MARSEILLE
© Pathé Distribution

[CRITIQUE] MARSEILLE

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Scénario et Dialogues
4.5
Mise en scène
5
Interprétation
6
Humour
3
Émotions
3.5
Note des lecteurs3 Notes
4.9
4.4

MARSEILLE est présentée comme une comédie dramatique et on s’attend à ce que le film s’emploie au mieux à nous faire pleurer, ou au moins à nous émouvoir. On vous le dit tout de suite, les scénaristes – et principaux acteurs – Kad Merad, Patrick Bosso et Judith El Zein ont mis le paquet avec les moyens à leur disposition en matière de scénario, personnages et mise en scène ! Rarement on aura vu un film exploiter autant de grosses ficelles (on en a compté une bonne quinzaine). On imagine très bien la fine équipe se dire que dans le tas, le public trouverait bien son bonheur. On ne niera pas que, à de rares moments, on a vu poindre l’émotion, mais celle-ci est amenée de façon tellement lourdingue et dégoulinante de bons sentiments qu’elle frise vite la saturation, voire l’écœurement ! Voilà notre ressenti par rapport à ces multiples séquences que les scénaristes ont cru bon de devoir nous fourguer dans leur cahier des charges émotionnel.
Le scénario part dans tous les sens et emprunte des voies bien trop diverses pour que le spectateur puisse s’attarder sur l’une d’elles. A trop vouloir courir après trop de lièvres à la fois, on finit par n’en attraper aucun. Un brave type, Paolo/Kad Merad, revient dans sa ville natale, Marseille, après 25 ans d’absence. On apprendra les raisons dramatiques et secrètes de son départ pour le Québec, après un petit suspense et des scènes en flashback. Son frère Joseph/Patrick Bosso lui a menti à propos de l’état de santé de son père Giovanni/ Venantino Venantini. On est d’ailleurs très admiratif de la reconversion de ce dernier, puisque de son rôle usuel de gangster, il se spécialise à présent dans celui de père des héros quarantenaires. On l’a ainsi croisé dans Un + Une avec Jean Dujardin, ou dans La vie très privée de Monsieur Sim avec Valéria Golino.

Photo du film MARSEILLE
© Pathé Distribution

MARSEILLE réussit son premier coup double pseudo-émotionnel avec une séquence « famille » (les retrouvailles d’un homme avec son frère et son père) et une séquence « nostalgie et vieillesse ». Ces scènes à l’hôpital et à la maison de repos, prétextes à tenter de faire recouvrer la mémoire à Giovanni, sont d’un ennui mortel. On y croisera des gitans, un flamand rose, le directeur et l’aide-soignant (Philippe Lefèbvre et Julien Boisselier, manifestement égarés dans le film), et bien sûr Elena/Judith El Zein, médecin bienveillant séduite par Paolo.
MARSEILLE poursuit sur la séquence « santé » par le biais de la maladie de Joseph qui travaille sur les chantiers navals. Il la garde secrète pour ne pas inquiéter sa femme Valérie/Anne Charrier, si gentille et qui ne se plaint jamais malgré les difficultés financières. On ne saurait d’ailleurs trop conseiller à l’actrice, qui s’essaye en vain à des choix différents (comme dans Je compte sur vous), de ne plus s’aventurer dans ces rôles à contre-emploi et sans consistance car nous savons, depuis Maison Close, qu’elle mérite mieux que ça ! Le film nous offre d’ailleurs ici une triple séquence « courage », « drame social » et « découverte d’un métier ». Car la vie est dure sur les chantiers, même si elle est plus belle au soleil (séquence « Aznavour »), mais on n’a pas le choix, sinon on serait au chômage. Car on encaisse chez les Amato et, (séquence « émigration » oblige) on n’oublie jamais d’où l’on vient : l’Italie.

