YOUTH

YOUTH, moment de cinéma moderne et libéré – Critique

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Mise en scène
9
Scénario
4
Personnages/Casting
9
Photographie
10
Musique
9
Note des lecteurs13 Notes
7.8
8.2

Les premières images suivies du teaser laissaient filtrer une beauté plastique une nouvelle fois remarquable venant de la part de l’esthète qu’est Paolo Sorrentino.

Et une nouvelle fois, c’est ce qui nous saute aux yeux dès les premiers plans de sa toute dernière création (à une exception près). La composition de ces derniers, la précision époustouflante des cadrages, des décors naturels intérieurs luxueusement garnis et des extérieurs magnifiquement photographiés. S’il est vrai que la beauté des alpes suisses se suffit à elle-même, on peut d’ores et déjà affirmer qu’il s’agit d’un des travaux les plus aboutis et sublimes de la compétition en matière de photographie (avec aussi le soporifique mais sidérant de beauté The Assassin).

C’est donc bien au cœur des alpes que se déroule le soi-disant récit de YOUTH, qui nous propose d’observer deux très vieux amis, l’un compositeur (Michael Caine) et l’autre cinéaste (Harvey Keitel), en vacances dans un hôtel qu’ils connaissent bien. Il méditent sur la vie qui est derrière eux et celle qui continue de défiler, rencontrant ici et là une galerie de personnages, parmi lesquels de très jeunes gens, une « jeunesse » prêtant son titre au film, en anglais comme en italien. Ces générations opposées se croisant et se décroisant, contribuent à enrichir la thérapie à laquelle s’adonnent nos deux vieux blasés sur leur devenir, tandis que Sorrentino nous régale en mettant en scène le corps humain. Car dans ce richissime hôtel, il n’est pas rare de profiter des activités annexes vêtu du plus simple appareil. Et je ne fais pas seulement référence à l’affiche déjà cul(te), mais aussi à la superbe manière dont l’Italien capte les corps les plus ridés et les plus fatigués, ayant recours à une créativité visuelle peu commune. On est donc d’autant plus surpris d’assister décontenancés à une séquence assez laide et ce malgré sa pseudo justification. Ce ne sera malheureusement pas le seul faux pas du film, qui atteint ses limites assez tôt, dévoilant son inégalité.

Photo du film YOUTH
© Gianni Fiorito

Le pitch, d’une platitude déjà assez inquiétante, révèle assez vite une quasi-absence totale de scénario. Ou du moins, l’absence d’un récit structuré et cohérent racontant une histoire. Car YOUTH, c’est beaucoup plus que cela. Ce sont des histoires. L’histoire de personnages fantaisistes et blasés, l’histoire de dialogues savoureux et cinglants, mais aussi celle de purs moments de cinéma marquants. L’histoire d’un cinéaste devenant peut être de plus en plus important malgré la division qu’il continuera de susciter. Lorsque Paolo Sorrentino dégaine sa plume, c’est pour la faire virevolter avec maestria, créant des situations et des rencontres tour à tour hilarantes, oniriques, cruelles et même touchantes. Il y injecte une nouvelle fois ses obsessions, donnant matière à réfléchir autour de thèmes plus ou moins proches envers le spectateur. Un des principaux points qui lui vaut de récolter le mépris de ses détracteurs. Des détracteurs qui commencent tout doucement à retourner leur veste, à en entendre les nombreuses réactions à chaud en sortant de la salle. Parce qu’ils ont été surpris de redécouvrir l’Italien “prétentieux” dans un registre plus sage et tendre. Car par-delà la nouvelle démonstration visuelle de savoir-faire absolu, cette nouvelle fable peut s’avérer attachante, et plus si affinités…

Somptueux et traversé de merveilleux moments de cinéma, YOUTH est sans doute le meilleur film de son auteur.

Ainsi, le monologue puissant de la fille de Fred (Rachel Weisz) est un bijou d’écriture, nous en apprenant en une poignée de secondes bien plus que n’importe quel autre film de 1h30 au sujet d’un personnage. C’est bien simple, passé ce plan, il nous semble avoir vécu toute cette vie aux côtés de ce vieil homme, dont les secrets et les excès ne sont désormais plus tus. On accepte tout naturellement de continuer à le suivre, lui ayant comme instantanément tout pardonné, mêmes les épisodes de sa vie passée qui étaient probablement beaucoup moins pardonnables. Il y a aussi ce face à face mordant entre une actrice (Jane Fonda) et un réalisateur en toute fin de carrière, désireux de mettre en scène à nouveau (Harvey Keitel), autour de la longévité du métier d’artiste. Avec toute l’ironie de son auteur bien sûr.

Photo du film YOUTH
© Gianni Fiorito

La deuxième partie du film est un peu en demi-teinte. Le discours commence à tourner un peu en rond. Elle est aussi moins surprenante et aguicheuse que la première, car un peu plus verbeuse, mais toujours traversée par ces mêmes illuminations divines, avec une mention spéciale à la bande originale : les choix musicaux de Sorrentino sont toujours extraordinaires de diversité, contribuant énormément à embellir royalement sa mise en scène presque parfaite. Jusqu’à une ultime séquence lumineuse, touchée par la grâce. Au final, on se souvient de YOUTH non pas pour ses quelques imperfections mais comme d’un moment de cinéma moderne et libéré.

Loris

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