POURQUOI J'AI PAS MANGÉ MON PÈRE

[critique] POURQUOI J’AI PAS MANGÉ MON PÈRE

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casting
6
Scénario
5
Mise-en-scène
4
Direction artistique
3
Story-telling
2
Note des lecteurs14 Notes
3.9
4

[dropcap size=small]T[/dropcap]out en étant conscient de l’importance de POURQUOI J’AI PAS MANGÉ MON PÈRE (on va dire PJPMMP pour faire plus simple), et de la sincérité de Jamel Debbouze en tant qu’auteur du film, il est tout de même difficile de l’apprécier.

Car oui, PJPMMP est clairement un film personnel. Jamel y insuffle son amour pour sa femme, pour Louis de Funès, pour ses potes, pour lui-même… Croit dur comme fer à la mixité inter-générationnelle, à l’honnêteté des rapports « humains », à la démocratie… Mais il ne suffit pas d’y croire ou d’être sincère pour faire un bon film. Ou même un film tout court.

En fait le vrai (enfin le plus gros) problème selon moi, est le story-telling* défaillant de PJPMMP.
Il manque ainsi une véritable définition de cet univers, qui permettrait au spectateur d’avaler la pilule esthétique ou le one man show de son héros; De véritables enjeux, autres que « trouver sa place dans un monde qui rejette notre différence », permettraient d’accepter le manichéisme exacerbé du scénario… Puis une véritable empathie envers chacun, ce qui se construit progressivement par l’adéquation entre technique, acteurs, narration, scénario et mise-en-scène.

Bien sur, il existe d’autres moyens que ceux-ci de construire son récit, mais je ne suis pas du tout sensible à celle employée par Jamel, qui pour moi, pense trop son film de manière égocentrée et ferme complètement son film autour de son propre personnage, de son humour, de sa « sincérité »; les autres protagonistes ne servent alors que de faire-valoir, ou plus rares, de moteurs scénaristiques sans personnalité ni profondeur.
L’enchaînement des situations n’a aucune logique, aucun rythme. On peut passer en 15 min, de la gravité la plus hardcore à un changement de sujet total à base de vannes, puis à une scène prétendument comique dont le burlesque s’étire sans raison, avant de recommencer à pourrir l’ambiance.
Cette construction du récit est un problème encore plus grave que le simple scénario, qui même s’il est en soi, linéaire et classique, amène très régulièrement son lot de surprises. Carnivorum, tornades, morts, villes, montagne blanche… Jamais malheureusement, présentées autrement que par: Oh tiens, une [nommez la surprise] causant un irrémédiable et cumulatif manque de crédibilité.

Pourquoi j'ai pas mangé mon père (1)

Puis pêle-mêle, d’autres problèmes plus techniques, comme la direction artistique… Bien sur, c’est une question de goût. Mais les choix effectués laissent dubitatifs. L’univers de PJPMMP, un grand arbre dans lequel vivent les singes en harmonie avec leur environnement, est ouvertement inspiré d’Avatar, n’hésitant pas à carrément recopier plusieurs scènes du film de James Cameron… Mais lorsque celui-ci parvenait à rendre vivant, palpable et vrai cet environnement pourtant numérique (grâce, encore et toujours, à un story-telling inoriginal mais parfait), l’univers de PJPMMP ne dépasse pas jamais le stade du décorum.
Jamel et son équipe artistique semblent ensuite définir leur préhistoire comme dans le génial Croods de Dreamworks… Dans celui-ci, à l’image du design hommes-singes des personnages, toute espèce vivante (animale ou végétale) était un alliage de deux autres, une mutation contre nature. L’hideur artistique ainsi créée était assumée, et au service d’une inventivité de mise-en-scène et de situations sans cesse renouvelée. L’univers de Croods apparaissait au final comme cohérent, et crédible. Ce n’est pas le cas de celui de PJPMMP. L’intégration artistique au film est complètement ratée, dérange de la première à la dernière image. Les simiens, acteurs MoCapturisés ne « crient pas de vérité » comme se plaît à le mentionner la promo du film; En fait, les animateurs semblent croire que la définition HD des textures associée à une retranscription précise de mouvements suffisent à rendre un personnage (ou un environnement) vivant… Mais non; on en revient au problème de story-telling susmentionné qui empêche d’emblée, d’adhérer à ces aventures.

« j’adore Jamel, mais son PJPMMP est un échec total. Laid, techniquement à la ramasse, et surtout cinématographiquement défaillant. »

Enfin, une donnée importante. Quoi qu’il ne s’agisse en rien de qualité cinématographique; PJPMMP est l’un des films les plus chers de l’histoire du cinéma d’animation français. 23 millions d’€ de budget officiel, 50M€ d’après les rumeurs. Un coup de poker pour son auteur, Jamel, mais également pour ses producteurs, et pour voir plus loin, pour le cinéma français, puisqu’il nous représente à l’international… Mais pas la peine de se leurrer, le film va lamentablement se planter.

Si les enfants y trouveront peut-être leur compte, abasourdis par le flow ininterrompu de Jamel, le rythme absurde mais élevé du film, et quelques gags très visuels, impossible de nier le rendu final du film, à des années lumières – tant techniquement qu’artistiquement, des productions actuelles. Et l’on ne peut pas vanter la singularité française, car il s’agit vraiment d’un film à l’image de son auteur, dont l’esprit communautaire a contaminé son long métrage au point de le rendre inaccessible.

Les autres sorties du 8 avril 2015

POURQUOI J’AI PAS MANGÉ MON PÈRE, THE HUMBLING, LOST RIVERJAMAIS DE LA VIECLOCHETTE, CAKE, PROFANATION (et Miséricorde), L’ASTRAGALE, DARK PLACES, HISTOIRE DE JUDAS, LEOPARDI, etc

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8 avril 2015 - Pourquoi j'ai pas mangé mon père

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Titre original : Pourquoi j’ai pas mangé mon père
Réalisation : Jamel Debbouze
Scénario : Jamel Debbouze, Frédéric Fougea,  Olivier De Funès, D’après l’oeuvre de Roy Lewis
Acteurs principaux : Jamel Debbouze, Mélissa Theuriau, Arié Elmaleh
Pays d’origine : France
Sortie : 8 avril 2015
Durée :  1h35min
Distributeur : Pathé Distribution
Synopsis : L’histoire trépidante d’Edouard, fils aîné du roi des simiens (les pré-humains), qui, considéré à sa naissance comme trop malingre, est rejeté par sa tribu…

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*façon de construire son récit, et de raconter son histoire.

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