KING KONG

#ORIGINALvsREMAKE N°2 : KING KONG vs KING KONG

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Deuxième numéro de notre nouvelle rubrique : ORIGINAL VS REMAKE.
Comme son nom le laisse entendre explicitement, nous y chroniquerons avec la même empathie, un long métrage et son remake. Nous nous attacherons à lister leurs spécificités, leurs similitudes, leurs qualités et défauts, à les re-contextualiser si nécessaire dans leurs époques, à déterminer les sensibilités et obsessions de leurs auteurs… Bref: nous chercherons à déterminer ce qui rend chaque oeuvre unique et réussie, à sa façon. Parce que le cinéma, c’est certes de grands films, mais aussi de grands remakes.

Pour ce deuxième article, nous allons nous attarder sur cet être immense, qui vit sur une île, et adore les belles blondes… KING KONG, le gorille le plus connu de tous les temps, est aussi un mythe du cinéma qui ne cesse de fasciner et d’inspirer. Dévoilé au grand public pour la première fois en 1933 grâce à ses créateurs Merian C. Cooper et Ernest B. Schoedsack, il est apparu pour la dernière fois en 2005 en compagnie de Peter Jackson. Deux versions au succès mondial, décortiquées dans cette rubrique Original VS Remake.

 

KING KONG (1933) ET KING KONG (2005) :
LES SIMILITUDES

Si les techniques ont considérablement évolué durant les soixante-douze années qui séparent les deux versions, l’original comme le remake sont tous deux des films à grand-spectacle, dont la magnificence de l’histoire passe par l’utilisation impérieuse des effets spéciaux. Un King Kong, quel qu’il soit, se doit de faire passer par l’image une certaine grandeur, une magie que l’on ne vit qu’au cinéma. Il faut qu’il émerveille grâce à une ambiance imaginaire et fantastique, tout en suscitant le respect pour tout le travail visuel effectué.
Mais la trame scénaristique, le récit, restent cependant la similitude la plus flagrante. Les deux films racontent l’histoire du cinéaste Carl Denham (joué par Robert Armstrong en 1933 et Jack Black en 2005), dont la folie va de pair avec son ambition : faire un film grandiose en montrant au monde entier ce qui n’a jamais été vu. Après avoir recruté d’urgence une jeune femme de music-hall (Ann Darrow, incarnée par Fay Wray puis Naomi Watts), il embarque avec toute son équipe à bord du SS Venture, en direction d’une île mystérieuse : Skull Island. Ils découvrent alors une tribu d’indigènes qui vénèrent un certain Kong, le gigantesque et solitaire gorille de l’île, lui offrant régulièrement des jeunes filles à manger. La belle Ann, enlevée par les indigènes pour être sacrifiée, est finalement épargnée par le grand singe qui l’emporte avec lui au coeur de l’île… [spoiler mode= »inline »] Ses compagnons partent alors à sa recherche, ont affaire à des dinosaures, avant de récupérer la jeune femme et de décider de ramener Kong à New-York, pour le montrer au grand public et devenir riches, très riches grâce à cette « huitième merveille du monde ». Mais alors qu’il est présenté pour la première fois, le majestueux gorille se libère de ses chaines, terrorise la ville, s’empare une nouvelle fois de la belle blonde, avant d’être traqué jusqu’en haut de l’Empire State Building où il est abattu par des avions de chasse. [/spoiler]
Ce sont cependant les différences qui forment les spécificités de chaque film. La première, visuelle, étant la façon dont Kong a été conçu. Celui de 1933 est en effet un modèle articulé, fabriqué de toutes pièces. Une tête, une main, ainsi qu’une patte grandeur nature ont été construites parallèlement, afin de multiplier les mouvements et les plans. Le gorille version Peter Jackson est quant à lui joué par Andy Serkis couvert de capteurs, permettant ainsi de reconstituer le primate numériquement. Mais évidemment, les divergences entre les deux versions ne s’arrêtent pas là, et seront par ailleurs détaillées dans une analyse comparative, et personnelle, de ces deux films.

