Dans MAPS TO THE STARS, David Cronenberg ne s’attaque pas aux vices d’Hollywood, il fulmine les people ! Derrière les affiches de films, les sourires et les photographies sur papier glacé, la Capitale du Cinéma regorge d’étoiles aux vies brisées par l’inceste, le sang et la drogue.
Criant de vérité, ce cocktail détonant sur une musique au rythme saccadé s’ouvre en milieu de scène. Nous ne savons pas vraiment ce qu’il se passe, mais peu importe, nous sommes déjà intrigués par le duo Pattinson / Wasikowska. S’ensuit alors une présentation précise de chacun des personnages, leur donnant une identité propre et une personnalité bien précise. Quelque peu malsaine, l’intrigue ne s’essouffle pas, bien au contraire. Seulement, certaines scènes sont un peu vides ou non abouties en milieu de film, entrant ainsi en contraste avec les moments phares de l’action. La scène finale met en avant la fatalité de l’existence. Quoi que l’on fasse, qui que nous sommes, nous revenons toujours à nos origines. Grande originalité du film, l’omniprésence du poème Liberté de Paul Eluard. Bien que l’interprétation est extrêmement subjective, on peut le voir comme la morale de l’histoire : la célébrité n’est pas une liberté.
Malgré les nombreuses vues alléchantes de Los Angeles, on aurait tout de même souhaité en voir un peu plus. David Cronenberg fait fît à la forme pour laisser place à des personnages profonds et un synopsis étoffé. Plus qu’un drame, ce film illustre une véritable philosophie. Jusqu’où irions-nous pour protéger notre image ? Jusqu’où sommes-nous prêts à aller pour retrouver quelques heures de gloire ?
Après Viggo Mortensen, la nouvelle coqueluche du réalisateur depuis Cosmopolis, Robert Pattinson (rôle : Jerome Fontana) est de nouveau en tête d’affiche, sauf que contrairement au précédent film, son rôle est assez mineur et son personnage n’a presque aucun impact dans l’intrigue. David Cronenberg est pris à son propre jeu. En réalisant une raillerie sur Hollywood, il place Pattinson dans ses trois têtes d’affiches alors qu’il n’apparaît qu’une trentaine de minutes sur 1h51. Par exemple, le personnage de Benjie Weiss (interprété par Evan Bird) est beaucoup plus central, mais son interprète est quasi-inconnu, surtout à côté de Robert, donc forcément, il faut se montrer stratégique pour attirer le spectateur. Autre muse de David Cronenberg, Sarah Gadon revient en délicieux fantôme dans le rôle de Clarice Taggart, la mère d’Havana Segrand.
Une satire entière, sans complexes, qui ne laisse pas place à l’ennui.
La fraîchement palmée Julianne Moore est excellente en actrice torturée par son passé douloureux en quête de jeunesse et de reconnaissance éternelles. A première vue, son personnage – Havana Segrand – est un cliché : une blonde déchue ,adepte de diverses thérapies peu fondées, obsédée par son âge, addict des médicaments et de la bouteille, mais elle est en fait l’illustration même du mal hollywoodien. Vous adorerez détester cette attachante peste. Mia Wasikowska troque ses longs cheveux d’or pour se glisser dans la peau d’Agatha Weiss, schizophrène et déterminée. Tout comme Julianne Moore, son interprétation est brillante. Imprévisible, sympathique mais terrifiante, elle conduit l’intrigue avec brio et en est le coeur même ! On saluera également la bonne performance d’Olivia Williams (rôle : Christina Weiss) et de John Cusack (rôle : Bruno Weiss) en caricature du couple « in » prêt à tout pour protéger ses plus noirs secrets.
La présence des fantômes peut s’interpréter d’une infinité de manières mais elle relève principalement du fait que certaines étoiles disparues hantent encore Hollywood par leur succès intemporel comme par exemple Marylin Monroe, James Dean, Audrey Hepburn, etc… De plus, ils sont aussi la représentation des vices du succès. La petite fille rappelle à Benjie sa superficialité tandis que le petit garçon le ronge de culpabilité. Quant à la mère d’Havanna, elle lui soutient que quoiqu’elle fasse, elle ne retrouvera pas sa gloire passée, la tourmentant davantage dans sa névrose autour de la célébrité.
MAPS TO THE STARS est une satire entière sans complexes qui ne laisse pas place à l’ennui. Porté par un casting inter-générationel de qualité, il démystifie le glamour pour laisser place à la malédiction d’Hollywood sans sombrer dans le pathos. Fidèle à lui-même, David Cronenberg nous livre un film parfois cru, sans tabou ni enjolivements. Brûlant la façade des stars, il nous offre sur un plateau les dessous du mythe hollywoodien pour notre plus grand plaisir !
Christelle Cozzi