Bilan cinéma : Top / Flop 2010

Aurelie 19 janvier 2011

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Flash-back sur l’année 2010. Ce que l’on garde au fond de soi, ce que l’on jette aux oubliettes. Dans la liste des films sortis l’année dernière, certains ont déjà disparu de notre mémoire depuis longtemps, d’autres idéalisés par le souvenir d’un moment passé entre amis ou aimés parce que liés au sentiment amoureux. Et puis il y a les chefs-d’œuvres incontestables, les films qui vous bouleversent sans trop savoir pourquoi, un acteur qui crève l’écran, l’identification à un personnage, autant d’éléments qui rendent impossible de dresser un bilan impartial parce que forcement personnel. Je vais donc mettre toute ma mauvaise foi, et un parti pris certainement très discutable dans cet inventaire cinématographique.

Mais le cinéma est avant tout une industrie, alors commençons par un récapitulatif des chiffres.
2010 fut une année record pour les entrées dans les salles de cinéma. Aucun film n’a dépassé la barre des 6 millions d’entrées mais beaucoup ont fait plus de 3 millions : Harry Potter Et Les Reliques De La Mort, a engrangé 5,3 millions d’entrées, talonné par Les Petits Mouchoirs, film français de Guillaume Canet (5,2 millions). Suivent les américains avec Inception (4,9 millions), Shrek 4 (4,6 millions), Alice Au Pays Des Merveilles (4,5 millions)et Toy Story 3 (4,3 millions).

Le cinéma américain a occupé encore pratiquement la moitié de la part du marché mais on notera une petite progression des films non français et non américains.

Le cinéma hexagonal a connu des succès surprises, avec L’Arnacoeur (3,9 millions), Des Hommes Et Des Dieux (3,1 millions) et Potiche (2,2 millions). Il est pourtant important de constater une grande disparité dans ce paysage. Ainsi pour un succès inespéré combien ont été éjectés des écrans au bout d’une semaine ou diffusés dans quelques salles pour laisser la place à des films plus rentables. Les Mystères de Lisbonne (4 heures 30 !) de Raoul Ruiz ont rassemblé 48 361 spectateurs et Oncle Boonmee d’Apichatpong Weerasethakul, Palme d’Or 2010 a comptabilisé 127 511 spectateurs, ce qui signifie tout même qu’il y a un certain public près à aller voir des films plus pointus.

Certains n’ont pas réussi à trouver leur public. Le Refuge de François Ozon a attiré environ 100.000 spectateurs, idem pour Ensemble Nous Allons Vivre Une Très Très Grande Histoire D’Amour de Pascal Thomas et seulement 30.000 entrées pour Au Fond Des Bois de Benoît Jacquot. D’autres n’ont eu que ce qu’ils méritaient avec en tête de liste Le Baltringue déplaçant 40.000 personnes de trop et AO – Le Dernier Neandertal qui avec un budget de 13 millions a seulement comptabilisé 200 000 entrées.

2010 aura connu l’émergence d’un « certain cinéma français » fait par de jeunes réalisateurs prometteurs. La Vie Au Ranch de Sophie Letourneur, Memory Lane de Mikhaël Hers, Rubber de Quentin Duprieux continuent d’explorer des sentiers nouveaux, à l’image de Les Beaux Gosses de Riad Sattouf sorti en 2009. Autrement plus intéressants que Les Petits Mouchoirs qui pendant 2h30 (durée habituellement réservée aux grandes fresques historiques ou au chef- d’œuvre et maintenant au couple people Canet/Cotillard..) se contente de filmer les yeux larmoyants de Marion Cotillard pour faire pleurer dans les chaumières. Pour Luc Besson, on regrette l’époque de Subway et de Nikita, lorsqu’il essayait de dire quelque chose même confusément. Aujourd’hui il réussit la prouesse de rendre Mathieu Amalric ridicule dans son Les Aventures Extraordinaires D’Adèle Blanc-Sec.
Regrettable aussi les filles de Sex And The City qui ont bercé mon adolescence et dont je recommande leur compagnie, parce que j’ai une théorie selon laquelle tout problème (de fille) trouve sa réponse dans un épisode de Sex And The City. Mais Michael Patrick King a fait un film édulcoré rempli de clichés ayant pour sujet la dernière collection Chanel version désert. Toujours dans la mode, Tom Ford aurait pu s’abstenir de vouloir faire un film, confondant abusivement esthétique et esthétisant.

Mais 2010 a vu de vrais auteurs construire des œuvres passionnantes. Abdellatif Kechiche devient avec Vénus Noire l’un des réalisateurs français les plus captivants. Après La Graine Et Le Mulet qui avait raflé des César, il envoie valser ce cinéma césarisé pour s’intéresser à la descente aux enfers de Saartjie Baartman et pointer du doigt le regard inquisiteur du colonialisme à travers cette histoire universelle. Gaspar Noé, autre cinéaste français en marge du système, a enfanté d’un film hallucinant et halluciné, sans doute pas suffisamment riche dans le fond pour être le numéro un mais déjà incroyablement révolutionnaire dans la forme. Habitué du Festival de Cannes, comme son compatriote Olivier Assayas qui dît-on aurait pu remporter la Palme d’Or si le film Carlos avait été en compétition, on attend avec impatience leurs prochaines créations.

Outre Atlantique, Werner Herzog adapte le film d’Abel Ferrara, Bad Lieutenant et donne à Nicolas Cage l’un des ses meilleurs rôles depuis A Tombeau Ouvert de Martin Scorsese. Aimant les figures de possédé, on progresse dans une vision du Mal, au milieu des reptiles à la Nouvelle-Orléans après l’ouragan Katrina. La grande force du cinéma américain est de poser son sujet sur des faits réels, un contexte bien particulier pour ensuite mieux s’en détacher et proposer une vraie réflexion. David Fincher en est l’exemple parfait. Il a fait le seul film de procès dont on se moque de connaître le jugement, parce que le sujet est avant tout la fin d’une époque. Contemporain et pourtant tellement intemporel, qui aurait pu imaginer que Mark Zuckerberg soit aussi inspirant.
Alors après réflexion, mon film idéal version 2010 est composé de Barbie accompagnée de danseuses burlesques, séduisant Nicolas Cage et Tommy Lee Jones, sur les traces d’une histoire de meurtre à Jaffa perpétré par Carlos. Mais tout ça n’est qu’une mascarade organisée par Banksy pour être diffusée sur Facebook.