Débarqué à la surprise générale sur Netflix, ce troisième film estampillé Cloverfield restera un beau coup marketing mais qu’en est-il du film ?
Le SuperBowl est toujours le théâtre de surprenants événements. Cette année, Netflix a frappé un grand coup en diffusant un premier teaser du mystérieux 2018 Cloverfield Movie (rebaptisé The Cloverfield Paradox) attendu initialement pour le courant de l’année dans nos salles. Plus que cela, et c’est tout le génie marketing de l’opération : le film est directement mis en ligne aussitôt le match terminé. Une première, un véritable séisme qui bouscule les habitudes et les méthodes classiques de distribution. À y regarder de plus près, le mariage Cloverfield/Netflix sonne comme une évidence sur le papier. La franchise initiée par J.J. Abrams et la plateforme de streaming aiment autant l’un que l’autre provoquer le buzz en mettant en place des dispositifs marketing savamment élaborés. Après tout le bruit engendré par sa présence à Cannes, Netflix est bien décidé à ne pas rentrer dans le rang et continue de bousculer le petit monde du 7ème art. Et maintenant, le film. Qu’est ce que ce Cloverfield Paradox ? Alors que le monde subit une forte crise énergétique, une équipe est mandatée par plusieurs pays pour partir dans l’espace afin de mettre en service un accélérateur de particules censé résoudre leurs soucis. Lors de la mise en route, tout ne va pas se passer comme prévu et d’étranges phénomènes vont se manifester à bord de la station spatiale. Rappelons qu’après le premier Cloverfield, J.J. Abrams a eu l’idée de développer la franchise en créant plusieurs films qui enrichiraient l’univers. Des histoires parallèles, liées plus ou moins à l’original. Une idée pas débile ayant permis d’accoucher en 2016 de 10 Cloverfield Lane, huis clos aussi surprenant qu’efficace. En l’occurrence, ce troisième film se déroule avant et pendant les événements du premier.
On peut légitimement se poser des questions sur le cheminement qui a poussé la Paramount à céder son projet secret à Netflix. Simple envie de faire un coup de com’ ou une démarche en forme de cache-misère ? La question se pose encore plus une fois que l’on visionne ce Cloverfield Paradox tant le résultat fait d’un coup retomber tout l’engouement provoqué par son mode de diffusion. On était en droit de s’attendre à quelques révélations par rapport au monstre débarqué sur Terre et le film balbutie ses réponses, murmurant au détour de quelques scènes divers petits indices tout en restant cryptique dans les grandes lignes. Intriguant dans son premier tiers, The Cloverfield Paradox devient peu à peu une série B insignifiante, faussement complexe (utiliser des mots scientifiques ne rend pas un film intelligent) et assez mal rythmée. On en oublierait d’ailleurs presque ce que l’on regarde si les 5 dernières minutes ne venaient pas rattacher l’ensemble aux événements de Cloverfield. Ce plan final, assez jouissif, ne mérite cependant pas que l’on endure péniblement 1h40.
Ces paramètres connus, il est plus aisé de comprendre pourquoi la Paramount a dû sauter sur l’opportunité Netflix afin de provoquer un enthousiasme artificiel autour d’un projet qui aurait eu du mal à supporter la case « grand écran ». Probablement que le studio se demandait comment vendre un produit moyennement convaincant, réalisé par un no-name, doté d’un casting méconnu du grand public (excepté Daniel Brühl ?) et découlant d’une série B sortie courant 2008. Il y a finalement plus à dire sur tout ce qui entoure la sortie de The Cloverfield Paradox plutôt que sur le film lui-même, le peu de cinéma présent dedans ne mérite pas qu’on lui accorde une attention particulière. Exactement le même constat que l’on faisait en 2008 lorsque Cloverfield sortait après une campagne promotionnelle épique – un constat moins sévère, le long-métrage de Matt Reeves possédait un certain potentiel divertissant. On appelle cela un coup d’épée dans l’eau.
Maxime Bedini
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• Réalisation : Julius Onah
• Scénario : Doug Jung & Oren Uziel
• Acteurs principaux : Elizabeth Debicki, Gugu Mbatha-Raw, David Oyelowo
• Date de sortie : 5 Février 2018 sur Netflix
• Durée : 1h42min