Elie Chouraqui : « L’Origine de la Violence a été une aventure ! »

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L’ORIGINE DE LA VIOLENCE aborde avec émotion et suspense les thématiques chères au cœur de Elie Chouraqui: la mémoire et les secrets de famille qui se transmettent de génération en génération. A l’occasion de la présentation de son film à Bordeaux (notre critique, ICI), le réalisateur nous a parlé avec passion de l’évidence d’adapter le roman de Fabrice Humbert, mais aussi de son combat pour tourner dans le camp de Buchenwald et de sa passion des acteurs. Il  était accompagné de son fils César Chouraqui, qui incarne Nathan Wagner.

Elie et César Chouraqui
© Le Blog Du Cinéma

 Quel est l’effet déclencheur qui vous a donné envie d’adapter au cinéma le livre L’Origine de la violence de Fabrice Humbert ?

– Elie Chouraqui : Dans ce bouquin, j’ai retrouvé tous les thèmes sur lesquels je fais de la mise en scène depuis quarante ans : la famille, la mémoire, la violence, les rencontres, les histoires d’amour, la relation parents-enfants. Qui sommes-nous ? D’où venons- nous ? Sur quoi construisons-nous notre existence ? C’est la somme de mon travail, la raison pour laquelle je réalise des films. Il y a beaucoup de choses dans le livre : les personnages, l’humanité, la folie humaine, la beauté, la relation franco-allemande. Le livre est passionnant, construit comme un thriller. D’étape en étape, le sombre Nathan (interprété par Stanley Weber) retrouve l’histoire de sa famille et marche vers la lumière, épanoui. On se dit que la vie est bien faite, grâce à la résilience. Savez-vous que la France est le pays dans lequel il y a le plus de familles qui font un arbre généalogique ? Je vais d’ailleurs bientôt participer à l’adaptation en France de l’émission Finding your Roots que font les artistes aux Etats-Unis à propos de leurs racines.

 

L’adaptation n’a pourtant pas été simple

– E. C : En effet, faire le film a été une aventure longue, difficile mais passionnante ! Je me suis bagarré pour avoir les droits, je n’étais pas le seul réalisateur intéressé, il y avait beaucoup de demandes ! J’ai rencontré l’éditeur et l’auteur, avec lequel on a eu un vrai coup de cœur, comme si on était copains d’enfance. Sans doute parce que j’ai compris que le récit était autobiographique, cela m’a touché. Je me représente très bien cette enfance faite de non-dits et de nostalgie, et cette culpabilité qui naît de ces mille petits détails inconscients qui nous font nous demander: que se passe t-il ? 

 

De quelle manière avez-vous travaillé le scénario avec Fabrice Humbert ? 

– E. C On a travaillé le script pendant un an et demi, sur près de cinquante versions ! Comme Fabrice est prof, il me mettait des mots en rouge dans la marge comme « excellent », « bravo », ou « non, pas d’accord ». La difficulté c’était que je ne pouvais pas tout garder du livre, il fallait écarter des choses, retrouver la ligne forte, que j’ai respectée. Je voulais que le spectateur sorte haletant du film. Voir un film au cinéma pour moi, c’est avant tout vivre une expérience. Mes meilleures expériences, c’est Taxi Driver, Apocalypse Now, Annie Hall, L’Arrangement ou Faces.

 

Vous êtes le premier à avoir obtenu l’autorisation de pouvoir tourner au camp de Buchenwald, comment avez-vous fait? 

– C.C : C’est vrai, on a vécu quelque chose qui n’a jamais existé. Je ne voulais pas tourner dans un décor reconstituant le camp de Buchenwald, je ne voulais pas qu’on voit un décor fabriqué.C’était important aussi de tourner avec des acteurs allemands.  Je ne voulais pas déroger à cela. J’ai défendu mon projet devant le Conservateur du Musée du camp, et je crois que la phrase qui a tout fait basculer, c’est quand j’ai dit que ce film, c’était mon histoire, ma filiation, et qu’ils ne pouvaient pas me refuser le droit d’aller vers les miens. Je connais bien cette polémique de Lanzmann et BernardHenri Lévy, qui consiste à dire qu’il ne faut pas montrer l’Holocauste, mais moi je pense que sans tout montrer on doit pouvoir perpétuer la mémoire grâce aux films.

