification classique ! Il connait très bien Corneille, Racine, etc. Et donc pour être champion du monde de culturisme il faut extrêmement bien contrôler la masse graisseuse, la rétention d’eau etc. Il avait plein de trucs pour perdre 3kg en une journée, enfin … pour donner l’impression de perdre 3, 4kg en une journée. Il mettait Yvan au régime sans sel et sans eau. Il séchait, c’était assez impressionnant et puis en 24h, il lui donnait l’impression d’avoir repris 3kg de plus. Donc c’était éprouvant pour Yvan. Pendant je ne sais pas combien de temps il a mangé des brocolis à tous les repas, au petit déjeuner etc. et des cabillauds du matin au soir. »

Deux autres rôles se démarquent de cette équipe de comédiens : les deux jeunes filles, ici, plus spontanées, plus sincères.

« Elle est très jeune la petite, elle a 13 ans. L’une et l’autre elles n’avaient jamais tourné, alors la grande elle est rentré au conservatoire cette année, elle avait l’envie. Elle jouait du théâtre et tout ca. Et la petite elle avait juste fait un peu de théâtre à l’école. Il y avait juste une vraie envie d’essayer. »

Une remarque intéressante a été faite par l’un des spectateurs qui évoquait alors la télévision comme un personnage. Le réalisateur de Rapt ! ajoute que « de toute manière au moment de l’affaire Empain c’est quand même ce qui provoque la fracture de la famille. Toute sa vie est mis au jour, ce qu’il cachait plus ou moins bien, tout d’un coup tout le monde découvre qu’il a plusieurs vies parallèles, que rien ne lui correspond. Ca arrive encore plus maintenant, aujourd’hui, qu’à l’époque. Si tout était resté secret autour, ca aurait été plus facile. Le fait d’apprendre tout ca pour sa famille ça a été un choc, ça a été monstrueux. Yvan me racontait, lui, ça lui est arrivé. Un matin il sortait de chez lui, il voit une photo sur le kiosque où il était avec sa femme et ses gamins dans la rue, photo volée, il tient son fils ou sa fille par la main, sa femme est deux mètres derrière elle tient l’autre gamin par la main, ils ne regardent pas dans la même direction je ne sais pour quelle raison, et c’est titré « c’est fini ». Les enfants, ils voient ça, ils fondent en larmes. Il n’y avait rien entre eux a ce moment la. Avant que le gamin se remette du choc, c’est des semaines. ».

Lucas Belvaux, après nous avoir offert trois quart d’heure de son temps, conclu ce débat très riche et agréable.

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