Buster Keaton enchaîne les gags et fait preuve d’une maîtrise technique impressionnante avec Fiancées en folie (1925), dans lequel un riche millionnaire doit fuir une armée de femmes en furie.
Adapté d’une pièce de Broadway de Roi Cooper Megrue, (Les) FIANCÉES EN FOLIE (1925) réalisé par Buster Keaton et produit par Joseph Schenck, est une petite merveille burlesque et l’exemple parfait de ce que le cinéma muet pouvait offrir de mieux à l’époque. Parfaitement rythmé, FIANCÉES EN FOLIE multiplie les gags de grande facture (humoristique mais aussi technique) avec ceux d’un goût plus douteux. En effet, plusieurs gags sont tournés autour de la figure du noir (un domestique un brin imbécile) ce qui donne une idée de l’humour toléré à l’époque. Cependant, le film s’amuse également des conventions sociales liées au mariage, parodiant ses propres rituels (faire sa proposition à genoux, la cérémonie à l’église). Et donne à la figure féminine un ascendant non négligeable. C’est pour une fois l’homme qui est assiégé de bonnes femmes, et plus vilaines qu’à l’accoutumée en plus.
Une nouvelle fois, Keaton excelle dans son rôle du gentil benêt timide venant tout juste d’hériter d’une importante somme d’argent mais qui, pour l’obtenir, doit se marier avant la fin de la journée. Cette fameuse journée ne sera dès lors qu’une succession de gags sous forme de refus (apprendre à s’agenouiller romantiquement, le coup du papier en mille morceaux, les allers et retour dans les escaliers, etc.) jusqu’au moment où ses deux complices, tentant de « l’aider» via une annonce disons racoleuse (« jeune millionnaire cherche à se marier !« ), l’obligent à fuir une armée de femmes en furie. C’est le moment que choisit le film pour offrir une impressionnante course-poursuite qui donne à Keaton la possibilité de montrer son ingéniosité burlesque ainsi que ses incroyables capacités physiques. Durant cette course folle, Keaton devra tour à tour sauter à un arbre, plonger dans une rivière, gravir des falaises, éviter des éboulements de rocher pour finalement arriver en retard chez lui, pense-t-il d’abord, pour se marier avec sa dulcinée Mary. Heureusement, sa montre étant cassée, le mariage peut finalement avoir lieu. FIANCÉES EN FOLIE enchaîne donc les gags avec une précision géométrique (sens du cadre) et une frénésie (sens du montage), absolument effarant de maîtrise.
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Néanmoins, son prologue offre une petite parenthèse dramatique du plus bel effet via des ellipses et des cartons d’une grande beauté plastique révélant la nature « anti-héroïque » de Keaton (il ne triche jamais, il n’est pas rusé comme Chaplin). Tout le reste du film, tous les gags, participeront à ce décalage impitoyable entre le côté victime et persécuté du personnage et son envie de rentrer dans le rang, en devenant enfin un vrai héros. Ressortie par Splendor Films, ce classique du cinéma muet est une belle entrée en matière dans l’univers keatonien, aussi mouvementée qu’irrésistible.
Antoine Gaudé
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• Réalisation : Buster Keaton
• Acteurs principaux : Buster Keaton, Ruth Dwyer, T. Roy Barnes
• Durée : 56min
• Réalisation : Buster Keaton
• Scénario : Roi Cooper Megrue d'après David Belasco
• Acteurs principaux : Buster Keaton, Ruth Dwyer, T. Roy Barnes
• Date de sortie : 1925 (ressortie 8 mars 2017)
• Durée : 1h17min