 

Vous avez offert leurs premiers rôles à de jeunes interprètes, comme votre fils César, Jeanne Cremer (petite-fille de Bruno Cremer) ou Romaine Cochet. Avez-vous une âme de découvreur de nouveaux talents   ? 

– E.C : J’ai la passion de regarder les acteurs, et c’est vrai que c’est moi qui ai porté la première fois à l’écran Charlotte Gainsbourg, Sandrine Kiberlain ou Yvan Attal. Mon expérience, ma sensibilité et une certaine oreille musicale me permettent de voir rapidement ce que les acteurs sont capables de donner… Et je me suis rarement trompé. Un seul mauvais acteur est capable de gâcher tout le film ! Mais vous savez, le grand patron c’est le film, c’est lui qui choisit ses interprètes, moi je ne suis que le maître d’oeuvre. Je sais quand le film sonne juste, mais je me garde toujours deux jours après le tournage, au cas où.

 

Vous avez pour habitude de vous rendre chez les acteurs pour préparer les rôles, n’est-ce pas un peu intrusif et avez-vous déjà essuyé des refus ?

– E.C : Aucun refus, mais les acteurs sont parfois un peu surpris, comme Andie MacDowell chez qui j’avais passé un week end en Caroline pour Harrison’s Flowers. Passer du temps en amont du tournage avec les acteurs crée une complicité, qui me permet d’aller plus vite ensuite, de nous comprendre en un regard, un mot. Andie m’avait d’ailleurs remercié à la fin du tournage. 
César Chouraqui : Nous on se comprend encore plus facilement ! 

 

César, c’est votre premier double rôle, comment avez vous abordé le personnage ? 

– C.C : C’est vrai qu’il y avait une certaine pression, mais j’avais très envie et j’ai beaucoup travaillé, lu, vu des films et des documentaires. Je suis entré dans la peau du personnage par le biais de la faim et j’ai jeûné pendant trois semaines et perdu quinze kilos. David Kammenos, mon compagnon de tristesse (Kolb) a lui aussi jeûné. 

 

Était-ce difficile de tourner certaines scènes devant votre père ? 

– C.C : La scène d’amour avec Romaine n’était pas vraiment écrite, on a fait deux prises et la seconde était très naturelle. Sa direction d’acteurs est à demi-mots, mais il m’a rassuré lors de la scène de la parabole du rat en me donnant cette indication importante: « tu as le droit de pleurer ». 
– E.C : Il était important de faire comprendre par quoi passe Nathan Wagner, qui gagne quand même à la fin d’une certaine façon, parce que ce jeune homme laisse une mémoire. Il y a un proverbe latin qui dit « L’homme vainc toujours » .

Propos recueillis par Sylvie-Noëlle
L’ORIGINE DE LA VIOLENCE, la critique

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Affiche du film L'ORIGINE DE LA VIOLENCE

Titre original : L’Origine de la Violence
Réalisation : Elie Chouraqui
Scénario : Elie Chouraqui d’après l’oeuvre de Fabrice Humbert
Acteurs principaux : Stanley Weber, Cesar Chouraqui, Richard Berry, Miriam Stein, Michel Bouquet, Catherine Samie…
Pays d’origine : France
Sortie : 25 mai 2016
Durée : 1h50
• Genre :
 Drame
Distributeur : Paradis Films
Synopsis : Lors d’un voyage en Allemagne, un jeune professeur, Nathan Fabre, découvre au camp de concentration de Buchenwald la photographie d’un détenu dont la ressemblance avec son propre père, Adrien, le stupéfie…

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