rogue nation
© Paramount Pictures France

MISSION IMPOSSIBLE : ROGUE NATION, film d’espionnage digne de ce nom – Critique

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Il y a une méprise totale sur le cinéma d’action américain : il est tout sauf stupide. MISSION IMPOSSIBLE : ROGUE NATION montre toute la maîtrise du langage cinématographique (valeurs de plans, montage, narration visuelle) au service d’un divertissement.

Le film a beau avoir coûté des centaines de millions de dollars, c’est bien avec des effets très peu spéciaux qu’il nous a totalement emballé : des supers acteurs, des dialogues à tiroirs et du suspense. Élégant, fun et prenant, MISSION IMPOSSIBLE : ROGUE NATION renoue avec le film d’espionnage imprévisible tout en maintenant le rythme à 200km/h. Les scènes d’action toujours lisibles et maîtrisées, tout en étant parfaitement ludiques grâce à une inventivité de la mise en scène, effacée derrière un style faussement classique. Au-delà de ce plaisir purement visuel, la poursuite de l’intrigue s’avère être la grande satisfaction de ce nouveau MISSION IMPOSSIBLE, grâce notamment à la subtile et mystérieuse Rebecca Ferguson.

Son personnage d’agent double (voire triple ?) est au cœur de l’histoire de ROGUE NATION. Car derrière l’existence supposée d’une organisation maléfique du nom de Syndicate, s’est surtout les pratiques de l’espionnage contemporain qui sont mis en scène. Certes, les gadgets sont fantaisistes, mais les comportements troubles de nos agents secrets sont bien réalistes. Trahison, coup monté, dissimulation, perte des repères… autant d’aspects qui font de ce MISSION IMPOSSIBLE un film d’espions digne de ce nom.

Rebecca Ferguson joue un agent britannique charmant et redoutable qui viendra à la rescousse de Tom Cruise, mais celui-ci la retrouvera très vite dans des situations plus compliquées, où elle mettra sa vie en danger à plusieurs reprises. La jeune femme est sans cesse à la limite de voler la place de star à Tom Cruise. Elle sait parfaitement comment s’effacer juste avant que cela ne devienne trop évident. Son caractère bien trempé semble en totale adéquation avec son personnage. L’actrice suédoise a pris modèle sur la star américaine en s’entrainant intensivement pendant un mois pour réaliser ses propres cascades. Une performance d’autant plus impressionnante qu’elle a le vertige et qu’elle a plusieurs fois été confronté au vide.
L’élégance et l’imprévisibilité de Rebecca Ferguson se retrouve dans chaque aspect de la mise en scène. La séquence de l’opéra est la séquence la moins « spectaculaire » et pourtant elle restera dans nos mémoires comme formidablement exécutée grâce à ses qualités. Jeu sur les profondeurs, les échelles, recouvrements et dévoilements, font de cette partie du film un gigantesque rubix cub organique et jouissif, au crescendo en harmonie avec celui de la musique. Ne disposant que de très peu de temps pour filmer dans le véritable opéra de Vienne, l’équipe de Christopher McQuarrie a tourné tous les plans raccords en reconstruisant le décor dans un immense studio de son à Londres. Impossible de constater une fausse couture dans ce magnifique costume. Tous les plans où Tom Cruise marche sur des passerelles bringuebalantes au dessus de la scène ont bien été tourné à 20m du sol.

Élégant, fun et prenant, MISSION IMPOSSIBLE : ROGUE NATION renoue avec le film d’espionnage imprévisible tout en maintenant le rythme à 200km/h.

Tom Cruise semble avoir eu le nez creux en décidant d’engager le réalisateur avec lequel il avait déjà collaboré sur le très bon Jack Reacher. Le réalisateur – longtemps scénariste et qui signe une nouvelle fois le scénario de son film – pourrait bien être le nouveau John McTiernan tant les qualités de mise en scène de ROGUE NATION s’apparentent à celles de Piège de cristalTom Cruise s’amuse visiblement comme un fou dans ce nouveau projet de milliardaire, et son enthousiasme fait plaisir à voir. En plus de livrer une parfaite prestation en tant qu’acteur/cascadeur, on le sent véritablement investi dans le film. On perçoit qu’avec le temps, il se complaît à reconnaître dans son personnage d’Ethan Hunt un double de sa propre personnalité : comme le héros l’acteur/producteur réunit une équipe incroyable, se fie des règles… et réalise l’impossible !
A 53 ans, Tom Cruise reste un grand gamin, mais assez mature pour donner à d’autres les responsabilités qui lui échappent. Contrairement à beaucoup d’acteurs richissimes, Tom Cruise n’a jamais eu jusqu’ici le caprice de réaliser son propre film. Comme il aime à le répéter : il prend plaisir à inviter des auteurs à le diriger. Permettre à Rebecca Ferguson de prendre une place aussi importante n’aurait été possible avec aucun autre acteur/producteur. D’une manière ou d’une autre, Christopher McQuarrie a convaincu Tom Cruise que s’était pour le bien du film et des spectateurs.