« MARSEILLE est un film sans aspérité, bien-pensant, qui ne risque pas de bousculer le spectateur et surtout pas les clichés. »

Paolo habite donc au Québec – le premier plan du film s’ouvre sur un grand lac. Idée qui répond parfaitement à la séquence « tourisme à l’étranger ». Autre incohérence du scénario qui n’a pas embarrassé le trio de scénaristes : Kad Merad n’a aucun accent marseillais, contrairement à Joseph et son neveu. On imagine qu’il s’est employé à le chasser de sa vie pour ne pas se rappeler de mauvais souvenirs. Il n’a pas non plus, comme son fils, l’accent québécois. Le film parvient donc à créer un choc des cultures au sein d’une même famille, entre les deux cousins : des séquences « humour » qui tournent clairement à vide. D’ailleurs, penser que le spectateur verra dans MARSEILLE le pendant de Bienvenue chez les Ch’tis, sous prétexte qu’il y a aussi Kad Mérad, c’est prendre le risque de le décevoir.

Photo du film MARSEILLE
© Pathé Distribution

Kad Merad, qui tente depuis plusieurs années une incursion dans un genre différent de la comédie avec plus ou moins de succès, joue dans MARSEILLE de façon très (trop ?) neutre, à l’image du personnage qu’il incarne. Paolo est transparent et sert surtout de faire valoir à tous les autres : son frère, son père, son fils, son nouvel amour, mais surtout à la ville de Marseille, dont le film est une véritable ode. On n’a aucun mal à imaginer la validation du scénario par les institutions, les politiques et les associations du coin. Y sont abordés les sujets propres à Marseille, dont les médias se font l’écho : le foot, et précisément l’OM (via de nombreuses scènes interminables sur les maillots de foot et les matchs), la Canebière, la violence dans les quartiers, les embouteillages, les engueulades « avé l’assent« , les taxis, la solidarité entre copains… On n’a toujours pas compris l’intérêt d’avoir titré le film comme la ville, si ce n’est dans le but de séduire le public marseillais.
Quant à Patrick Bosso, c’est un sketch à lui tout seul. Le problème c’est qu’il n’est pas sur scène et qu’il interprète un rôle censé ne pas être comique, stéréotypé à outrance. Mais il n’est pas Coluche, et MARSEILLE n’est pas Tchao Pantin. Le duo de frangins avec Kad Merad tombe à plat et ne produit pas les effets escomptés. La présence dans un genre dramatique de ces deux acteurs estampillés comiques est même assez déconcertante, puisque l’on ne sait jamais sur quel pied danser, ne nous faisant ni rire, ni pleurer. Judith El Zein, enfin, continue depuis Le Prénom à se frotter aux comédies, mais on ne croit pas à son histoire d’amour naissante avec Paolo, dont le côté moral, puisqu’ils sont tous deux divorcés, nous conforte dans l’idée que MARSEILLE est décidément un film mal nommé sans aspérité, bien-pensant, qui ne risque pas de bousculer le spectateur et surtout pas les clichés.

Sylvie-Noëlle

D’ACCORD ? PAS D’ACCORD ?

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Affiche du film MARSEILLE
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Titre original : Marseille
Réalisation : Kad Merad
Scénario : Kad Merad, Patrick Bosso, Judith El Zein
Acteurs principaux : Kad Merad, Patrick Bosso, Judith El Zein
Pays d’origine : France
Sortie : 16 mars 2016
Durée : 1h37min
Distributeur : Pathé Distribution
Synopsis : Devant l’insistance de son frère Joseph, qu’il n’a pas revu depuis 25 ans, Paolo se résout à abandonner quelques jours sa vie calme et harmonieuse au Canada, pour revenir à Marseille au chevet de son père accidenté. Il part donc, son fils sous le bras, bien décidé à ne pas s’attarder dans cette ville qu’il a fui, des années plus tôt, à la suite d’un drame. Il n’imagine pas que l’affection de sa famille retrouvée, sa rencontre amoureuse avec une jeune femme et la solidarité joyeuse et simple des Marseillais le réconcilieront avec cette ville qu’il n’aurait jamais voulu quitter… Marseille.

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