L'AFFAIRE SK1

[critique] L’AFFAIRE SK1

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English review

Assez méconnue des jeunes adultes actuels, l’affaire Guy Georges, ou la traque du « Serial Killer numéro 1 » (SK1) a pourtant fait beaucoup parler d’elle entre les années 1980 et 2000.

Surnommé « Le tueur de l’est parisien » ou « Le tueur de la Bastille », Guy Georges a sévi entre 1981 et 1997, tuant sept jeunes filles sur les onze qu’il a agressé. Violeur et tueur incontrôlable au passé extrêmement sulfureux, il a écopé d’une peine de prison à perpétuité. C’est d’ailleurs cette affaire qui a légalisé l’utilisation des fichiers ADN dans les enquêtes criminelles.

Le réalisateur, Frédéric Tellier, a choisi de s’opposer fermement à Guy Georges. Afin de ne pas prendre le risque de l’ériger en héros, il l’a relayé au second plan. Aucun élément de sa vie n’est mentionné, on ne cherche pas à le comprendre, on ne le perçoit uniquement comme un monstre et non comme un homme. Le film porte majoritairement sur le travail du 36 Quai des Orfèvres, du premier meurtre à l’arrestation. Protagoniste principal et pilier de l’histoire, Frank Magne (Raphaël Personnaz) est l’inspecteur chargé de l’enquête. Entre 1991 et 1998, il va se consacrer intégralement à la piste de ce meurtrier invisible. La prestation de Personnaz est d’ailleurs excellente, tout comme celle de Marianne Denicourt, incarnant la chef de la criminologie. Nerveux, persévérants, passionnés, ils se sont parfaitement glissés dans la peau de leurs personnages. Leur jeu est fortement convaincant et arrive même à dépasser celui de Nathalie Baye (Frédérique Pons), qui n’a pourtant plus rien à prouver. Toutefois, elle incarne avec panache cette avocate qui doute jusqu’au bout de Guy Georges. On peut également saluer les performances d’Olivier Gourmet, Michel Vuillermoz et Thierry Neuvic, respectivement Bougon, Carbonel et Jensen.

Photo du film L'AFFAIRE SK1

Majoritairement composé de faits réels, le scénario demeure tout de même une adaptation libre de l’enquête. Les rares moments faibles sont les éléments fictifs de l’intrigue. Tout comme l’écriture, le casting est presque sans faute et le point noir se situe chez les rôles très secondaires, voire tertiaires. Par exemple, la compagne de Franck est insipide. Leur vie personnelle n’est que vaguement abordée, donnant un effet de remplissage. Ce choix artistique a certainement été fait pour montrer à quel point la vie de l’enquêteur était conduite par l’affaire, mais un développement ou une suppression totale de cet aspect du film aurait été peut-être plus judicieux. En revanche, les ellipses temporelles sont un bon point. L’essentiel des faits est présent et cela a évité de nombreuses longueurs inutiles. L’affaire SK1 est un thriller haletant qui, malgré ses éléments fictifs, retrace intelligemment la traque de Guy Georges. Le spectacle ne travestit pas la réalité, une synthèse est simplement effectuée, ce qui catégorise l’intrigue comme étant un « docu-fiction ».

Le film se découpe en trois parties. Il y a tout d’abord les premières pistes de l’enquête, vaines dans la majorité, où le spectateur est lui-même perdu. Qui est ce meurtrier ? Quel(s) rapport(s) entre toutes ces victimes ? Même pour ceux qui connaissent déjà l’affaire, le doute subsiste. Vient ensuite le coeur de l’affaire, jusqu’à l’arrestation. L’enquête s’éclaircit petit à petit, s’assombrit à nouveau puis mène à de nouvelles conclusions. Guy Georges commence à apparaître.

« L’affaire SK1 est un thriller haletant qui, malgré ses éléments fictifs, retrace intelligemment la traque de Guy Georges. »

Le spectateur et l’enquêteur ne font qu’un. On ne découvre le visage du monstre que petit à petit. Au début, on ne fait que l’apercevoir, on l’entend vaguement, on le suit, puis il se dévoile. L’arrestation puis le procès constituent les moments les plus intenses de l’intrigue. Le moment phare est la garde à vue de Guy Georges. Face à Franck Magne, il va expliquer froidement comment il a basculé. Larmes, cris, incompréhension et haine sont la trame de fond de l’audience qui s’ensuit. On oublie Adama Niane (Guy Georges), on ne voit plus que son personnage. Sa performance est si pertinente que l’on ne sait plus si l’on est face à un véritable procès ou au cinéma. Comme pour les précédentes scènes, on cherche à troubler le spectateur, pari gagné ! L’audience, à la fois si puissante et répugnante, est assimilable à des moments aussi forts mais insoutenables du cinéma, comme par exemple la scène de viol entre Robert de Niro et Elisabeth McGovern dans Il était une fois en Amérique de Sergio Leone.

Si la mise en scène, le scénario et le casting ne peuvent être remis en question, la forme est d’une qualité moindre. Malgré les plans esthétiques de la capitale et les quelques morceaux classiques contribuant à la tension électrique de l’intrigue, la mise en scène n’a pas réussi à sauver ces aspects. L’ensemble est bon, mais le dernier tiers de l’histoire ne peut vraiment laisser personne de marbre par sa force émotionnelle. Passionnant et palpitant, L’affaire SK1 est à voir absolument et figurera certainement dans la liste des meilleurs thrillers de 2015.

 

Mise en scène
Scénario
Casting
Photographie
Musique
Note des lecteurs5 Notes
4.1
Note du rédacteur

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Rédactrice depuis le 26.04.2014

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Mise en scène
Scénario
Casting
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Note finale