Photo du film A DARK-DARK MAN

A DARK-DARK MAN, le Fargo kazakh – Critique

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En attendant Atbai’s Fight, Yellow Cat, Ulbolsyn, Onbagandar et Ademoka’s Education, ses… cinq nouveaux films déjà tournés qui devraient s’égrainer sur les deux prochaines années, la nouvelle coqueluche des festivals Adilkhan Yerzhanov sort en France A DARK-DARK MAN, un polar grinçant et fataliste sur la nature de l’Homme moderne.

On avait laissé le kazakh Adilkhan Yerzhanov au sublime La Tendre indifférence du monde, et même si le décor n’est pas tout à fait le même, il n’en faut pas plus pour tracer une ligne esthétique : faite de scope, de plans d’ensembles figés, d’observation des corps humains isolés dans un espace qui les dépasse de loin. Déjà, le premier s’échappait des villes pour retrouver une certaine ruralité, pour une respiration visuelle et narrative totale ; A DARK-DARK MAN prend le parti-pris de trancher de manière encore plus violente : fini les villes, vous êtes les bienvenus dans les steppes kazakhs.

Impossible de ne pas penser aux frères Coen, qui ont d’ailleurs été cités dans tout ce qui a été écrit touchant de près ou de loin au film de Yerzhanov. La raison, davantage que visuelle (décor désertique, grands angles, cadre fixe, déplacements des personnages), scénaristique (ton doux-amer teinté d’humour noir et de polar systémique), est aussi philosophique : le portrait d’une frange de l’humanité qui, en marge de la noirceur, laisse pourtant entrevoir de la lumière. Il y a, dans les tréfonds terribles de la nature humaine, l’espoir d’un bout de poésie. Celle d’une sagesse, d’un amour, ou d’une vague belle intention qui vient révolutionner son monde et bousculer tous les méfaits. Au fond, contrairement à ce qu’on en dit systématiquement, les Coen sont des utopiques à défaut d’être des optimistes. Yerzhanov les rejoint en cela : derrière la violence endémique, un lyrisme, mais aussi une plénitude.

A Dark-Dark Man

A DARK-DARK MAN s’articule en silences, en contemplations : il déforme l’horreur en faisant d’elle un maigre détail d’un schéma plus large. Comme si elle n’était qu’un simple geste. Un geste qui compose ses tableaux, mais qui n’arrive pas à les bousculer – la véritable vague qui vient déferler sur ses coups de pinceau, c’est celle des sentiments. Au fond, c’est une belle conception du monde que propose Yerzhanov : celle, déjà énoncée dans le titre de son précédent métrage, d’une tendre indifférence. A quoi bon se chahuter de la souffrance si on ne transcende pas soi-même les bourreaux, les oppresseurs ?

Western défaillant de la même manière que Taxi Driver était un polar déréglé, A DARK-DARK MAN est une véritable confirmation, à défaut d’une consécration : alors qu’il nous prépare (déjà terminés ou en post-production) le nombre astronomique de cinq films, Yerzhanov renouvelle sans trahir ni copier sa précédente œuvre. Nouvelle variation sur l’inadaptabilité à la société, les genres se croisent et défilent pour au final se façonner à sa manière, comme un objet filmique indéfinissable et pourtant si familier – celui d’un cinéphile, oui, mais d’un auteur qui a des choses à dire, avant tout.

Vivien

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Titre original : A Dark-Dark Man• Réalisation : Adilkhan Yerzhanov• Scénario :Adilkhan Yerzhanov, Roelof-Jan Minneboo• Acteurs principaux : Daniar Alshinov, Dinara Baktybaeva, Teoman Khos• Date de sortie : 14octobre 2020• Durée : 1h50min
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