EDEN
© Pierre Meursaut

EDEN, l’Europe comme paradis perdu – Critique

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Mini-série de six épisodes sur la crise des migrants en Europe, EDEN est le fruit d’une collaboration franco-allemande pour Arte, réalisée par Dominik Moll, lui-même franco-allemand. Portrait choral de réfugiés dans différentes villes européennes, EDEN est en compétition officielle de la dixième édition du Festival Séries Mania et sortira sur Arte début mai. Et en attendant, on peut la voir intégralement à Lille ce samedi 30 mars.

Un canot débarque avec une cinquantaine de réfugiés à bord sur une plage grecque remplie d’estivants. Le décalage est flagrant et donne d’emblée le ton. EDEN aborde frontalement la réalité infernale des réfugiés et pose la question de la place qu’on leur accorde dans nos contrées européennes. Que vivent réellement ces réfugiés en arrivant sur le vieux continent ? Comment les accueillir, comment les aider à se reconstruire et dépasser les traumatismes qu’ils ont subis pendant leur exil ou dans leur pays d’origine ? Autant de questions soulevées dans cette fresque réaliste et nuancée.

La série se déploie autour d’une galerie de personnages : une famille allemande qui accueille un jeune réfugié syrien, une française qui gère un camp de réfugiés privatisé en Grèce, un jeune nigérian en cavale, deux agents de sécurité grecs bouleversés par la fuite de ce dernier et de son frère et une famille syrienne réfugiée à Paris grâce au soutien d’un journaliste français. EDEN croise les différents récits de manière habile et haletante. Ainsi passe t-on de Francfort à la Grèce, de Paris à Bruxelles, théâtres où se joue le sort de chacun et où les destins finissent par se croiser.

Photo de la série EDEN
© Pierre Meursaut

EDEN commence à Athènes dans un camp de réfugiés géré par une société privée que sa directrice, Hélène Durand (Sylvie Testud), vise à ériger en modèle au niveau européen. Pour elle, les pays ne peuvent désormais plus ignorer les flux migratoires et doivent les intégrer à leur économie de façon profitable et bénéfique pour tous. Dans ce même camp, sont accueillis Amare et Daniel, deux frères nigérians. L’ainé attend impatiemment sa demande d’asile alors que le plus jeune étudie dans les cours qui leur sont donné. Quand Daniel réalise que sa demande d’asile risque de prendre plusieurs mois, il décide de s’enfuir suivi par Amare. Mais leur fuite tourne mal.

EDEN nous emmène aussi à Paris où viennent d’arriver les Lazkani, famille syrienne hébergée provisoirement dans un appartement qu’on leur prête. Lui est médecin et sa femme a quitté son métier d’enseignante pour élever leur fille. Ils sont aidés dans leur démarche par un journaliste français à qui Lazkani a procuré des informations confidentielles concernant le régime de Bachar El Assad. Ils essayent au mieux de préserver leur petite fille de huit ans devant ces changements de vie mais la réalité est bien là devant eux. Que vont-ils devenir en France ? Va t-il pouvoir exercer comme médecin ou devra-t-il  se contenter de n’importe quel job comme la plupart de ses pairs ? Suite à une altercation dans la rue, sa femme va le soupçonner de lui cacher un secret et se méfier de plus en plus de ses silences.

En Allemagne, on retrouve Flo et ses parents qui désormais comptent parmi eux Bassam, jeune réfugié syrien à qui ils ouvrent leur porte. Bassam se plonge dans les études, déterminé à réussir autant qu’à oublier son passé. L’entente avec Flo, adolescent provocateur et menacé dans son petit confort bourgeois, est pour le moins chaotique et interroge par la même occasion les rapports qu’entretiennent nos pays riches à l’éducation de leurs enfants. Bassam est choqué du manque de respect que Flo témoigne à ses parents (et à lui), il trouve les parents bien trop laxistes quand en fait ils s’efforcent d’être le plus équitable possible. Mais l’équation n’est évidemment pas la bonne. Flo a toujours tout eu quand Bassam lui a tout perdu. Le premier a peur de partager ce que le second n’attend même plus : l’amour d’une famille.

Photo de la série EDEN

La force d’EDEN repose en grande partie sur son écriture affûtée qui entremêle les fils narratifs avec succès et permet de dresser un portrait de la crise migratoire dans toute sa complexité. En racontant l’intimité des personnages, EDEN montre à la fois la multitude de situations d’exil mais rappelle aussi une évidence qu’on a tendance à oublier : à chaque être humain sa propre histoire, unique, singulière. Aujourd’hui on ne peut plus traiter les migrants de façon collective comme s’ils partageaient tous les mêmes problématiques. Il est temps d’avancer vers un autre monde, de passer de l’enfer qu’ils rencontrent à l’éden où ils sont venus se réfugier.

Anne Laure Farges

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