 

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KING KONG (1933)

Affiche du film KING KONG (1933)

[toggler title= »LE CONTEXTE DE 1933″ ]

Les années 1930, l’âge d’or du cinéma hollywoodien… KING KONG, sorti en 1933, est le témoignage de cette époque où le Septième Art rimait avec « divertissement à l’état pur ». Les gens se déplaçaient dans les salles de cinéma, souvent immenses, pour assister à un grand spectacle qui devait allier tous les ingrédients qui faisaient sensation : l’aventure mêlée à l’humour, la romance et l’évasion. Dans une période où l’on ne pouvait bouger comme aujourd’hui et où toute une flopée d’images venues du monde entier ne nous arrivaient pas constamment en pleine figure, le cinéma était l’occasion de partir à la découverte de lieux certes souvent imaginaires (le côté artistique du cinéma oblige !) mais considéré comme fantastiques car teintés d’exotisme.
D’un point de vue plus technique, les films de l’époque étaient relativement simplistes dans les décors et les trucages. La grande nouveauté vient de ce KING KONG, dont le tournage a duré une année entière !, qui s’est voulu ambitieux : les effets spéciaux, pour l’époque, sont à couper le souffle.
Dans cette recherche de découverte et de sensationnalisme, tout ou presque était prétexte à ramener un large public, alors émerveillé. Les animaux, par exemple, étaient ce que l’on appelle des bêtes de foire. Ce qui nous permet de mieux comprendre pourquoi notre fameux primate – premier animal à être au centre d’une histoire au cinéma ! – devait être ramené coûte que coûte en ville…

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[toggler title= »Pourquoi c’est BIEN » ]

Il suffit, dès les premiers secondes du film, d’une musique qui inspire le grandiose et d’un proverbe annonçant une histoire fataliste pour être profondément intrigué par l’aventure qui nous attend. Si le titre a cette dimension majestueuse, le film l’est tout autant. D’abord, par les effets spéciaux qui arrivent à nous bluffer par tout le bricolage/rafistolage nécessaire pour rendre cette histoire encore crédible à l’écran, plus de quatre-vingt ans plus tard.
Photo du film KING KONG (1933)
Mais aussi, par l’ambiance qui y règne. Le film joue tout au long de ses 1h40 sur la peur de l’inconnu, qui arrive à devenir angoissante et frémissante. Ce qui nous pousse, par conséquent, à nous poser constamment des questions nées de mystères multiples : que va-t-il se passer ? Que vont faire les personnages ? Qui/que vont-ils rencontrer sur leur chemin ? La seule façon d’avoir une réponse est de découvrir, au fur et à mesure, l’issue de chaque séquence. Car dans King Kong, rien n’est vraiment prévisible.
Il peut paraitre ridicule en 2016 d’affirmer qu’un si vieux film arrive à faire peur tant les techniques et les codes de l’épouvante ont considérablement évolué, mais pourtant, si l’on se remet une fois de plus dans le contexte de l’époque, il est fort à parier que la tension présente tout au long du film – qui fonctionne encore – n’a pas rassuré les spectateurs… Car il y a toujours cette appréhension du danger qui traine, dès que l’équipage navigue vers cette île, jusqu’à ce que Kong terrorise New-York tout entier, sans oublier l’instant où nos personnages font la rencontre d’une tribu indigène impitoyable qui s’adonne à des rites terrifiants.
Photo du film KING KONG (1933)
Mais derrière l’aventure, on peut y déceler notamment dans les premières scènes quelques petites piques ironiques lancées ci-et-là à l’industrie du cinéma, entre certaines conditions de tournage qui font perdre de l’argent, et des assureurs en totale contradiction avec les ambitions d’un réalisateur… Jusqu’à ce que l’on remarque que le message principal du film réside à sa toute fin, avec une seule et unique phrase, que vous (re)découvrirez par vous-même.

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[toggler title= »Les faiblesses de l’original » ]

Le KING KONG de 1933 laisse une grande part à l’action et à un enchainement de scènes prodigieuses qui ne permettent pas au récit de se poser un peu, afin de donner plus de profondeur et de réflexion. Le spectateur peut alors se sentir épuisé, par exemple, après les scènes de combat entre l’immense gorille et d’étranges créatures préhistoriques, qui ne sont là seulement que pour accentuer le spectaculaire du film.
Dans ce trop-plein de sensationnalisme, les réalisateurs oublient de créer une réelle empathie pour les personnages. Nous ressentons finalement peu de choses pour le gorille, sa proie ou n’importe quel membre de l’équipage, tant ils semblent froids et impénétrables. Alors, puisque tout se base sur l’atmosphère et les péripéties, l’émotion à travers eux fonctionne peu, et leur psychologie ou histoire personnelle qui auraient pourtant permis de créer un certain attachement, ne sont guère développés.
Photo du film KING KONG (1933)
Le machisme ambiant, la prétention d’une certaine supériorité humaine, la vision de tribus indigènes forcément archaïques et terrifiantes, le peu de préoccupation pour la condition animale, sont les principales caractéristiques de ce KING KONG. Il est certes bien évident que cela s’accorde avec les mentalités de l’époque, mais cela dévoile aussi le but principal du film : plaire par le sensationnalisme, en caressant dans le sens du poil du spectateur de 1933 (et celui de 2016 ?) certainement pas perturbé par la vision quelque peu simpliste que le film offre.

