Critique du film No réalisé par Pablo Larrain avec Gael Garcia Bernal, Alfredo Castro, Antonia Zegers

[critique] No

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Affiche du film NO

Chili, 1988 : un référendum doit décider de la prorogation ou non du mandat d’Augusto Pinochet. Le camp du non met en place une campagne publicitaire, choisissant d’axer sa communication sur l’avenir plutôt que sur les attaques contre le dictateur… Sa victoire amorcera la fin du régime Pinochet.

Note de l’Auteur

[rating:9/10]

Date de sortie : 6 Mars 2013
Réalisé par Pablo Larrain
Avec Gael Garcia Bernal, Alfredo Castro, Antonia Zegers
Film chilien
Durée : 1h55min
Titre original : No
Bande-annonce :

A première vue, on voit un film qui explique la chute de Pinochet. Cette campagne de pub pour un référendum va déclarer les opposants vainqueurs. Pinochet tombe, laissant la dictature pour la démocratie. C’est alors un film qui se concentre sur le partie des opposants, les faisant passer pour les gentils. Le message est clair ici : la démocratie c’est bien, la dictature c’est mauvais. Ce film suit donc les opposants à Pinochet dans leur route vers la victoire, bien qu’eux-même n’en soient pas convaincus. En effet, comme le dirait l’un des personnages, ils ne croient pas en la victoire mais ils ont l’espoir de faire prendre conscience aux citoyens. Modestie et simplicité. Ce film ne va pas brandir des pancartes à l’encontre de Pinochet, il va réaliser une publicité contre le référendum.

Et pour cela, quoi de mieux qu’un homme qu’on n’attend pas à la tête du projet ? Un peu comme dans ces films où les losers deviennent les héros, ce film prend un monsieur tout-le-monde dans la publicité. Encore mieux, c’est un jeune. La fougue de la jeunesse peut amener beaucoup. La preuve, ce jeune publicitaire va refuser de réaliser une pub radicale où le seul but est de montrer des personnes se faire tabasser. Non. CE jeune publicitaire veut attirer les téléspectateurs par la joie. Il va amener dans cette campagne de l’opposition un peu d’humour, de sexy, des déambulations, de la chorégraphie, de la musique. Le mieux, il amène un arc-en-ciel. Vendu comme le symbole de plusieurs partis qui se rassemblent, il montre également la joie dans laquelle est faite le projet et la joie à venir.

Une joie qui approche et qui, selon la pub des partisans du « Non », va rassembler les chiliens. Tous les chiliens, dans la liberté et l’égalité. Du début à la fin, jamais sans ennui, ce film nous offre une ode au collectif. Encore mieux, ce film nous montre de quoi est capable l’être humain quand il s’intègre à un groupe, que ce groupe est plus fort en unissant toutes les intelligences de chaque membre. Et c’est comme ça, en se rassemblant, que l’on fait avancer une idée et un pays.

Photo (1) du film NO

Larrain, en cinéaste historien, nous parle du pouvoir des médias dans la politique. Avec un humour certain, il montre l’intelligence collective.

Ceci expliqué à travers un débat politique. Ce qui est formidable, c’est que nous avons un film à la fois historique et très moderne. Un film qui explique un pan de l’Histoire du Chili mais qui s’inscrit dans les méthodes contemporaines. La politique de notre temps utilise les médias pour se faire entendre et pour ringardiser les rivaux. Voilà une théorie qui se prouve avec ce film : les citoyens d’un pays se fient aux médias pour voter. Les citoyens d’un pays suivent et écoutent entièrement les médias pour alimenter la politique. Il y a dans ces messages publicitaires un semblant des apparitions d’hommes et femmes politique aux télévisions, quand ils débatent entre eux et finissent par se quereller en criant. C’est le passage des arguments aux attaques personnelles.

Un film plus personnel que l’on ne le pense aussi. Le titre pourrait nous faire penser à un film trop sérieux mais au contraire, c’est l’enthousiasme qui domine dans le film. Un enthousiasme sur un film où le réalisateur a clairement le désir de parler de son pays. Pablo Larrain se montre très à l’aise à se faire cinéaste historien et politique à la fois. A coup de chansons, de drapeaux, de sourires, de cartographie des quartiers, Pablo Larrain nous livre un grand amour pour son pays, comme une forme de reconnaissance envers ce changement politique qui libère la radicalité d’un film politique.

Pablo Larrain est aussi très à l’aise quand il s’agit d’ennivrer le spectateur avec ses images. Souvent caméra à l’épaule, pour un instant plus proche et plus vrai, le cinéaste nous livre son récit avec des images plutôt laides. Mais c’est une mocheté qui rend beau. Car ce qui saute aux yeux dans ce film, c’est la mise en abime du documentaire. Avec ses quelques défauts chromatiques, le film se trouve être un semblant de reportage fictionnel sur ce pan de l’histoire. Mais surtout, cette forme donne un avantage certain au film car Pablo Larrain y fait un savoureux mélange.

En intégrant des images d’archives à son film, Pablo Larrain livre un récit plus cohérent, plus vivant et plus galvanisant. En alternant les images choc et la joie dans le collectif, le cinéaste tourne ses images comme une dérision. Il nous offre ainsi la politique comme un objet fragile et presque acide mais qui touche à l’intime (il n’y qu’à regarder ces gros plans). Grâce à tout cela, Pablo Larrain nous dit qu’il reste un côté gracieux dans la politique, qu’on peut encore y croire.

Photo (2) du film NO

Finalement, No est un film réussi sur tous les plans. Avec un humour implacable, Pablo Larrain arrive à nous dire qu’on peut toujours croire et trouver de la grâce dans la politique. Avec une intelligence collective, on peut arriver à nos fins. Là où on pourrait voir un film élogieux sur la démocratie et crachant sur la dictature, on a surtout un film joyeux et saisissant sur le pouvoir des médias dans la politique. Tout ceci en parallèle d’un cinéaste qui aime son pays, se faisant historien en incrustant des images d’archives éclatante dans sa fiction tournée comme un documentaire.

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