Si ROGUE NATION n’a pas à rougir de sa facture en tant que film d’action, c’est bien en tant que film d’espions qu’il nous a conquis. Jusqu’au dénouement final, Tom Cruise réussit plus grâce à son intelligence pratique et abstraite que grâce à ses muscles (mais quand même il met la raclée à pas mal de monde). Plus que confronté aux limites physiques, son personnage est surtout entravé par les règles de fonctionnement des institutions et par les a priori des autres personnages, y compris ceux de son équipe. Christopher McQuarrie redéfinit ainsi l’archétype du héros : ce n’est plus seulement celui qui se sacrifie pour les autres, c’est celui qui voit ce que les autres ne peuvent imaginer. La question que pose ROGUE NATION en filigrane est donc de savoir à qui-doit on accorder notre confiance pour prendre les plus difficiles décisions ?
Le final de MISSION IMPOSSIBLE : ROGUE NATION en surprendra plus d’un, à contre-pied des productions hollywoodiennes classiques. On a finalement l’impression d’avoir davantage regardé une partie d’échecs entre deux hommes, qu’à un banal bras de fer. Encore une fois, le réalisateur et scénariste Christopher McQuarrie préfère mettre en avant l’intelligence de son héros que sa force brute.

Décidément, la seule chose « impossible » dans cette nouvelle mission, c’est de s’ennuyer.

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Note des lecteurs9 Notes
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Note finale

  1.  » la seule chose « impossible » dans cette nouvelle Mission, c’est de s’ennuyer » : pari tenu, je me suis ennuyé. Je m’explique :

    Mission impossible (5) – Rogue nation (2015)

    De la physiologie, pas de la psychologie.

    A l’annonce d’un nouvel opus, on se réjouit d’avance pour l’inévitable excitation que cela devrait procurer. C’est un peu comme un MacDo, on se précipite … et à la fin on est quand même écœuré. Mais cela ne nous empêche pas de recommencer. Mais qu’est-ce qu’ils mettent là dedans ? Une drogue !

    Ces films de poursuite, de combats mythologiques, de pulsions, d’adrénaline et de haut rythme cardiaque, sont là pour nous piéger.
    De plus, ils sont totalement enveloppants et nous retranchent du monde de la logique. La musique haute fréquence et les images percutantes y contribuent.
    Tout est fait pour déconnecter notre cerveau évolué et laisser place au monde souterrain, reptilien. Et c’est forcément addictif.
    Je ne dis pas que c’est mauvais, dans le temps j’adorais les manèges. Ils procuraient le même effet.

    Par contre à froid, c’est comme une glace qui a fondu, cela n’a plus guère d’intérêt.

    L’intrigue est quasiment toujours la même. C’est largement emprunté aux grands anciens, dont principalement les James Bond de l’époque classique.

    D’abord une course crescendo qui repousse encore et toujours les sommets de l’invraisemblable.
    – Ici un Tom Cruise à l’air libre et qui s’accroche à la porte désespérément fermée d’un gros porteur qui s’envole, avec juste ses petites mains… Il va bien entendu quand même redresser la situation et sauver le monde en quelques secondes. Juste l’histoire de remettre de l’ordre.
    Je ne sais pas si la Scientologie permet des miracles, mais il est diablement efficace cet homme. Pourtant il a vieilli lui aussi et donc il court beaucoup moins.
    Le principe de cette intro sidérante, on le retrouve dans bon nombre de films de ce genre. C’est un premier lavage de cerveau, vive les émotions du cirque.

    On a droit aussi aux inévitables doutes de sa hiérarchie et réciproquement, au héros seul contre tous. Sans compter le sempiternel « qui manipule qui », qui est digne de confiance ? C’est la paranoïa de base du règne animal. Bonjour le cerveau primitif !

    Le héros est fait prisonnier et menacé de toutes les tortures. Mais il s’échappe à temps, grâce à ce qui semble le sacrifice d’une énigmatique intrigante (la Suédoise Rebecca Ferguson).
    C’est toujours comme cela.

    Le héros parcourt le monde, fréquente les plus belles femmes et les palaces… ou les bouges. La classe ! Le spectateur peut rêver. Le mâle alpha a droit à toutes les femelles et les meilleures places. La loi de la meute.

    A l’opéra de Vienne, le suspense et le tempo s’accélèrent. Le chancelier autrichien risque d’être assassiné. L’arme est déguisée en instrument de musique. Le rythme et l’angoisse sont bien servis par la musique théâtrale de Turandot. On retrouve cette ficelle de l’opéra et de l’accord décisif, dans James Bond mais aussi dans Hitchcock (L’homme qui en savait trop – 1956)… et sans doute encore ailleurs.
    Mais là je ne peux pas leur en vouloir, ayant été moi même dans ce même opéra viennois, dans des circonstances acrobatiques de resquille… je comprends donc l’ivresse du lieu.

    Et puis il y a les inévitables gadgets : depuis des décennies on s’est un peu lassé du stylo qui tue, de la corde qui sort de la montre, de la DB5 etc. Alors, ici comme ailleurs, on tente un retour vers la sobriété. En plus cela ne coûte pas cher. On a ainsi le disque vinyl (20 euros) qui permet la reconnaissance des agents par apposition des mains. La simple paire de lunettes qui est un système miniaturisé à l’extrême de visualisation d’informations (30 euros). Le livret d’opéra dont les caractères s’effacent pour laisser la place à des infos en temps réel (2 euros) …

    Le sympathique Simon Pegg en second dévoué, assume bien son rôle.

    Le film dure deux heures et onze minutes. Désolé, je n’ai pas tenu plus d’une heure de cette accumulation de hargne, de menaces, de peur…
    Vous avez donc le droit de me considérer comme partial.