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[toggler title= »La représentation de Kong » ]

De par ses traits vulgaires, la brutalité de ses gestes, la grandeur de son charisme, la vivacité de ses yeux, et le noir intense de sa fourrure, il y a dans notre créature quelque chose de terrifiant. Ici, Kong n’est pas représenté comme un gorille innocent et bienveillant, mais comme une bête féroce, presque monstrueuse, qui détruit tout sur son passage, et véritablement dangereuse pour l’homme.
Photo du film KING KONG (1933)
Il y a cependant un grain de sensibilité que l’on arrive à percevoir de temps à autre, notamment dans la façon dont le gorille protège la jeune femme à la beauté superbe, qu’il considère plutôt comme un joli trophée. La kidnappée, quant à elle, reste majoritairement effrayée par la bête, jusqu’à passer son temps à crier. Mais là encore, les dernières minutes permettent de prendre conscience que derrière les apparences, se cache toute une facette de ce gorille qui n’a rien à voir avec ce que l’on a ressenti tout au long du film…

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[toggler title= »Pour quel public ? » ]
Tout le monde rêve de vivre une aventure pleine d’action et de fantastique comme celle-ci au cinéma. Cela dit, ceux qui aiment les sensations fortes et adorent avoir quelques frissons y trouveront certainement bien plus leur bonheur que les autres.

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KING KONG (2005)

Affiche du film KING KONG (2005)

[toggler title= »LE CONTEXTE DE 2005″ ]

A peine avait-il fini sa grandiose trilogie Le Seigneur des Anneaux que Peter Jackson s’embarquait pour un projet tout aussi ambitieux, celui de donner un remake à son film préféré, KING KONG. Mais le réalisateur n’était pas le premier à s’être aventuré dans cette galère, puisque John Guillermin a lui aussi proposé sa propre version, en 1976, avant de lui donner une suite un peu loufoque dix ans plus tard. Quoi qu’il en soit, dans ce début de XXIe siècle où le spectaculaire du cinéma passe par des effets spéciaux créés par ordinateur devant être toujours plus poussés, ce nouveau KING KONG se devait d’être dans la lignée de ces prétentions techniques. Parallèlement à cela, les grands studios produisent de plus en plus des nouvelles adaptations de grands classiques du cinéma. D’une part, pour donner un nouveau souffle à certains mythes, et d’autre part, parce que ce qui a marché autrefois peut encore être très rentable actuellement… KING KONG, inscrit profondément dans la culture populaire, est un formidable choix !
Parallèlement, dans des sociétés où l’on se pose bien plus qu’auparavant la question du respect de la faune et de la flore, les mauvaises conditions animales sont régulièrement dénoncées. Une réelle prise de conscience se forme à l’égard de la nature et de nos les amies les bêtes, non plus considérées comme des objets mais comme de véritables êtres vivants à qui l’on doit assurer le bien-être. Ces idées-là imprègnent par conséquent ce film tout-public.

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[toggler title= »Pourquoi c’est BIEN » ]

Ce KING KONG est un film réalisé par un admirateur de la première version, qui respecte totalement le récit originel, en l’approfondissant et en lui donnant une petite touche personnelle certes, mais en restant dans l’hommage. Par conséquent, forcément à un moment ou à un autre, chaque élément-caractéristique du film original apparaît, que ce soit dans le déroulement des séquences, dans les plans et la mise en scène, ou plus simplement dans une flopée de références glissées ci et là.

Photo du film KING KONG (2005)

Si le film de 1933 allait dans le sensationnalisme pour faire naître un certain effroi, son remake de 2005 offre du grand spectacle pour nous faire vivre une véritable émotion, quitte à nous faire verser une petite larme. En soi, c’est tout ce que l’on appelle un « beau film » qui charme par sa tendresse et le sentiment d’injustice qu’il dégage. Peter Jackson a donc choisi la voie du merveilleux imaginaire pour nous emmener sur une Skull Island fantastique, belle et incroyablement riche en créatures géantes mais parfois
repoussantes, bien que l’ensemble reste dangereux pour les hommes qui osent s’y aventurer. Cette touche de fantastique est accentuée grâce au cadre choisi : les années 1930. Contrairement à une période contemporaine où nous nous serions forcément sentis concernés, cette décennie éloignée de la nôtre permet de prendre le recul nécessaire afin de mettre en avant tout l’aspect fictif et légendaire du récit. Paradoxalement, cela accentue son réalisme ainsi que sa crédibilité, en nous faisant presque croire que cette histoire se serait réellement déroulée.

KING KONG version 2005 est intéressant parce qu’il creuse véritablement une relation entre le singe et sa captive, qui ne peuvent ressortir indemnes de cette histoire. Entre les deux personnages, il y a le dialogue, la compréhension, l’attachement et le déchirement. Et le spectateur, dans tout ce mélange de sentiments et de regards complices, s’attache, voudrait se révolter face à la tournure dramatique que l’histoire prend, puis en ressort tout retourné.

Photo du film KING KONG (2005)Aussi, Peter Jackson fait la critique des hommes qui, par entêtement et recherche de gloire ou de sensationnalisme, seraient prêts à tout. Ici en l’occurrence, à ramener une créature pourtant innocente mais inconnue du grand public, en omettant toute empathie et respect à l’égard des animaux que l’on devrait pourtant avoir.

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[toggler title= »Les faiblesses du remake » ]

Cela reste un lourd pari de donner sa propre version à ce genre de film culte, mais il n’a toutefois pas cette prétention à offrir du « jamais vu » au cinéma comme cela avait été le cas en 1933. La réalisation, par exemple, en plus de rester très « Seigneur des Anneaux » n’offre que du « déjà-vu » ailleurs. De plus, les traits caricaturaux de certains personnages, la façon maladroite d’amener la romance ou de créer de la tendresse, les belles images qui cachent une mise en scène souvent peu inspirée, donnent au film un caractère très classique et superficiel.
Photo du film KING KONG (2005)
Peter Jackson sait remodeler une histoire déjà existante pour la remettre au goût du jour et lui donner une certaine grandeur, mais a un peu de mal à offrir quelque chose de véritablement inédit. Cette version reste donc assez gentillette. Le réalisateur ne prend pas trop de risques, quitte à garder entièrement la trame scénaristique du KING KONG de 1933, sans véritablement rajouter d’éléments supplémentaires. Par exemple, il aurait été intéressant d’évoquer le rapatriement de Kong à New-York, ce qui n’est une fois de plus, pas du tout évoqué. Aussi, il suffit de constater le véritable copié-collé de très nombreuses scènes, qui ne sont que le fruit d’un cinéphile trop heureux de tourner le remake d’un film qu’il vénère tant. Ceux qui n’ont pas visionné l’original trouveront l’histoire du remake fantastique, mais ceux qui l’ont vu auparavant la trouveront logiquement fade.

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[toggler title= »La représentation de Kong » ]

Là tient la principale différence avec la version de base. Si en 1933 on pouvait craindre notre primate géant, en 2005 on oserait presque lui faire un câlin. Le Kong de Peter Jackson est élégamment majestueux, et a une profonde sensibilité que l’on remarque dans l’expression de son visage. Certes, il a tendance à être un peu brute et violent – normal, quand on se bagarre avec des dinosaures ou que l’on se retrouve dans un milieu totalement inconnu qui lui est hostile ! – mais on ne peut s’empêcher d’avoir de la compassion pour cet innocent animal, seul sur cette île, dont le seul malheur fut celui de tomber sous le charme d’une belle blonde…
Photo du film KING KONG (2005)
Peter Jackson veut très rapidement montrer le bon côté de ce grand singe, en jouant la carte de la sympathie, de la tendresse tout au long de son oeuvre. On retient alors ces petites séquences de complicité, amusantes et douces, entre Kong et Ann. Puis le final, forcément touchant.
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[toggler title= »Pour quel public ? » ]

Peter Jackson livre un film grand-spectacle, où tout le monde peut être touché à sa manière, malgré les trois heures de film et des scènes parfois un peu violentes. Car le goût pour l’aventure, pour la découverte de créatures préhistoriques, sont aussi bien présents chez un enfant que chez n’importe quel adulte. Tout le monde peut également être charmé par cet attachant gorille.

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CONCLUSION

Si ces deux films restent impressionnants notamment grâce aux prouesses techniques, ils ne procurent pas du tout le même impact sur le spectateur : tandis que l’original suscite surtout l’effroi de par son mélange fantastique-épouvante, le remake préfère jouer la carte de l’émotion et de la tristesse en prenant une tournure dramatique. Malgré les très nombreuses similitudes (la volonté d’offrir une grande aventure comme on en voit rarement au cinéma, et l’histoire à 95% identique), ce sont ces différences qui jouent sur le ressenti final. Et qui feront, à coup sûr, pencher votre coeur pour l’une, ou pour l’autre version…

Yohann Sed

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